Dans le sillage de la Loi 5, le gouvernement Pallister effectue présentement un sondage sur Internet (1), pour mieux comprendre les besoins et les priorités du public par rapport aux services provinciaux offerts en français. Mais le questionnaire conduira-t-il à une amélioration des services?

Par Daniel BAHUAUD 

Teresa Collins, la directrice générale du Secrétariat aux Affaires francophones, souligne que l’initiative fait partie d’un processus visant à « bien mettre en oeuvre la Loi 5 » (2) : « Nous faisons l’inventaire des services en français offerts par les ministères, les agences gouvernementales et les sociétés d’État. Nous avons aussi consulté le Conseil des organismes et nous avons rencontré les directions des organismes. Il était également essentiel d’obtenir la perspective du public. »

Le projet est mené par le Secrétariat et la Société de la francophonie manitobaine, à la demande du Conseil consultatif de la francophonie manitobaine.

L’initiative cherche à savoir quels services en français, dans des domaines tels que la santé, la justice ou l’éducation, sont les plus utilisés par les Manitobains. Des questions portent aussi sur la manière dont les Manitobains se prévalent des services. Est-ce surtout par téléphone ou encore en ligne? Fréquentent-ils les centres de services bilingues?

Certaines questions visent à évaluer la qualité de l’offre du service, ainsi que la qualité du service tout court. Teresa Collins : « Nous demandons s’il arrive aux Manitobains de ne pas demander un service gouvernemental en français, et pourquoi. C’est une question clé, puisque nous savons qu’il peut y avoir des lacunes qui découragent le public. »

Patrick Fortier, le Bonifacien qui a lancé une pétition en janvier pour sauver la clinique express du quartier, estime que « la Province a du travail à faire pour améliorer la qualité des services en français ». « Je les exige souvent. La plupart du temps, dans un bureau de la Province, il y a quelqu’un qui peut t’accueillir en français. Ça devient plus difficile par contre quand on veut un service plus spécialisé. Il faudrait plus d’employés bilingues.

« C’est donc encourageant qu’on veuille sonder le public, et pas juste la francophonie institutionnelle. Cela dit, il faut passer à l’action. On peut consulter et consulter, mais il faut qu’il y ait une nette amélioration des services. »

Michel Lagacé est du même avis. Or le commentateur politique affirme que « les résultats du questionnaire ne pourront servir, à eux seuls, de base pour les stratégies futures du gouvernement ».

« On comprend facilement la volonté du gouvernement d’évaluer sa prestation de services en français. Il serait cependant fallacieux d’inter – préter les réponses à ce questionnaire comme s’il s’agissait d’un sondage. Un sondage est une enquête menée auprès d’un échantillon représentatif de la population dont les résultats peuvent être extrapolés à une population entière. Dans le cas du questionnaire, les réponses seront obtenues des gens qui acceptent de le remplir. Ce qui ne permet pas d’assurer que tous les secteurs et les régions seront représentés selon leur importance dans la population. On risque de fausser les résultats. Tout au plus, les résultats pourront donner une première impression. Pour développer une stratégie, il faudra aller chercher plus d’information sur le terrain. »

Teresa Collins se dit optimiste : « Le questionnaire a été conçu en collaboration avec le Conseil consultatif de la francophonie et la SFM. Nous n’avons pas embauché une firme de sondage. Un des membres du Conseil consultatif, Alexandre Brassard, qui est le doyen de la Faculté des Arts et des sciences à l’Université de Saint-Boniface, s’y connaît en statistique et en sondages. »

Alexandre Brassard élabore : « C’est un échantillonnage de convenance, du type de ceux souvent employés par les gouvernements. L’Ontario a fait appel à la même méthode pour sonder les Franco-Ontariens et la communauté LGBTQ.

« Est-ce aussi précis qu’un échantillonnage aléatoire? Non. Mais on pourra pondérer les résultats. Bien sûr, il faudra tenir compte de la méthode en examinant les résultats. »

(1) On peut compléter le sondage au site Web https://manitobasurveys.gov.mb.ca/ checkbox/services-gouvernementaux-des-francophonesau-Manitoba.aspx

(2) La Loi sur l’appui à l’Оpanouissement de la francophonie manitobaineadoptée le 30 juin 2016.