Par Michel LAGACÉ

La campagne électorale fédérale touche à sa fin, mais un autre compte à rebours qui pourrait être très important pour l’avenir du Manitoba commence ce mois-ci. Il s’agit du 150e anniversaire de la province. Car les activités fébriles qui ont mené à la proclamation de la Loi sur le Manitoba le 15 juillet 1870 remontent très exactement au 11 octobre, 1869. Un groupe de Métis incluant Louis Riel et son cousin André Nault ont alors intercepté des arpenteurs venus du Canada. Quand Janvier Ritchot a mis son pied sur la chaîne des arpenteurs pour les arrêter, il a commis un premier acte de résistance à la tentative du Canada de s’emparer du territoire sans consulter ses habitants.

Puis les évènements se sont précipités. Cinq jours plus tard, les Métis ont établi un comité national à Saint-Norbert. Le 19 octobre, Louis Riel, agissant comme secrétaire, a convoqué une réunion du comité : on venait d’apprendre que William McDougall était parti en direction de la colonie pour en devenir le lieutenant gouverneur choisi par le gouvernement fédéral.

Des actes collectifs de résistance s’ensuivirent. Le 21 octobre, on a érigé une barrière à Saint-Norbert pour barrer la route à McDougall. Les Métis ont occupé pacifiquement le Upper Fort Garry le 2 novembre. Les représentants des paroisses françaises et anglaises ont été convoqués, et un gouvernement provisoire a été établi. Après plusieurs transformations de ce gouvernement, la population a élu un nombre égal de délégués des paroisses anglaises et françaises pour discuter de l’avenir du pays. L’Assemblée législative d’Assiniboia ainsi formée allait siéger du 9 mars au 24 juin 1870. Elle établit une liste des droits et envoya trois délégués à Ottawa pour négocier l’avenir de la colonie. À la conclusion de ces pourparlers, le Parlement fédéral a adopté la Loi sur le Manitoba, qui fut ratifiée par l’Assemblée législative d’Assiniboia le 24 juin et proclamée le 15 juillet 1870.

Ainsi, il y a 150 ans, la paix régnait au tout début de la nouvelle province : anglais et français, protestants et catholiques, anciens habitants et nouveaux arrivants s’étaient entendus sur leur avenir. Mais cet esprit de collaboration a volé en éclats lorsque des forces extérieures vinrent imposer leur volonté. Des droits linguistiques et religieux ont été piétinés et les promesses faites aux Métis n’ont pas été respectées.

Le Manitoba a repris sa propre dynamique lorsque le Premier ministre Duff Roblin et son successeur Ed Schreyer ont proposé des mesures réparatrices pour corriger les torts du passé. Et les tribunaux sont intervenus dans le même sens.

Il faudra rappeler et redynamiser l’esprit de solidarité d’il y a 150 ans pour continuer à rectifier les iniquités du passé et construire le Manitoba de demain. C’est cet esprit qu’il convient de célébrer en 2020.