La Liberté ÉDITO

Par Jean-Pierre Dubé

@jeanpierre_dube

La Liberté du 24 septembre 2014

Le chat adore attraper des souris. Il ne le fait pas toujours parce qu’il a faim, mais par instinct. Il aime traquer jusqu’à l’épuisement de sa proie. Mais comme dans la célèbre série Tom & Jerry, la souris n’est pas sans défense : elle sait où sont les espaces de sécurité.

La pensée stratégique, les pratiques réussies, la loi et le droit.

Cette histoire commence au tournant du millénaire avec un nouvel enjeu, l’immigration, qui devient un pilier pour agrandir les communautés francophones. Ottawa accepte d’en faire une priorité des plans en matière de langues officielles et l’immigration devient intersectorielle, regroupant des stratégies de population, d’économie, de santé et d’éducation.

En 2012, les communautés ont accueilli 3 685 immigrants francophones. Citoyenneté et Immigration Canada (CIC) y consacre 29,4 millions $ dans l’actuelle Feuille de route.

En novembre 2013, une 1re Semaine nationale de l’immigration francophone donne lieu à 115 évènements de promotion et de célébration. La Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) nourrit un lien avec le nouveau ministre. Tout est au beau fixe.

En 2014, on constate que les cibles n’ont pas été atteintes. Au début septembre, le fédéral annonce le renouvèlement du portail en immigration francophone, l’intention de tripler le nombre d’immigrants en milieu minoritaire et de consulter sur les moyens à prendre.

Pourtant, les coupures ont déjà commencé. L’an dernier, Ottawa éliminait l’enveloppe permettant aux communautés de participer à Destination Canada, le forum annuel d’immigration en Europe.

Le 12 septembre, le fédéral annonçait la fin, dès le 30 du mois, du programme Avantage significatif francophone (ASF). Mis sur pied pour appuyer les communautés, il simplifie le processus d’embauche de travailleurs étrangers qualifiés et d’expression française.

L’explication du ministre : il fallait mettre fin à toute forme d’abus dans la sélection d’employés au pays. Chris Alexander assure que la continuité sera assurée par un nouveau programme, Entrée Express, dès janvier 2015.

Combien de travailleurs francophones ont-ils été embauchés? Personne ne le mentionne. Pas de détails non plus sur la nature des abus.

Si on tenait à la continuité, pourquoi ne pas avoir attendu la fin décembre pour démanteler l’ASF? Et pourquoi ne pas avoir informé d’avance les organismes francophones? La FCFA a sans doute raison de déposer une plainte auprès du commissaire aux langues officielles. On a l’impression de jouer au chat et à la souris.

Il reste que ça se joue à deux. Des organismes nationaux et régionaux œuvrant en immigration font partie d’un comité conjoint avec CIC. Comment se fait-il que, dans ce dossier capital, le partenariat ne permet pas d’être mieux renseigné sur ce qui s’en vient?

Donner des coups de poing sur la table ne crée pas nécessairement une mobilisation ni un rapport de forces. On pourrait soigner les liens et exploiter davantage nos espaces de sécurité.