La scène musicale winnipégoise continue de vibrer à l’automne. Après le grand retour du festival BreakOut West, c’est au tour du Festival international de violoncelle, de rassembler des artistes, des producteurs et un public venus de tous horizons devant des performances comme celle de l’Orchestre de jazz de Winnipeg.
Du 28 octobre au 1er novembre, le Festival international de violoncelle se tiendra à Winnipeg. Organisé par l’Agassiz Chamber Music Festival, et sous la direction artistique de Paul Marleyn, le festival invite à la rencontre d’artistes canadiens et de l’international.
Le festival prend une dimension manitobaine toute particulière en réunissant sur scène l’Orchestre symphonique de Winnipeg dirigé par Daniel Raiskin, l’Orchestre de chambre du Manitoba sous la direction d’Anne Manson, le chœur de chambre Dead of Winter sous la direction d’Andrew Balfour, ainsi que l’Orchestre de jazz de Winnipeg (WJO), dirigé par Richard Gillis.
« On m’a dit que l’Orchestre de chambre du Manitoba et l’Orchestre symphonique de Winnipeg étaient déjà impliqués dans un concert, et Paul Marleyn se demandait si l’Orchestre de jazz de Winnipeg aimerait aussi participer, raconte Richard Gillis. J’ai répondu : absolument. Je ne savais pas encore comment on allait faire, mais j’étais partant. »
L’ouverture aura lieu le 28 octobre au Crescent Arts Centre avec Between Earth and Sky de l’Orchestre de chambre du Manitoba. Le 29 octobre, le chœur Dead of Winter, présentera The Ocean in a Drop au Desautels Concert Hall, situé au campus de l’Université du Manitoba. Le 30 octobre, le WJO proposera I’ve Got the World on a String, également au Desautels Concert Hall.
Le dernier jour, le 1er novembre, le festival prendra fin avec Gala Finale: For Rita au Centennial Concert Hall de Winnipeg avec l’Orchestre symphonique de Winnipeg.
Jazz et violoncelle
Le WJO se lance donc dans un projet audacieux en associant deux univers : le jazz et le violoncelle. Comme l’explique Richard Gillis, directeur du WJO, « chacun des quatre violoncellistes présents jouera une pièce en solo avec l’orchestre, et il y aura aussi deux morceaux où les quatre joueront ensemble ».
Le programme s’annonce varié, avec des compositions originales de Jocelyn Gould, une guitariste manitobaine lauréate en 2021 d’un prix Juno, mais aussi des pièces originales de Jeff Presslaff, et des classiques revisités comme Rhapsody in Blue ou I Got Rhythm. Des surprises attendent également les spectateurs, comme une « nouvelle composition écrite spécialement pour l’occasion », confie Richard Gillis.
« Ce qu’on veut faire, c’est faire dialoguer les styles. Le jazz permet de faire ça : il s’adapte, il s’improvise, il accueille de nouvelles sonorités. »
Sous la direction de Richard Gillis, et grâce à son équipe, le WJO est devenu un laboratoire musical. Le jazz, dit-il, c’est « l’art de l’adaptation, on a fait des concerts autour des Beatles ou même du groupe de rock Steely Dan. On peut naviguer vers des styles comme la pop, le rock ou le classique, c’est notre force. ».
Un trésor local
Créé il y a près de trente ans, le WJO s’est imposé comme faisant partie intégrante de la vie culturelle manitobaine. Fondé en 1997, l’orchestre est le premier orchestre de jazz professionnel, communautaire et à but non lucratif du Canada, unique en son genre, son équivalent ne se retrouve que dans quelques villes d’Amérique du Nord.
« Il n’y a pas beaucoup de groupes comme le nôtre qui jouent une série de concerts. Il y en a environ trois comme celui-ci au Canada, et probablement quelques-uns aux États-Unis. Parce qu’à Toronto, et à Vancouver, c’est difficile de démarrer. Toronto devrait avoir un Toronto Jazz Orchestra, mais ce n’est pas le cas, parce qu’il faut justement les bonnes personnes pour le faire fonctionner. Et nous, nous semblons avoir ça ici, du soutien, et les bonnes personnes aux bons endroits. »
Cette année, l’ensemble a remporté le Western Canadian Music Award du meilleur groupe de jazz instrumental, après plusieurs nominations. Une reconnaissance bien méritée au regard de l’investissement de l’ensemble : « nous faisons beaucoup de choses différentes, des enregistrements, des concerts, des collaborations avec des chanteurs, des instrumentistes, et beaucoup de programmes éducatifs ».
Pour lui, le secret de cette vitalité repose en partie sur la vigueur de la scène musicale manitobaine, et cela d’autant plus car « le jazz a toujours eu une place particulière ici. Il y a eu des figures comme Ron Bailey, Larry Roy ou Gilles Fournier, des musiciens qui ont marqué la scène et inspiré les plus jeunes. Ce n’est pas un genre musical marginal, c’est une part vivante de notre paysage musical », ajoute Richard Gillis.
En effet, l’étalement de la ville offre pour lui une forme d’équilibre rare, selon le directeur du Winnipeg, d’une part « la ville est assez grande pour rassembler de vrais musiciens professionnels, et assez petite pour que des projets comme le nôtre voient le jour ». En comparaison avec d’autres capitales canadiennes, ici, dit-il, les projets « ne se perdent pas dans la masse, ils trouvent leur public ».
Une invitation
Après la réussite du festival BreakOut West, qui a mis en lumière le talent des artistes de l’Ouest canadien, l’International Cello Festival s’annonce comme une nouvelle célébration du dialogue des genres.
« C’est une autre occasion de collaborer et d’apprendre. On découvre des façons de mettre le violoncelle au centre d’un orchestre jazz, comment repenser notre manière de jouer. C’est une expérience totalement nouvelle. »
Le festival réunira donc des formations manitobaines emblématiques. Ensemble, elles rappellent combien la ville de Winnipeg est devenue un carrefour musical au niveau international au cœur des prairies, ce qui fait pour Richard Gillis « la richesse de la ville ».
La performance du WJO aura lieu à la salle de concert de l’Université du Manitoba, où Richard Gillis enseigne. Il promet une soirée hors du commun, unique en son sens : « le violoncelle est un instrument magnifique, et les solistes que nous avons invités sont incroyables ».
Le festival international du violoncelle insuffle donc un souffle nouveau, marqué par une forte énergie collective manitobaine. À la fois ancré dans une dynamique locale et dans une dimension internationale, c’est un évènement qui promet d’être « différent, surprenant et surtout très beau », conclut Richard Gillis.

