Pour les membres du Comité culturel de Saint-Malo, le trait d’union qui relie les mots « Saint » et « Malo » est essentiel. Ils ont pour objectif de l’officialiser, tant sur les enseignes francophones qu’anglophones.

 

LA LIBERTÉ (PRESSE CANADIENNE)
Alice Hébert et Gisèle Marion revendiquent l’officialisation du trait d’union dans le nom de Saint-Malo, ainsi qu’il apparaît sur le panneau à l’entrée du village.

Par Angelika ZAPSZALKA
Plus qu’une simple application du code typographique français, le trait d’union entre les mots « Saint » et « Malo » représente, pour les membres du Comité culturel de Saint-Malo, un hommage aux fondateurs de la communauté. « C’est honorer nos fondateurs que de rendre à Saint-Malo son trait d’union, explique l’ex-présidente du Comité, Gisèle Marion. À l’origine, le village a été baptisé à l’aide d’un nom francophone. Le désir du trait d’union n’est donc pas un caprice, mais le désir de rendre aux résidants du village ce qui leur est dû, ce qui fait partie de leur identité. Et puis, le trait d’union nous permet aussi de nous différencier des villages non francophones. »

Rendre à César ce qui appartient à César, voilà donc l’objectif que s’est fixé le Comité culturel de Saint-Malo, afin de réconcilier le passé avec le présent. « Nous voulons simplement que Saint-Malo soit reconnu bilingue, ajoute l’actuelle présidente du Comité culturel du village, Alice Hébert. Ceux qui ne sont pas sensibles aux subtilités de la langue française ne se rendent sans doute pas compte de la différence entre « Saint-Malo » et « St. Malo ». Mais pour les autres, il s’agit d’une erreur flagrante qui pose question. »

Un affront à la typographie française

Gisèle Marion ne manque pas de ressources pour prouver qu’à l’origine, le trait d’union de Saint-Malo faisait partie intégrante du nom du village. « Dans son recueil de chansons folkloriques Chansons à répondre au Manitoba, Marcien Ferland présente le village de Saint-Malo avec un trait d’union. L’ethnologue a fait le tour des villages bilingues et s’est renseigné auprès de ses chanteurs. Ses sources sont fiables. »

Elle dévoile aussi que la chanson À Saint-Malo, beau port de mer, qui figure dans Les 100 plus belles chansons, ouvrage publié en 1956 aux éditions Musicales la Bonne Chanson, fait elle aussi apparaître le trait d’union.

Enfin, elle se réfère évidem­ment au code typographique français pour le justifier. « Dans Le lexique des règles typographiques en usage à l’Imprimerie nationale depuis 1971, il est indiqué que le trait d’union se met entre « saint » et le nom suivant quand l’appellation ainsi formée désigne une localité, une fête, une rue, etc., mais non s’il s’agit du saint lui-même, note Gisèle Marion. Dans notre cas, Saint-Malo doit donc prendre une majuscule et un trait d’union pour être correctement orthographié. »

Un constat qui avait déjà été réalisé quelques années plus tôt par Paulette Gosselin, décidée à entreprendre des démarches pour faire reconnaître le fameux trait d’union. « Anciennement secrétaire du Comité culturel, puis présidente, Paulette Gosselin a déposé, en 2008, une proposition sur le sujet à l’Assemblée générale annuelle à Somerset, explique Gisèle Marion. Celle-ci a été adoptée mais malheureusement, il n’y a pas eu de suivi, car personne n’a été désigné pour l’assurer. »

Vers une orthographe unique

Ce que Paulette Gosselin a commencé, Alice Hébert et Gisèle Marion comptent bien l’achever. « D’autres villages francophones ont leur trait d’union, remarque l’actuelle présidente du Comité culturel de Saint-Malo. C’est notamment le cas du village de Saint-Pierre-Jolys, qui s’est battu pour l’avoir. Qu’est-il arrivé au nôtre? Nous nous engageons nous aussi à le faire revenir afin qu’il apparaisse partout, comme c’est le cas sur le panneau à l’entrée du village. »