Après huit ans passés à Vancouver, le bureau du groupe TV5/Unis TV a désormais été transféré à Winnipeg. Pour prendre les rênes de cette aventure manitobaine, Guy Boutin, chef de la production originale pour l’Ouest et les Territoires du Nord, a quitté l’Acadie pour le Manitoba. 

Avec le départ de l’ancien directeur et l’arrivée de Guy Boutin, le moment se prêtait au changement, comme l’explique Marie-Philippe Bouchard, présidente-directrice générale (PDG) de TV5 Québec Canada : « Guy était d’accord pour partir à la conquête de l’Ouest, mais il souhaitait le faire depuis Winnipeg pour des raisons cohérentes. D’abord, la densité du tissu francophone, mais aussi, cela lui donnait l’occasion de développer des relations et fédérer le milieu culturel francophone, à partir d’un autre centre vital. » 

Pour Guy Boutin, la relocalisation du bureau avait en effet beaucoup d’importance. « Les ressources francophones en scénaristes, en réalisateurs et en techniciens se trouvent principalement ici. Avoir cette proximité change un peu la dynamique et renvoie une image rassurante. Ça permet d’engager les discussions avec des producteurs en Alberta ou encore en Colombie-Britannique. » 

Mais ce changement de territoire s’accompagne aussi de son lot de nouvelles épreuves. « Le territoire en lui-même représente déjà un grand défi, explique Guy Boutin. En Acadie, il y avait 15 producteurs et je les croisais tous les samedis au marché (rires). Ici, le territoire est plus vaste. » Un facteur avec lequel il va falloir apprendre à composer. Au coeur d’un territoire plus étendu qui est celui du Nord et de l’Ouest, les enjeux et les réalités ne sont pas les mêmes d’une province à l’autre. Cela dit, certaines choses, elles, restent inchangées. Entre autres, le manque de professionnels francophones dans le milieu de l’audiovisuel. 

D’ailleurs, à ce propos, le nouveau chef de la production pour l’Ouest et les Territoire du Nord souligne : « Le bassin de comédiens francophones demeure un défi, peu importe la province. C’est vrai que le Cercle Molière existe, il y a aussi des ateliers de théâtre à l’Université de Saint-Boniface, mais cela existe aussi ailleurs. Ce qu’il faut travailler aujourd’hui, c’est le réseau. » 

Former au métier 

Il faut donc travailler à le renforcer, mais aussi à le faire grandir. Pour ça, Marie-Philippe Bouchard et Guy Boutin ont profité de cette rencontre au CCFM pour parler de leur offre de formations, en français. 

La mise en place de ces formations, elle est le fruit d’un constat simple : les ressources sont encore trop rares. « Nous ne sommes pas une école. Mais nous souhaitons offrir les bases de nos métiers », explique Guy Boutin. » 

Marie-Philippe Bouchard rebondit : « Nous avons utilisé cette recette en Acadie et elle fonctionne. Ceux qui suivent la formation finissent par travailler. Parfois pour nous, parfois pour d’autres, l’essentiel est qu’ils travaillent en français. » 

À titre d’exemple, sur 15 scénaristes formés en Acadie, neuf ont trouvé du travail en sortie de formation. 

Les dates pour ces formations seront annoncées dans le courant du mois d’avril et devraient débuter en mai. « La première sera une formation en documentaire. » 

Ces dernières s’étalent sur trois fins de semaine et sont payantes pour le moment. « Nous travaillons avec nos partenaires pour faire financer les formations et les rendre gratuites pour les étudiants. » 

D’ailleurs, en tant que partenaire important du projet, les formations intégreront le programme d’étude du cursus de Communication multimédia de l’Université de Saint-Boniface. 

Aujourd’hui, les deux professionnels estiment que 75 % des plateaux de tournage sont anglophones. Mais, au-delà de la dimension minoritaire de la francophonie, une autre raison explique cette prédominance de l’anglais dans le milieu. « Le budget des productions anglophones est beaucoup plus important. Alors les francophones bilingues ont tendance à se tourner vers les productions anglaises, là où le salaire est plus intéressant. » 

Il ne faut pas écarter non plus la piste de l’insécurité linguistique qui, pour la PDG, a empêché certains comédiens de se lancer dans le milieu. « Le monde médiatique général ne met pas en lumière les accents. C’est notre rôle de faire changer cette réalité. Entendre son accent à la télévision c’est une validation. »