La Liberté ÉDITO

Par Jean-Pierre Dubé

@jeanpierre_dube

La Liberté du 30 octobre 2013

Stephen Harper nie avoir été au courant des transactions entre son bureau et des sénateurs dans le scandale des dépenses à la Chambre haute. Alors pourquoi le premier ministre s’empresse-t-il de mettre dans la rue trois sénateurs qu’il a nommés avant que la GRC ait terminé son enquête?

Peut-être faut-il leur retirer l’immunité parlementaire au plus vite pour les empêcher de dire publiquement ce qui s’est passé à huis clos. La semaine dernière, le chef a ordonné à son caucus de suivre ses directives pour nettoyer le Sénat. Mais des détracteurs dans les rangs laissent présager que ce gouvernement est en difficulté.

Entre-temps, Sam Katz nie avoir été au courant de transactions immobilières ayant mené Winnipeg à construire, entre autres, une station de pompier sur un terrain qui ne lui appartenait pas. Pourtant, ce marché avait été conclu entre deux de ses amis et anciens partenaires en affaires : le directeur exécutif de la Ville et un gros propriétaire d’immobilier. Ce maire a-t-il un avenir politique?

La presse s’est interrogée sur la complexité des processus décisionnels et sur les connaissances des élus et hauts fonctionnaires de Winnipeg quant au partage de leurs responsabilités. Ces enjeux ressemblent à ceux des parlementaires à Ottawa où le tout-puissant Bureau du premier ministre mène les appareils législatifs et exécutifs avec la même poigne.

Le Winnipeg Free Press a conclu que la Ville doit revoir ses processus décisionnels et fournir à ses chefs une éducation permanente en matière de gouvernance. La recommandation est aussi faite régulièrement à Ottawa par des officiers du Parlement. Et à la Société franco-manitobaine (SFM), qui vient de tenir son Assemblée annuelle le 24 octobre.

Les 225 participants ont endossé la recommandation d’une formation en gouvernance pour le Conseil d’administration (CA). Mais construire les capacités des membres déjà en poste n’est qu’une réparation. Ne faut-il pas le faire aussi de façon active et continue à l’intention des aspirants? Les réalités changent et l’histoire n’attend pas. Les compétences sont le moteur des sociétés qui avancent.

Au fil des années 1980, les Caisses ont relevé les défis du temps en remplaçant par des professionnels les “bons gars” qui géraient les institutions. En préparant la gestion scolaire, la Fédération des parents des années 1990 a créé un programme de formation pour les administrateurs scolaires, repris pas la suite par l’Université de Saint-Boniface. Le réseau de santé en français de la dernière décennie a procédé de même.

Déjà, les membres de la SFM ont ajouté au CA des compétences en gestion financière avec Robert Tétrault, en inclusion culturelle avec Justin Morrow et en revendication politique avec Walter Kleinshmit. Attendons de voir ce que le nouveau groupe va produire. Mais ce qui sous-tendait les recommandations présentées à l’Assemblée annuelle ne relevait-il pas d’un autre niveau de frustration? L’impression que la SFM a abandonné l’espace public.

Le leadership, s’il exige des idées et des compétences, demande par-dessus tout de la combativité. Comment la SFM va-t-elle se rendre assez attrayante pour que les brillants, les compétents et les passionnés se manifestent de plus en plus?

La recommandation de tenir des États généraux a fait son chemin. C’est un exercice essentiel et urgent qui demande une préparation. Encore faut-il décider dans quelle ligue on veut jouer.