Photo : Marta GUERRERO

 

Je suis Chelsea Howgate, finissante du l’Université du Manitoba. Je travaille cet été à La Liberté sur les sujets LGBTQ+ et de diversité grâce au programme Jeunesse Canada au Travail.

Avant de vous raconter les histoires des autres, je voulais raconter la mienne.

 

Par Chelsea HOWGATE

 

Dans les albums de photos de ma famille, il y a une photo de moi, à trois ans, que mes parents et mes soeurs ont toujours trouvé charmante. Je portais un tutu rose de Barbie. Personnellement, pendant des années, cette photo ne m’a jamais amusée autant qu’eux. Mais aujourd’hui je la trouve très drôle car elle me rappelle le début de ma vraie identité.

Quand j’avais treize ans, j’ai découvert le mot transgenre. J’avais enfin trouvé un mot qui m’expliquait : Pourquoi j’ai toujours voulu ressembler à des femmes célèbres comme Selena Gomez, et pourquoi j’étais toujours si curieuse de savoir à quoi j’aurais l’air si j’étais une femme.

À l’école secondaire, mon identité était encore secrète. Mais terriblement mal cachée. Si je devais demander à l’un de mes collègues de l’époque, je crois qu’un grand nombre d’entre eux diraient qu’il y avait des indices qui ne mentaient pas. Comme cette fois-ci où je m’étais habillée comme Luna Lovegood de Harry Potter pour halloween en 2014.

Puis, j’ai commencé à mettre du maquillage et du vernis. Je disais que c’était pour les cours de théâtre. Évidemment ce n’était qu’une excuse.

J’avais aussi des amies qui m’aidaient à explorer mon identité. Elles m’emmenaient dans des magasins pour me donner l’occasion d’acheter mes propres vêtements (et même parfois, quand j’avais un peu plus de courage, je les portais directement dans le magasin avec l’espoir que les personnes, qui n’étaient pas au courant, ne me reconnaitraient pas). Mais je gardais mon identité secrète auprès de ma famille.

Ma mère, évidemment, avait quelques soupçons, alors j’essayais de garder mon secret encore plus secret. Ça me fait rire aujourd’hui. Mais à l’époque elle pensait que je prenais des drogues. À la fin de la douzième année, j’ai enfin partagé ma vraie identité. D’abord avec mes soeurs. J’ai pensé qu’elles pourraient m’aider à dire à nos parents que je n’étais pas leur fils, mais leur fille.

Tout ne s’est pas fait d’un coup. J’avais encore besoin de vivre une double vie pendant les deux premières années à l’université. Mes professeurs, très compréhensifs, ont commencé à m’appeler Chelsea et utiliser les pronoms féminins. J’étais encore discrète avec mes parents. Mais j’ai compris qu’ils avaient déjà commencé à m’accepter tel que je suis.

À l’hiver 2018, avec l’aide de ma mère, j’ai commencé à prendre des oestrogènes. Et un an plus tard, ma famille, mes amis, et mes collègues me voyaient comme une femme.

Je fais encore face à des problèmes quotidiens ici et là, comme les personnes qui oublient que je suis elle et pas il, ou qui utilisent quand-même mon prénom de naissance et pas le prénom que je préfère. Il y a aussi certains membres de ma famille, les plus âgés, qui ne savent pas ou qui ne comprennent pas. Mes amis, également, de temps en temps, font des erreurs avec les pronoms. Même s’ils s’excusent, c’est le genre de petites choses qui me rend triste.

Il y a aussi des problèmes beaucoup plus dangereux pour les personnes comme moi. Quand j’ai commencé à me présenter en tant que femme, je me souviens, qu’une nuit, j’ai été accostée par une personne qui pensait que c’était très drôle de voir un homme en jupe. Il était plutôt agressif. J’ai eu de la chance, rien ne m’est arrivée. Beaucoup d’autres personnes dans notre communauté ne s’en sortent pas aussi bien, certaines meurent à cause de ces situations, spécialement les personnes transgenres.

En revanche, j’ai eu aussi des expériences très positives et encourageantes, ainsi que le soutien de beaucoup de personnes dans ma vie, notamment les membres de la communauté LGBTQ+.

Sans l’aide de mes professeurs et de mes collègues à l’Université du Manitoba, je n’aurais pas eu autant confiance en moi. Je n’aurais jamais osé performer avec mes ensembles musicaux, ni me présenter avec le prénom que j’ai choisi, ni porter certains vêtements et encore moins avoir les cheveux longs. Par dessus tout, je n’aurais jamais eu la chance de partager mon histoire et mes expériences propres avec des journaux comme The Uniter et, aujourd’hui, La Liberté.

 

À la Chelsea de treize ans,

tu es superbe comme femme.