LA LIBERTÉ (PRESSE-MANITOBA) - Blogue Haïti

Dans la quasi éternelle transition démocratique enclenchée en Haïti, l’organisation des élections demeure un des nœuds gordiens. C’est le terrain sur lequel tous les gouvernements élus ou de facto de l’histoire récente d’Haïti perdent de leur statut de gestionnaire de la bonne marche des institutions républicaines. Le gouvernement Martelly/Lamothe semble n’être pas en train de faire la différence au-delà de tous les slogans de promotion de l’État de droit.

Si les élections ne s’organisent pas au cours de l’année 2013, le Sénat tombera en caducité, faute de quorum, donc Martelly se verra devant le fait accompli et peut-être, à bien des égards, recherché, de diriger le pays par décret. Certains commentateurs dénoncent cette tentative de l’Exécutif de miner le Parlement et du coup affaiblir l’un des trois pouvoirs essentiels à la construction et à la pérennité des règles démocratiques. Le président semble damer le pion à ses adversaires en se servant du troisième pouvoir le CSPJ (Conseil supérieur du Pouvoir Judicaire) censé être indépendant pour renvoyer sine die la formation d’un conseil électoral tantôt transitoire, tantôt permanent en vue d’organiser des élections crédibles. Des élections cruciales où les citoyens se souviennent encore de la date fatidique du 29 novembre 1986 où ils furent massacrés car voulant porter au pouvoir Me Gérard Gourgues, vu par l’Internationale, comme un gauchiste qui pourrait conduire Haïti vers une indépendance politique et économique avec bien sûr l’amélioration des conditions de vie des masses populaires.

Les gestes de tergiversation du pouvoir en place de ne pas créer des conditions propices aux élections sénatoriales en disent long sur la culture politique qui perdure et son corollaire : la perpétuelle transition démocratique. Sauf qu’à bien des égards, le jeu peut déraper. Il faut savoir quand lâcher la corde, ce que M. Martelly feint ne pas comprendre.

Qui a peur des élections aujourd’hui? Ceux qui ont peur de les organiser, du moins de les gérer en toute transparence.

Donc tout compte, le pouvoir craint de ne pas perdre aux prochaines joutes. L’électorat est loin d’être acquis. Et la mobilisation des Lavalassiens, sous la direction du chef à vie du parti, Jean-Bertrand Aristide, qui garde un profil bas mais peut-être prêt à devenir un faiseur de roi, puisque la Constitution en vigueur ne lui permettrait pas de briguer un deuxième mandat, presse ou déprime plus d’un dans les couloirs du palais national. Les rumeurs des élections vont bon train mais les combines du pouvoir en place d’en repousser les dates sont bien évidentes. Mais la marge de manœuvre s’amincit au fur et à mesure que le temps passe et que des voix non moins importantes se lèvent pour dire : Arrêtez le jeu dont les rouages sont bien connus tant la stratégie a été répétée à outrance.

On se souvient bien que du temps de René Préval, l’émissaire des Nations Unies, en Haïti de l’époque, Edmond Muller, a officiellement publié les dates des élections qui ont conduit Martelly au pouvoir, et ceci contre l’avis du président Préval. Les délégations du département d’État américain et celles des Nations Unies qui font le va et vient en Haïti ces jours-ci n’augure rien de positif pour ce gouvernement. Un gouvernement à qui on veut couper les vivres, le Canada en premier. Les États-Unis qui manipulent l’aide aussi à des fins d’influence stratégique.

Quand Pamela White, ambassadrice des USA en Haïti déclare disposer de 20 millions de dollars pour l’organisation des élections si elles sont crédibles et démocratiques, n’est-ce pas là déjà le comble de l’impatience des grands amis d’Haïti, en fait les réels faiseurs de roi dans ce pays.

 

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