Par Michel LAGACÉ

Seulement deux semaines après le déclenchement officiel des élections, les Manitobains pourraient facilement croire que la campagne perdure depuis longtemps déjà. Dès la fin de 2018, le premier ministre Brian Pallister a laissé entendre que les élections pourraient avoir lieu en 2019 plutôt que le 6 octobre 2020, comme le prévoit la Loi électorale du Manitoba. Ne pouvant pas justifier sa décision de précipiter des élections, M. Pallister donne l’impression d’avoir cédé à l’opportunisme politique : les partis d’opposition sont encore faibles après la victoire écrasante des progressistes-conservateurs en 2016, et la situation financière de chacun est beaucoup plus précaire que celle du parti au pouvoir.

Dans ces circonstances, quel intérêt y aurait-il à prêter attention aux propositions de Dougald Lamont, le chef du Parti libéral au Manitoba qui ne détient que quatre sièges à l’Assemblée législative et qui ne menace pas de défaire le gouvernement? Tout bonnement parce qu’il est libre d’aborder des enjeux négligés par les néo-démocrates et les progressistes-conservateurs.

Ainsi, la semaine dernière, M. Lamont a dénoncé ses principaux adversaires pour leur négligence chronique des arts et de la culture : ce secteur ne reçoit pas d’augmentations régulières depuis des années, déclarait-t-il. Il a proposé de créer un fonds de capital culturel en affectant 2,5 % des dépenses d’infrastructures actuelles aux infrastructures culturelles ce qui, d’après ses calculs, permettrait de consacrer 25 millions $ par an à l’entretien et aux améliorations d’édifices culturels. La Salle du centenaire, le Centre culturel franco-manitobain, le Musée du Manitoba et tant d’autres espaces culturels ont besoin de tels investissements depuis longtemps.

Les libéraux proposent aussi d’augmenter le financement accordé aux municipalités pour appuyer les arts. Et là encore, M. Lamont ouvre la porte à d’intéressantes possibilités. Ainsi, tout futur gouvernement provincial pourrait appuyer un projet de premier plan pour marquer le 150e anniversaire de Winnipeg.

La province avait imposé l’amalgamation de 13 villes et municipalités pour créer, au 1er janvier, 1972, la Ville de Winnipeg telle qu’elle existe aujourd’hui. Toutes leurs archives ont été centralisées et languissent aujourd’hui dans un entrepôt inadéquat situé dans un parc industriel, sans contrôle de température et d’humidité et sans protection contre les insectes et autres menaces.

Il revient certainement au gouvernement provincial d’assumer une part de la responsabilité d’assurer que les archives de la ville capitale soient conservées selon les normes archivistiques modernes et qu’elles soient accessibles au grand public. Car depuis 47 ans, la ville néglige cette riche collection d’archives qui constitue notre mémoire collective.

M. Lamont a rendu un service au public en soulignant l’importance d’un secteur trop souvent négligé et pourtant fondamental à une vision saine de la province. Il revient maintenant aux autres partis de nous dire s’ils partagent cette vision.