En conférence de presse le 17 aout, le ministre des Finances, Bill Morneau, a annoncé qu’il quittait ses fonctions de ministre et de député de la circonscription de Toronto-Centre. Bill Morneau explique son départ en soulignant qu’il n’avait jamais eu l’intention de rester en politique fédérale pour plus de deux cycles électoraux. Un nouveau ministre des Finances serait donc mieux à même de diriger un processus de reprise économique qui pourrait prendre des années.
Par Bruno COURNOYER PAQUIN – Francopresse
Il ajoute par la même occasion qu’il a l’intention de poser sa candidature au secrétariat général de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
« Aujourd’hui, j’ai parlé avec Bill Morneau et j’ai accepté sa démission », a annoncé le premier ministre Justin Trudeau, par voie de communiqué, lundi soir. Il y souligne par la même occasion les accomplissements économiques du ministre des Finances au cours de ses mandats et de la période de crise du COVID-19. Le premier ministre promet que le Canada « appuiera fortement » la candidature de Bill Morneau à la tête de l’OCDE.
Différends entre Morneau et Trudeau
Des rumeurs couraient depuis la semaine dernière que des différences de politiques avaient émergé entre Justin Trudeau et Bill Morneau.
Le 11 aout, le Globe and Mail rapportait que des sources confidentielles « qui n’étaient pas autorisées à parler publiquement » suggéraient que le premier ministre considérait remplacer son ministre des Finances. Selon ces sources, des désaccords avaient émergé entre le premier ministre et le Bill Morneau par rapport à l’ampleur des mesures économiques d’urgence liées à la COVID-19.
La CBC rapportait quelques jours plus tard que le premier ministre aurait préconisé un plan de relance qui poursuivait un niveau de dépenses élevé, et qui aurait inclus un plan d’envergure de lutte contre les changements climatiques. Le ministre des Finances aurait été plutôt réfractaire à cette approche et aurait préféré garder les dépenses sous contrôle.
En coulisses, encore une fois selon le Globe, le premier ministre aurait sollicité les conseils économiques de Mark Carney, ancien gouverneur de la Banque du Canada (2008-2013) et de la Banque d’Angleterre (2013-2020). Des bruits couraient à l’effet que celui-ci était considéré comme un successeur potentiel au ministre Morneau.
Le bureau du premier ministre a par la suite affirmé que le ministre Morneau conservait la « pleine confiance » de Justin Trudeau
En conférence de presse, lundi, le ministre Morneau a nié qu’il aurait eu des différends avec le premier ministre, suggérant plutôt qu’ils reconnaissaient tous deux « l’importance d’avoir des discussions et des débats vigoureux pour arriver [à mettre en place] les meilleurs politiques pour les Canadiens. »
Dans la foulée du scandale UNIS
Cette démission se produit alors que les liens du ministre Morneau et de sa famille avec l’organisme caritatif UNIS avaient soulevé la controverse dans les dernières semaines.
Le ministre a admis avoir remboursé plus de 41 000 $ à UNIS en frais de voyage afin de compenser pour les dépenses encourues lors de voyages effectués avec l’organisme au Kenya et en Équateur en 2017. De plus, une des filles de Bill Morneau a pris la parole lors d’évènements d’UNIS, alors qu’une autre travaille pour l’organisme dans un poste administratif.
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Le 16 juillet dernier, le commissaire aux conflits d’intérêts et à l’éthique, Mario Dion, avait annoncé l’ouverture d’une enquête sur les actions du ministre Morneau dans le dossier UNIS.
La famille du premier ministre a aussi été impliquée dans le scandale UNIS : entre 2016 et 2020 la mère de Justin Trudeau, Margaret Trudeau, ainsi que son frère, Alexandre « Sacha » Trudeau, auraient été rémunérés pour leur participation à plusieurs évènements d’UNIS, recevant environ 250 000 et 32 000 dollars, respectivement.
UNIS avait été sélectionné par le gouvernement pour administrer le programme de bourse de bénévolat étudiante du Canada. UNIS aurait pu recevoir jusqu’à 43,5 millions de dollars dans le cadre de ce contrat, depuis résilié.
Une nouvelle ministre des Finances
Un peu plus de 12 heures après la démission de Bill Morneau, le premier ministre Trudeau a annoncé la nomination de Chrystia Freeland à titre de ministre des Finances. La députée de la circonscription de University-Rosedale en Ontario devient la première femme ministre des Finances du Canada. Elle conserve aussi son poste de vice-première ministre.