Oui, l’Afrique accuse la cour pénale internationale (CPI) de racisme! En effet, depuis 2003 huit pays africains se sont retrouvés face à cette cour, et chose bizarre, toutes les procédures, tous les procès depuis cette date ne concernent, presqu’exclusivement, que l’Afrique (le Mali, l’Ouganda, le Soudan, la Côte d’Ivoire, le Kenya, la République centrafricaine, la Libye et la république du Congo). La question à mille dollars serait de savoir pourquoi des ressortissants de pays comme la Syrie, la Birmanie, l’Afghanistan ou l’Irak n’ont jamais été inquiétés, alors qu’une trentaine d’Africains ont déjà été inculpés par la CPI.

Lors de son sommet de 2013 en Éthiopie, l’Union Africaine (UA) a ouvertement accusé la CPI et les pays membres africains ont même menacé de se retirer de cette institution internationale. L’Union africaine souligne que certaines enquêtes sont bâclées et truffées de partialités.

la Cour pénale internationale (CPI) mène une “sorte de chasse raciale’’ en ne poursuivant que des Africains, a affirmé lundi le président en exercice de l’Union africaine (UA), le Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn.

Dernièrement, les inculpations du président du Kenya Uhuru Kenyatta et de son vice-président William Ruto ont véritablement exacerbé la colère des présidents africains. Ces dirigeants kenyans sont accusés d’avoir planifié les violences politico-ethniques post électorales : environ 1200 morts et 600 000 déplacés, tel était le bilan qui a plongé tout un pays dans l’horreur en 2007. Ils sont accusés de crime contre l’humanité pour avoir incité cette violence. Les Africains menacent de se retirer de cette institution, ce qui pourrait être désastreux pour cette cour, car 43 États ont signé l’acte fondateur de la cour pénale internationale, dont 34 ratifications venant de l’Afrique. La date du procès du président et du vice-président kenyans était provisoirement fixée au 7 octobre 2014, mais avons appris hier le 19 septembre 2014 que la CPI a ajourné la date de début du procès.

Que donc penser de cette cour? Une cour mise sur pied par l’Europe! Une cour financée par l’Europe! Une cour dirigée par l’Europe! Les questions fondamentales ou les questions logiques qui viennent à l’esprit sont les suivantes : la CPI est-elle un tribunal européen qui juge que des Africains? Ou simplement, dessert-elle les intérêts des Africains ou ceux des Européens?

À mon sens, les présidents africains ont totalement raisons de s’opposer à ces partialités et à ces injustices qui minent la crédibilité de cette institution. Mais, il faut dire d’emblée que ma position ne cautionne nullement cette culture d’impunité qui caractérise le climat politique africain, et ce, depuis bien des années. L’une des raisons pour lesquelles la CPI doit réajuster son tir est le fait que cette institution donne l’allure d’une machine de reconquête coloniale du continent africain. Certains observateurs parlent même « d’outil de recolonisation ». Je pense que les Africains doivent se mobiliser, prendre leurs responsabilités et mettre sur pied, des institutions judiciaires continentales et des mécanismes capables de mettre fin à l’impunité d’individus ayant commis des crimes contre l’humanité. Si le CPI doit continuer d’exister, je pense aussi qu’elle ne pourrait valoir son pesant d’or que si elle met au cœur de ses activités, l’intérêt des populations africaines en contribuant à la disparition de l’impunité qui est un frein au développement économique, social politique du continent noir.

Mamadou Ka