La tendance ne s’est jamais démentie tout au long du dépouillement des bulletins de vote, durant la soirée du 17 juillet. Dougald Lamont, 49 ans, chef du Parti libéral du Manitoba depuis octobre 2017 vient de réussir un doublé : asseoir sa légitimité politique et donner à son parti le statut de parti politique officiel au Palais législatif. Il succède à l’ancien chef du NPD, Greg Selinger, qui avait démissionné en mars.

Michel Lagacé, le commentateur politique bien connu des lecteurs et lectrices de La Liberté, répond aux questions de la rédaction.

Sans conteste, Dougald Lamont a réussi son double pari…

Michel Lagacé : Le vieux fond libéral de Saint-Boniface s’est manifesté. Dougald Lamont avait le plus à perdre dans cette élection, bien plus que les autres candidats. Il devait se présenter parce que comme chef du parti, il se doit d’être en Chambre. Et du fait que son parti est maintenant officiellement reconnu à l’Assemblée législative, il va disposer de ressources financières supplémentaires en plus de visibilité à la période des questions.

Avec quatre sièges, Dougald Lamont dirige maintenant un deuxième parti d’opposition, ce qui lui permettra de faire sa marque en préparation du prochain rendez-vous qui va vraiment compter, celui de l’élection générale de 2020.

Pourtant Blandine Tona semble avoir mené une campagne très dynamique…

M. L. : Les libéraux ont sans doute pris des votes des néo-démocrates, tandis que le Parti vert a également pris des votes du NPD. C’est tout dire que le vote des néos a été divisé des deux côtés. On comprend qu’il ne restait plus au chef du NPD Wab Kinew que d’affirmer que le résultat de l’élection constitue un rejet du gouvernement Pallister.

Est-ce que les résultats laissent entrevoir la tendance des prochaines élections générales?

M. L. : Il faut faire attention. Il s’agit d’une partielle. Ce qui n’a aucun effet sur le gouvernement au pouvoir. N’en déplaise à Wab Kinew, la dynamique pourrait être très différente dans deux ans, selon la perception que les électeurs auront du gouvernement au pouvoir à ce moment-là.

Pour le moment en tous cas, le Parti néo-démocratique devait démontrer une capacité de se renouveler. Ce qu’il n’a pas du tout réussi à faire le 17 juillet. D’où la question qui tue : si les néos ne peuvent pas gagner à Saint- Boniface, quelle chance auront-ils dans deux ans? L’avenir du parti s’est assombri davantage pour Wab Kinew et son équipe.

Que dire du taux de participation de 48,38 %…

M. L. :Les électeurs ont pris cette élection partielle au sérieux. En même temps, il est clair qu’au moins trois partis ont travaillé très fort pour attirer la faveur des électeurs.

Il est vrai que le Parti progressiste conservateur a pris des décisions impopulaires durant la dernière année. Mais aussi que les électeurs n’étaient pas prêts à accorder leur confiance au Nouveau parti démocratique.

C’est donc dire que c’est un double coup de semonce : au parti au pouvoir comme à l’actuelle opposition officielle.

Par contre pour le Parti vert représenté par Françoise Therrien Vrignon, il doit y avoir une autre dynamique à l’oeuvre…

M. L. : Françoise Therrien Vrignon a nettement attiré plus d’électeurs que le Parti vert n’en attire d’habitude.

Par contre, rien n’est garanti pour l’élection de 2020.

Comme le fait que la défaite des conservateurs n’est pas consommée d’avance?…

M. L. : C’est vrai. Il reste que pour le Parti progressiste conservateur, cette élection a été franchement désastreuse. Qu’il s’agisse du candidat ou du parti, il faut reconnaître que l’histoire n’a pas été tendre envers le Parti conservateur dans Saint-Boniface. Joseph Bernier est le dernier candidat conservateur à remporter la victoire. C’était en 1927.