L’artiste visuelle Monique Larouche, qui s’intéresse au Japon dans ses œuvres, s’en va à Kyoto pour y exposer ses peintures.

La Liberté / Culture
Monique Larouche va exposer, entre autres, 13 emakimonos d’inspiration japonaise comme ceux-ci à Kyoto, au Japon.

D’adoption manitobaine depuis dix ans, l’artiste québécoise, Monique Larouche, exposera ses œuvres au Japon pour la première fois, à l’Institut Franco-Japonais du Kansai à Kyoto, du 18 au 25 mai 2012. Elle a intitulé son exposition Hommage au Japon.

« Depuis trois ans, je m’intéresse beaucoup au Japon et aux thèmes japonais dans mes peintures, confie Monique Larouche. Hommage au Japon, c’est une exposition pour remercier le Japon d’avoir enrichi mon travail lors de ces dernières années.

« À force d’étudier ses artistes, ils font maintenant partie de mon répertoire et de mon inspiration, admet-elle. J’ai découvert avec eux différents niveaux de compréhension. Ils font beaucoup de superpositions dans leurs tableaux pour montrer diverses parties, raconter une histoire. J’ai repris cela. »

En effet, l’artiste francophone a notamment développé l’art de peindre sur des toiles en hauteur inspirées des rouleaux japonais, les emakimonos, de 7 x 2 pieds. « Les emakimonos sont très précieux au Japon, affirme Monique Larouche. Les Japonais les utilisent à l’horizontale pour raconter des histoires.

« J’ai transféré ce système à la verticale car j’aime peindre en grand, mais chacun de mes tableaux dit aussi une histoire sur sa hauteur, poursuit-elle. Le spectateur doit faire sa part de travail pour découvrir l’œuvre en observant, en décodant, en interprétant et en portant attention autant à l’ensemble qu’aux détails. »

Monique Larouche présentera à Kyoto dix nouvelles aquarelles, 13 emakimonos inédits et trois peintures montées en triptyque qui n’ont encore jamais été exposées. « Je ne présente jamais deux fois la même exposition, explique-t-elle. Ça me motive à faire quelque chose de différent, à trouver autre chose à raconter. »

L’effet tsunami

C’est en 2009 que Monique Larouche a commencé à peindre des tableaux ressemblant aux œuvres japonaises. « Je n’avais pourtant jamais vraiment peint des choses d’influence asiatique, mais c’était mon humeur à ce moment-là, se souvient l’artiste de 61 ans. Ça me venait naturellement.

« Mais je me suis vite dit qu’au-lieu de faire «comme si» c’était japonais, je devais plutôt aller voir leur véritable univers, sur place, ajoute-t-elle. J’ai découvert le Japon en 2011, juste après le tsunami. Ce fut une grande expérience artistique, esthétique et humaine. »

Le tsunami du 11 mars 2011 a été un point tournant dans sa production artistique. « J’étais en état de choc et de profonde tristesse pour les Japonais et j’avais besoin de peindre pour eux », se souvient-elle. Monique Larouche s’est en effet sentie très touchée par la tragédie qui touchait alors le Japon et par le sort des survivants du tsunami. Elle-même survivante d’un accident d’auto il y a 20 ans où tous les autres passagers ont péri, elle confie savoir que « c’est épouvantable d’être survivant. Et pour ma part, c’est toujours l’art qui m’a aidée à me relever dans la vie. L’art thérapeutique a même été l’objet de mon doctorat ».

Malgré la tristesse, les œuvres de Monique Larouche qui seront exposées à Kyoto sont cependant loin d’être toutes de couleurs sombres. « Je suis revenue aux couleurs pastels après l’été 2011 car je ne pouvais pas vivre dans la souffrance, confie l’artiste. Il y en a trop dans ma vie depuis mon accident. Les forces naturelles comme le tsunami sont destructrices, mais elles peuvent aussi être porteuses d’espoir et de reconstruction. »

Par ailleurs, l’artiste peintre vivant à Winnipeg n’a pas non plus fait fi de son identité canadienne dans les peintures qu’elle présentera au Japon. « Certains symboles japonais se sont transformés en symboles de l’Ouest canadien dans mes œuvres car c’est qui je suis, constate-t-elle. Par exemple, le mont Fuji est un peu devenu les Rocheuses, et on retrouve beaucoup de totems de la côte Ouest, inspirés de l’artiste Emily Carr. Mais ces liens se sont faits de façon instinctive. Je m’en suis rendue compte après. »

Monique Larouche mesure aujourd’hui sa chance de pouvoir exposer ses œuvres au Japon. « C’est très rare pour des étrangers d’exposer au Japon, conclut-elle. Même les artistes locaux ont des difficultés pour trouver des lieux d’exposition là-bas. Mais avec l’aide de subventions des Conseils des arts du Manitoba et de Winnipeg, ainsi que de ma persévérance, j’ai réussi! »

 

Camille SÉGUY | Contacter la journaliste