Le Manitoba, de plus en plus attractif? Le groupe Facebook “Procédures d’immigration au Manitoba” compte chaque mois des milliers de nouveaux membres, des francophones du monde entier intéressés par la province. Mais le traitement des dossiers ne suit pas la demande.

Valentin CUEFF

En mai 2017, La Liberté a rencontré Merouane Abed. Cet Algérien d’origine s’est installé en 2016 à Saint-Boniface avec sa compagne et ses deux enfants.
Depuis deux ans environ, il vante les atouts de la province sur le Web, notamment via un groupe Facebook où les membres découvrent la procédure d’immigration et peuvent poser des questions.

En août 2017, ils étaient 40 000. Trois mois plus tard, ils sont 70 000 inscrits au groupe, soit une moyenne de 10 000 nouvelles personnes par mois. « On a parfois vu 1 000 nouveaux abonnés en une journée », note Merouane Abed.

Un succès qui continue d’aller croissant, depuis qu’il a partagé un guide d’installation au Manitoba, publié en janvier 2015 sur le forum du site Immigrer.com. Pourquoi le Manitoba continue-t-il d’attirer de plus en plus de personnes?
« Il y a plusieurs raisons. D’abord, il y a le sérieux du groupe Facebook. Les gens font de bons retours sur ce qu’on fait et il y a du bouche-à-oreille. Ensuite, il y a le fait que de l’autre côté de l’Atlantique, les choses ne s’arrangent pas. »

Depuis l’été, il a vu une dizaine de familles s’installer au Manitoba. Et la solidarité ne s’arrête pas à la procédure que les candidats lancent sur internet, mais continue après leur arrivée :
« On a attendu des familles à l’aéroport. On les aide dans la recherche de logement, ou lorsqu’il faut acheter une voiture, ou encore pour les garderies. Parce que tout est différent.
« Un ami est arrivé dans la province et travaille maintenant avec moi. Ce sont des références. On essaie de placer les gens là où on est, on les conseille. Surtout, l’assistance psychologique. Parce qu’au début, on est un peu perdu. »

Un site Web comme « vitrine pour l’immigration au Manitoba »

En octobre 2017, Merouane Abed a officiellement lancé un site Web, immigration-manitoba.com. On y retrouve un guide complet sur la procédure d’immigration, un blog, des photos de Winnipeg ou encore des tutoriels en vidéo.
Il travaille à sa construction depuis un an. « Au début, c’était vraiment pour compiler l’information. Quand on poste quelque chose sur Facebook, la réponse se perd dans le flot de nouvelles questions. Un site est beaucoup plus simple, ça limite les interactions. Donc c’était un peu égoïste au début, pour calmer la cadence. En fait, ça ne se calme pas (rires). »

Il consacre au moins quatre heures par jour à la gestion du groupe Facebook et du site. Un travail bénévole dans lequel l’entraide joue, là aussi, un rôle capital.
« Je pense au site comme une vitrine pour l’immigration francophone au Manitoba. J’essaie de m’associer à des personnes ici, issues de l’immigration, pour aider sur le site. Un ami photographe va s’occuper de construire la galerie, ce qui va lui permettre d’exposer son travail, tout en alimentant le site. »

Une vitrine qui pourrait voler la vedette au site du gouvernement qui détaille la procédure d’immigration. Plusieurs personnes ont ainsi souligné au créateur que le logo du site ressemble, à s’y méprendre, à celui de la province. Un pied de nez au manque d’efficacité des institutions? Il n’en est rien.
« On ne savait pas que ça allait prêter à confusion. On précise sur la page d’accueil que ce n’est pas le site officiel de l’immigration. On est en train de revoir la charte graphique, pour éviter tout quiproquo. »

À l’autre bout de la chaîne, un traitement des candidatures ralenti

Si les aspirants à l’immigration continuent d’affluer, le traitement des dossiers prend encore beaucoup de temps.

Le World Trade Centre (WTC) de Winnipeg, qui aide les candidats à constituer leur dossier, a fermé son programme en mars 2017, afin de pouvoir traiter 300 dossiers en attente. À ce jour, il reste encore 230 candidatures à l’étude.

Cependant, Brigitte Léger, responsable du programme d’immigration au WTC, explique ne plus agir seule aujourd’hui : « La Province essaie de nous aider. Auparavant je devais vérifier que chaque demande répondait à leurs critères, avant de leur envoyer la candidature complétée. »
Désormais, quatre agents du gouvernement prennent en charge des dossiers non vérifiés par le WTC. Mais la charge de travail est encore grande. Elle espère toutefois voir le programme rouvrir en avril 2018 et accueillir de nouvelles candidatures.

Par ailleurs, le gouvernement fédéral a annoncé le 1er novembre vouloir augmenter son seuil d’immigration dans les années à venir. Le nombre de nouveaux arrivants passerait de 300 000 cette année à 340 000 en 2020.

Merouane Abed espère que le Manitoba jouera sa carte pour atteindre la cible des 7 % d’immigration francophone dans la province. « Si on veut vraiment développer le français et la francophonie au Manitoba, c’est maintenant qu’il faut embarquer. »