Les aventures de Nelson au Manitoba tirent à leur fin. La dernière planche de la bande dessinée paraîtra dans La Liberté du 13 au 19 décembre. Le dessinateur, Tadens Mpwene et l’une des scénaristes, Morgane Lemée, partagent quelques souvenirs d’une expérience qu’ils savent inoubliable.

Par Daniel BAUHUAUD

Est-ce que vous avez eu des échos des lecteurs depuis la parution de Nelson au Manitoba?

Tadens Mpwene : Beaucoup! Entre autres à l’Université de Saint-Boniface, où j’ai fait des études en affaires. Plusieurs étudiants qui, comme moi, viennent de l’étranger, m’ont souligné qu’ils apprécient beaucoup la manière dont la bande dessinée a abordé leurs expériences, comme le choc culturel, les incompréhensions entre nouveaux arrivants et francophones de souche et même le froid de l’hiver canadien.

Morgane Lemée : Les lecteurs et lectrices qui savent que j’ai participé à l’écriture du scénario m’ont beaucoup parlé de Nelson et de Zoé. Ils me demandaient s’ils finiraient en couple. En dehors des relations entre ces personnages, j’ai eu beaucoup de réactions sur les sujets abordés. Ceux qui font réfléchir, comme la planche parue dans La Liberté du 20 septembre, où on voyait des étudiants canadiens se tenir à l’écart des étudiants internationaux à l’USB. C’est du vrai, ça. Du vécu. Et on l’a incorporé dans la bande dessinée pour stimuler la discussion. Pourquoi cette séparation? Est-elle inconsciente ou voulue?

Tadens, vous avez grandi dans la République démocratique du Congo, vous êtes arrivé au Manitoba le 27 décembre 2014. Nelson, c’est vous?

T. M. : Comme moi, Nelson est un immigrant de l’Afrique sub-saharienne. En ce sens, son expérience ressemble un peu à la mienne. Son arrivée à Winnipeg, au creux de l’hiver, je l’ai vécue pas mal comme lui. Il faisait très froid ce jour-là! Mais non, Nelson n’est pas un récit autobiographique. Je n’ai pas eu d’accident de voiture, par exemple.

On pourrait poser la même question à Morgane. Nelson, c’est vous?

M. L. : Un peu. Dans la mesure où, comme Nelson, je suis une nouvelle arrivante. Je suis de Mamers, une commune située au nord-ouest de la France. Je suis journaliste à La Liberté depuis septembre 2016. Alors comme Tadens, je suis d’ailleurs. J’ai pu faire appel à mes expériences pour suggérer des situations intéressantes pour notre héros. Par exemple, je suis une grande habituée de la Ligue d’improvisation du Manitoba. Si Nelson est allé voir de l’impro, c’est un peu à cause de moi. Et je trouve ça cool que Tadens ait pu dessiner des gens qu’on voit à la LIM. On les reconnaît bien!

Un des charmes de Nelson au Manitoba est justement que ça se passe chez nous…

M. L. : Nos lecteurs mentionnent souvent que c’est un plaisir de reconnaître l’USB, le Musée canadien pour les droits de la personne, l’église du Précieux- Sang, le CCFM, etc. Le point central est que Nelson, s’il est un personnage fictif, pourrait bel et bien exister et vivre ici, chez nous. Et puis le talent de Tadens, c’est de pouvoir reproduire fidèlement et avec beaucoup de créativité notre milieu. Lorsque Nelson et Zoé vont patiner à La Fourche, tout est là. Son dessin de La Fourche vue du ciel est extraordinaire!

Y a-t-il des moments dans Nelson au Manitoba que vous trouvez particulière – ment réussis?

T. M. : Quand on a décidé, Morgane et moi, que Nelson vivrait un accident de la route, on savait qu’on allait lancer un message fort sur la distraction au volant et sur le mauvais emploi des téléphones cellulaires. Je suis très fier d’avoir pu proposer cette réflexion aux lecteurs.

M. L. : Je suis fière d’avoir pu contribuer à la scénarisation de Nelson au Manitoba. C’est une première expérience pour moi, une expérience inoubliable. Au début, je ne savais pas tout à fait comment procéder. Mais avec l’expérience, et beaucoup de discussion avec Tadens, ainsi que Sophie Gaulin, notre directrice et rédactrice en chef, sans oublier Bernard Bocquel, notre rédacteur en chef associé, j’ai pu acquérir l’expérience nécessaire pour raconter un moment dans la vie de Nelson en très peu d’espace. L’écriture d’une bande dessinée exige beaucoup d’économie. Et c’est un véritable travail d’équipe.

Souhaitez-vous que les aventures de Nelson au Manitoba se poursuivent?

T. M. : Je rêve de réaliser d’autres bandes dessinées, entre autres des documentaires sur les gens qui immigrent de l’Asie, de l’Amérique du Sud ou de l’Europe. Et pas juste les Africains comme Nelson. Cela dit, je suis très ouvert à continuer de cheminer avec Nelson.

M. L. : Le concept de Nelson est très ouvert. On est loin d’avoir épuisé les possibilités. Il lui reste beaucoup d’expériences à vivre.