Ces 27 et 28 juin, quelques ministres se sont rendus à Iqaluit, au Nunavut, pour participer à la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne. La ministre Mélanie Joly a déploré les absences, mais a tout de même décrit la conférence comme un succès. La modernisation de la Loi sur les langues officielles y a été évoquée.

 

Par Geoffrey GAYE (Francopresse)

« On veut toujours avoir le maximum d’élus à la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne parce que l’on veut encore et toujours renforcer notre francophonie canadienne », a déclaré Mélanie Joly lors de la conférence de presse qu’elle a donnée à la clôture de l’évènement.

Et pourtant, seulement 6 des 13 ministres représentant les intérêts de la francophonie dans leur province ou territoire étaient présents. Les ministres du Québec, de la Saskatchewan et du Nouveau-Brunswick, des Territoires du Nord-Ouest, du Nunavut et du Yukon, ont assisté à la 25e édition de ce forum créé en 1994 pour « partager des échanges relatifs aux champs d’action importants des francophones ».

Une nouvelle fois, la province qui compte le plus de francophones en situation minoritaire n’était pas représentée par sa ministre aux Affaires francophones. Tout comme l’année dernière à Whitehorse, l’Ontarienne Caroline Mulroney ne s’est pas rendue à cette conférence. Un choix qui suscite de l’inquiétude chez les francophones de la province, déjà touchés par des mesures budgétaires du Parti conservateur au pouvoir. La ministre a justifié son absence par le remaniement opéré par Doug Ford en début de semaine précédente. Caroline Mulroney est ainsi passée du ministère du Procureur général à celui des Transports, tout en conservant son rôle pour la francophonie (il s’agit de la seule francophone du gouvernement). « Malheureusement, je n’ai pas pu assister à la conférence, mais l’Ontario était bien représenté par la conseillère du premier ministre pour les affaires francophones, Marilissa Gosselin », a déclaré Caroline Mulroney.

L’Alberta, grande absente

Comme l’Ontario, la Colombie-Britannique, le Manitoba, l’Ile-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve-et-Labrador et la Nouvelle-Écosse ont envoyé des représentants chargés de discuter des dossiers de la francophonie. Toutes, sauf l’Alberta.

« Je dois mentionner que malheureusement l’Alberta n’a envoyé aucune représentation cette fois-ci et c’est un fait que l’on déplore. Il n’y a aucune représentation ici, ni au niveau politique ni au niveau administratif », a indiqué la ministre fédérale Mélanie Joly. La ministre responsable du Secrétariat francophone de l’Alberta, Leela Aheer, aurait invoqué un « conflit d’horaire », selon Radio-Canada. La province pétrolière, repassée en avril sous le contrôle du Parti uni des conservateurs de Jason Kenney, venait pourtant d’annoncer la nomination d’une secrétaire parlementaire dédiée à la francophonie, le dimanche précédent.

La modernisation des langues officielles.

C’était l’année des anniversaires. La 25e Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne se tenait l’année du 50e anniversaire de la Loi sur les langues officielles. La modernisation de cette loi a été un sujet fort de l’évènement. Comme l’indique le site internet du gouvernement, « l’honorable Mélanie Joly, ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, a profité de sa présence à la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne pour présenter à ses homologues un document synthèse des réflexions des Canadiens qui ont été recueillies lors de la tournée pancanadienne dans le cadre de l’examen visant à moderniser la Loi sur les langues officielles ».

Depuis des mois, le gouvernement libéral de Justin Trudeau et le Sénat travaillent à une modernisation de cette loi. Des forums et des tables rondes ont abouti le 13 juin à la présentation d’un rapport sénatorial sur le sujet. Ce document recommande « d’importants changements à la Loi sur les langues officielles ».

Le 5 mars déjà, la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA) a présenté à la presse et aux trois grands partis politiques du pays son propre projet de modernisation de la Loi sur les langues officielles. Un projet sur lequel elle travaillait depuis l’automne 2017 et pour lequel elle a effectué une consultation des organismes francophones et eu recours à des juristes et spécialistes politiques pour l’écrire.

Le président de la Fédération, Jean Johnson, a été reçu lors de la conférence habituellement réservée aux fonctionnaires et élus. « Pour la première fois depuis la création de la Conférence ministérielle sur la francophonie canadienne, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada a pu s’assoir à la table pour une session de travail avec les gouvernements fédéral, provinciaux et territoriaux », confirme un communiqué de l’organisme.

Pas de modernisation de la loi avant l’année prochaine

Réélu à la tête de l’organisation en juin, Jean Johnson souligne que la consultation de la communauté francophone par les ministres est une avancée. Mercredi, devant eux, il a présenté la volonté de la FCFA « de bâtir un Canada où les Canadiens reconnaissent la langue française et que ce soit un carburant économique pour le pays ». « Les gens présents ont reconnu que c’était important de préciser ces faits-là. Lorsque les pays francophones africains se développeront, ça sera une chance. La Chine est sur place et le Canada est considéré comme un pays collaborateur et non colonisateur. Le bilinguisme peut jouer un rôle dans l’agenda politique et économique au niveau mondial. »

L’homme dévoile un certain engouement pour l’aspect économique du bilinguisme. « Toutes les provinces n’étaient pas favorables à notre venue, finalement les ministres présents étaient très intéressés. Ils ont posé beaucoup de questions. Ils ont été satisfaits de la grandeur de notre propos et ont indiqué que cette évolution était à souhaiter », raconte-t-il.

Concernant la Loi sur les langues officielles, le président de la FCFA indique qu’elle ne sera pas modernisée avant les élections. « Mélanie Joly nous a dit qu’elle s’en occupait, que ce sera un sujet abordé durant les élections ». Jean Johnson ajoute : « Nous demanderons qu’une modernisation de la loi soit votée la première année du prochain mandat. Nos membres sont en discussion avec les membres du gouvernement. Peu importe qui sera élu, nous travaillerons avec eux pour nos membres. »