Les obsèques de la reine Élizabeth II se sont déroulées selon des rituels ancrés dans une autre époque. Ces rituels reflètent une conception du pouvoir où le monarque tenait son autorité de droit divin. Or, notre culture a depuis longtemps cessé de croire à une telle notion.

Par Michel LAGACÉ

Nous vivons dans un régime où la légitimité de gouverner vient du peuple, ce que le parlement britannique a établi définitivement lorsqu’il a exécuté Charles I en 1649. Ainsi, les dirigeants répondent au peuple qui les élit, et le monarque règne mais ne gouverne pas. Et si l’autorité vient du peuple, il n’y a qu’un pas à franchir pour remettre en question l’existence même de la monarchie.

Rien de surprenant, alors, que les députés du Parti québécois nouvellement élus profitent de l’accession au trône de Charles III pour insister qu’ils prendront leur siège à l’Assemblée nationale sans lui prêter serment, le voyant comme le roi de la Grande-Bretagne et le chef de l’Église anglicane. Un roi sans pouvoir mais qui porte de chics uniformes et de brillantes médailles.

Il serait effectivement logique d’en finir avec ce système qui encarcane le Canada dans un symbolisme désuet. Et, sauf pour quelques nostalgiques qui ressentent le besoin d’avoir quelqu’un qui règne sur eux, le temps ne serait-il pas venu d’imaginer des symboles en adéquation avec notre réalité canadienne? Ne devrions-nous pas nous défaire de traditions sclérosées empruntées d’une Grande-Bretagne qui dominait un empire?

Allant à l’encontre des péquistes, l’ancien sénateur Serge Joyal rappelait récemment que les tribunaux canadiens ont statué que le serment d’allégeance est prêté non pas à la personne du monarque « mais à la reconnaissance symbolique de notre forme de gouvernement et du principe démocratique servi par le système de monarchie constitutionnelle parlementaire. » (1) Ainsi, le serment vise simplement à reconnaître l’ordre constitutionnel canadien.

Ce point étant acquis, même si le Canada voulait se débarrasser de la monarchie, la Loi constitutionnelle de 1982 prévoit que toute modification de notre Constitution portant sur le rôle de la monarchie requiert l’accord du gouvernement fédéral et des dix provinces.

Devant l’évidente impossibilité des gouvernements d’en arriver à un accord unanime, force est de conclure que nous vivrons encore longtemps dans un régime de monarchie parlementaire. Charles III n’a pas besoin de s’inquiéter pour ses beaux uniformes et ses médailles rutilantes.

(1) Le Devoir, 19 octobre, 2022, « Ce que n’est pas le serment d’allégeance ».