Les Jets de Winnipeg sont en demi-finales de la Coupe Stanley. La fièvre supportrice des Manitobains est contagieuse, mobilisant tout le pays à mesure que la marche ultime approche.

Par Lucas Pilleri (Francopresse)

Le Centre culturel franco-manitobain (CCFM) est témoin de la frénésie qui entoure l’équipe des Jets. Depuis le 20 avril, l’association organise des projections de leurs matches, remportant un vif succès auprès de la communauté. « Une cinquantaine de personnes sont au rendez-vous à chaque fois. Les gens nous appellent pour nous demander si on organise de nouvelles projections, il y a un vrai intérêt », atteste Daniel Girard, coordonnateur adjoint à la programmation.

Les soirées sont animées par Yan Dallaire sur Envol 91 FM, la radio communautaire francophone du Manitoba, qui prend le contrôle des ondes en direct de la salle de projection. « On fait un prématch de 15 minutes et on revient en ondes pendant les périodes », précise l’animateur. Entouré de passionnés de sport, Yan Dallaire et ses « experts » agrémentent la soirée d’analyses sportives pendant environ une heure. « Bien qu’amateurs, les commentaires sont d’un très bon niveau », estime-t-il.

L’animateur est aux premières loges du succès fulgurant de l’équipe manitobaine qui a rejoint la LNH en 2011. « Il y a un gros engouement ici pour les Jets, je ne pense pas avoir vécu quelque chose de ce genre-là à Winnipeg depuis longtemps », témoigne-t-il. Il en veut pour preuve l’affluence à l’arène Bell MTS Place qui fait salle comble à chaque rencontre. « Il y a environ 25 000 personnes dans les rues entourant l’arena, en plus des 15 000 spectateurs, observe l’homme de radio. C’est beaucoup pour une petite ville de 700 000 habitants ».

Les Jets, fédérateurs

Daniel Girard voit le rapprochement que génèrent les Jets. « Les gens viennent se détendre durant la semaine, c’est un moment de socialisation. On a beaucoup de Franco-Manitobains, de Français et d’immigrants d’un peu partout », constate le coordonnateur. Pour lui, l’équipe a le mérite de « souder les gens », une partie intégrante « de la culture canadienne et franco-manitobaine ».

Yan Dallaire le rejoint : « Ça va au-delà des communautés. Les Jets sont l’élément rassembleur de toutes les minorités et majorités du Manitoba. Les gens de toutes origines portent les chandails, ça montre comment le hockey peut être inclusif et rassembleur ». Même constat du côté du président de la Société internationale de recherche sur le hockey, Jean-Patrice Martel : « Quand une équipe a du succès, toutes les communautés vont montrer de l’enthousiasme et avoir envie de se regrouper ».

« Une question de fierté nationale »

Depuis le retour des Jets en 2011, rachetés alors en tant que Trashers d’Atlanta, les fans sont légion. « C’est une fierté provinciale », énonce Daniel Girard. « On fait jaser partout au Canada parce qu’on est la seule équipe canadienne qui reste en compétition », ajoute Yan Dallaire. Et l’engouement dépasse les frontières.

Pour Jean-Patrice Martel, il s’agit de « fierté nationale car les Canadiens ont envie qu’une équipe canadienne ramène la Coupe Stanley ». Beaucoup ressentent en effet que la coupe leur a été « volée par les Américains », la dernière victoire nationale remontant à 1993 avec les Canadiens de Montréal.

La délocalisation des Jets pour devenir les Coyotes de Phoenix en 1996 a été vécue comme un drame. Leur retour était attendu avec impatience malgré les obstacles : « Les conditions de leur retour étaient extrêmement difficiles. La Ligue nationale de hockey a imposé un certain nombre de billets à vendre car ils ne souhaitaient pas que ça réussisse » informe le président de la Société internationale de recherche sur le hockey.

Mais l’alchimie a fonctionné et les quelque 15 000 places de la Bell MTS Place se vendent comme des petits pains depuis maintenant sept ans. Certes, l’engouement n’est pas de même intensité en dehors de la province, mais « les Canadiens de tout le pays se rallieront de plus en plus derrière les Jets à mesure qu’ils se rapprochent de la finale », soutient Jean-Patrice Martel. « Je vois les Jets en finale contre les Capitals de Washington », pronostique l’expert, optimiste.


Ramener à la coupe « à la maison »

La Coupe Stanley a été remportée pour la dernière fois en 1993 par une équipe canadienne. Depuis, se sont retrouvés en finale les Canucks de Vancouver en 1994, les Flames de Calgary en 2004, les Oilers d’Edmonton en 2006, les Sénateurs d’Ottawa en 2007, et les Canucks de Vancouver en 2011.