Ici, les lumières, les ateliers et la figure emblématique du père Noël ont une mission bien précise : offrir un moment de joie et de réconfort aux enfants nouvellement arrivés au Manitoba. Un geste simple en apparence, mais fondamental pour ces familles souvent passées par l’exil, l’incertitude ou la précarité.

Au cœur de cette effervescence se trouve Gilbert Weeh, gestionnaire du programme de connexion communautaire depuis près de dix ans.

« La connexion communautaire permet de créer une synergie entre les communautés qui viennent d’arriver et la communauté accueillante », explique-t-il. Et le village de Noël s’inscrit parfaitement dans cette mission : rassembler, fédérer et transmettre un sentiment d’appartenance.

Cette année marque toutefois un tournant : l’Accueil francophone s’associe au Centre culturel franco-manitobain (CCFM) pour permettre aux enfants de découvrir le village du père Noël déjà installé sur place. Une nouveauté bienvenue, qui permet aux familles participantes d’avoir accès à une programmation déjà bien étoffée.

Les enfants de 0 à 12 ans, arrivés entre décembre 2024 et décembre 2025, y trouveront jeux, animations et surtout, « cerise sur le gâteau, ajoute Gilbert Weeh, c’est qu’ils reçoivent un cadeau », en plus de la traditionnelle photo avec le père Noël.

C’est également un moment pour rencontrer d’autres jeunes vivant une expérience similaire.

« Les enfants comprennent qu’ils ne sont pas les seuls, qu’il y a en a d’autres qui sont arrivés également avec eux », explique Gilbert Weeh.

D’année en année, la participation augmente. Il se souvient qu’à son arrivée, 300 enfants avaient bénéficié de ce moment de joie.

« Et cette année, on est autour de 600 enfants qui vont recevoir un cadeau », observe-t-il.

Pour la communauté, il s’agit également d’un moment fort, et plébiscité. « Il y a des familles qui ont participé l’année dernière et qui veulent revenir! », dit-il en souriant. « Malheureusement, on ne peut plus les prendre ».

L’évènement répond aussi à des réalités parfois douloureuses. Certains jeunes n’ont jamais connu de fêtes de Noël, ou en ont été privés par des circonstances compliquées.

« Parfois, il y a des enfants qui n’ont pas eu le privilège d’avoir un moment de fête parce que c’est situé dans des zones de guerre », dit-il avec gravité.

Parmi les souvenirs de Gilbert Weeh, un récit lui revient avec émotion.

« C’était un enfant qui sortait d’un camp de réfugiés. Son père lui avait promis un cadeau, mais il est malheureusement décédé avant Noël. Lorsqu’ils sont arrivés ici, on leur a donné un cadeau, et le garçon a eu une voiture de sapeur-pompier. Le garçon a dit que c’était le cadeau qu’il avait demandé à son père. Et il m’a demandé : Est-ce que c’est mon papa qui t’a donné ce cadeau pour moi? J’ai compris que c’était important d’espérer, d’organiser cette Fête et de continuer à apporter », confie-t-il avec émotion.

Il complète ses propos en ajoutant que certaines familles venant d’arriver peuvent aussi avoir des moyens limités.

Un évènement solidaire

Si la magie de Noël opère, c’est grâce à une chaîne de solidarité bien rodée. L’Accueil francophone fait appel à des partenaires comme Francofonds, Réseau Compassion, la Société de la francophonie manitobaine (SFM), ou CCFM pour aider à collecter des présents pour chaque enfant. Sans oublier les partenaires communautaires, ou encore des éducatrices et éducateurs francophones du Manitoba. Et la générosité de tout un chacun. « Il y a des bonnes volontés qui se lèvent et ils viennent nous offrir également des cadeaux. C’est la mobilisation, c’est la générosité qui fait cette fête-là », précise Gilbert Weeh

Les dons doivent être neufs et adaptés aux âges. Une vingtaine de bénévoles rejoignent ensuite l’équipe pour trier, emballer et préparer les cadeaux.

L’édition 2025 n’a pas été simple à organiser.

« Au début de l’année, on n’était pas très sûr d’organiser cette fête à cause de beaucoup de restructurations », reconnaît Gilbert Weeh. Mais abandonner n’était pas envisageable.

« Apporter un sourire à un enfant, ça vaut mieux que de l’or, dit-il avec conviction, pour nous, c’était un crime de lèse-majesté d’abandonner cette fête ».

La tradition a heureusement pu être maintenue. Et mieux encore : l’Accueil francophone envisage déjà de renouer l’an prochain avec son partenaire historique, la Fédération des parents de la francophonie manitobaine (FPFM), afin de proposer une fête chaleureuse, inclusive et mémorable.

Cette célébration n’est pas qu’un divertissement : elle est aussi un outil d’intégration essentiel.

« Leur intégration est aussi importante que celle des adultes. C’est important pour nous de donner de la place aux enfants. Et on leur souhaite également une bienvenue dans le Canada », conclut Gilbert Weeh.