Par Bernard BOCQUEL
À l’heure qu’il est, soyons optimistes, le gros des ajustements qu’a exigé la rentrée scolaire au sein des familles est sans doute effectué. Dans la Division scolaire franco-manitobaine et ses 23 écoles, cela signifie qu’environ 5 500 jeunes (dont ceux des si importantes prématernelles) ont repris le pli des études.
Pour se faire une idée du projet éducatif que les enseignants de la DSFM doivent collectivement porter, n’hésitons pas à retourner aux voeux que les directions des écoles avaient adressés, par l’entremise de La Liberté, aux 292 finissants de l’année scolaire 2016-2017. En voici un concentré :
« Soyez des ambassadeurs de la francophonie et poursuivez vos rêves. …. Nous vous souhaitons succès et bonheur! …. Vous avez appris et grandi en français et nous espérons que vous allez continuer votre cheminement personnel en français. … N’oubliez pas : rêve + travail = succès!
« Vous avez acquis de l’expérience de vie qui vous permet d’attaquer de nouveaux projets et de nouveaux défis. … Soyez fiers de qui vous êtes et d’où vous venez et tout finira par tomber en place. … Nous espérons que votre séjour à la DSFM vous a permis de vous épanouir pleinement comme apprenants et membres actifs de la communauté! … Suivez vos rêves, vos passions et, surtout, faites de bons choix! … Allez changer le monde! »
De cet amalgame de bons voeux ressort sans peine une partie du rôle du personnel enseignant : celui de pousse-aux-rêves. Il s’agit de donner la confiance et les outils nécessaires aux jeunes pour qu’ils puissent prendre un jour à bras-le-corps leurs responsabilités de citoyens dans ce monde où les puissants ont une fâcheuse tendance à mépriser les minoritaires en tous genres.
Il s’agit donc, entre autres, pour les enseignants de la DSFM, année scolaire après année scolaire, de voir à ce que les écoles permettent à des milliers de jeunes de dépasser une fois pour toutes le complexe du minoritaire, hélas encore vivace chez certains adultes.
Pour y arriver, le message aux élèves est aussi simple que clair. L’effort porté sur le français a pour but d’acquérir un bilinguisme fonctionnel, véritable antidote à de possibles complexes d’infériorité. Ainsi le bilinguisme est non seulement compris comme une valeur fondamentale d’une vie, mais aussi comme un chemin de personnalisation.
L’humain le moindrement éveillé est sans cesse soumis à une quête de sens. Fort heureusement, car c’est bien cet incessant besoin qui le pousse à vivre. « Allez changer le monde! » ont lancé en confiance certains enseignants à leurs finissants en juin.
Pour construire un monde meilleur où les dominateurs n’auront pas le dernier mot, il faut certes former des jeunes de bonne volonté. Mais il faut aussi, et peut-être surtout, s’assurer que leur bilinguisme soit acquis par une pédagogie qui mette l’accent sur la créativité et la capacité critique des élèves.
Ça tombe bien : il n’y a pas de lieu plus naturellement approprié à développer le sens critique et créatif que dans une école où l’on s’emploie à fonctionner avec au moins deux langues. Car tous savent, presque d’instinct, que d’une langue à l’autre les mots, les expressions prennent différentes teintes, renvoient à différentes subtilités, exigent réflexion.
Lorsque les parents des années 1970 bataillaient pour des écoles, ils les appelaient écoles françaises. Avec le passage des années, l’école désirée est devenue franco-manitobaine, ou francophone. Un code pour dire : école pour former des bons bilingues.
Peut-être que le temps est venu d’appeler un chat un chat et les écoles de la Division scolaire franco-manitobaine des écoles canadiennes.