En amont de la Journée de vérité et de réconciliation, La Liberté est en pleine préparation d’un cahier spécial consacré aux langues autochtones. Nous en avons profité pour discuter avec l’ancien ministre des Affaires du Nord Canada, Dan Vandal.
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« Pendant mes cinq années comme ministre des Affaires du Nord et de PrairiesCan, j’ai souvent été amené à délibérer avec les Nations autochtones du Nord et des Territoires. Chaque fois, la question de la langue revenait comme extrêmement importante pour les Nations, constate Dan Vandal.
« Dans la région de l’Inuit Nunangat notamment qui couvre une grande partie de l’Arctique canadien, et surtout au Nunavut, la majorité du monde parle encore en inuktitut et leur langue est quelque chose dont ils et elles sont passionnés. »
L’ancien ministre a donc travaillé fort pour la protection des langues autochtones dans le Nord. « On a réussi à signer une entente d’évolution avec le Nunavut », se réjouit-il.
Cette entente historique, signée le 18 janvier 2024 sous le titre Entente sur le transfert des responsabilités relatives aux terres et aux ressources du Nunavut, signifie que « tout ce que le Fédéral faisait pour administrer les affaires du Nord gouvernementales est désormais transféré au gouvernement public du Nunavut, explique l’ancien ministre et député Métis de Saint-Boniface.
« Toutes les décisions seront désormais prises par le gouvernement du Nunavut plutôt que d’être imposées par Ottawa, et elles seront bilingues anglais-inuktitut. » C’est donc un pas important vers l’autodétermination des peuples du Nunavut.
Il ajoute que « dans le cadre de ce transfert, de l’aide sera envoyée au Nunavut d’Ottawa pour qu’ils puissent embaucher les personnes de leur choix, notamment des personnes qui pourront travailler en inuktitut, et offrir des formations en inuktitut à ceux et celles qui en auraient besoin. Ceci permettra de garantir l’accès à des services en inuktitut.
« Ça va aider à protéger, améliorer et promouvoir l’inuktitut et les autres langues autochtones au Nunavut, mais aussi partout au Nord. Il y a environ 14 Premières Nations au Yukon, 27 aux Territoires du Nord-Ouest, et des peuples Inuit et Métis au Nunavut. »
Si le Nunavut est le premier territoire visé par une telle entente d’évolution, il n’est pas impossible que d’autres ententes soient signées avec les autres territoires à l’avenir.
« Au Nunavut, contrairement au reste du Nord canadien, la majorité de la population, soit 75 %, est inuktitut et cette langue est vraiment très forte, très présente. Donc le consensus était facile. Dans les Territoires du Nord-Ouest, la population autochtone représente 50 % de la population totale. Au Yukon, c’est 25 %. »
En parallèle de l’entente avec le Nunavut, Dan Vandal tient à rappeler qu’il a aussi pu observer des avancées en faveur des langues autochtones à travers le Programme des langues autochtonesdu ministère du Patrimoine canadien, administré en partenariat avec les Nations autochtones.
« Sur les cinq ans, on a octroyé des centaines de millions $ pour soutenir la protection, l’amélioration et la promotion de leurs langues et dialectes par les Nations autochtones. Ce programme lancé par le gouvernement Trudeau était très populaire, et j’espère qu’il va continuer car la survie des langues est importante pour les peuples autochtones et pour la réconciliation.
« Ottawa doit être là pour appuyer les communautés dans leurs démarches de promotion et de retour à la langue, mais pas pour leur dire quoi faire. C’est important que ça vienne des communautés sur le terrain. Historiquement, le Fédéral a fait assez de dommage comme ça en imposant quoi dire et quoi faire aux peuples autochtones! »
À l’issue de son mandat ministériel, Dan Vandal reste optimiste. « La question de la survie des langues autochtones est omniprésente dans les conversations avec les Nations autochtones, mais j’ai vu partout des gens, notamment des jeunes, passionnés par cette question. Et avec l’appui des programmes, j’ai confiance dans le pouvoir des communautés, dans leurs capacités à se battre pour leurs langues, leurs cultures », conclut-il.