Par Michel Lagacé

 

Justin Trudeau l’a prouvé en 2015 : une campagne électorale peut bouleverser tous les calculs. Lorsque le Premier ministre Stephen Harper a lancé une campagne électorale de 78 jours le 2 août cette année-là, rares étaient ceux qui prévoyaient que le Parti libéral, avec 36 sièges à la Chambre des communes et en troisième position derrière les conservateurs et les néo-démocrates, formerait un gouvernement majoritaire le 19 octobre 2015.

Le 15 août 2021, cherchant à tirer parti des sondages favorables et confiant que le bilan de son gouvernement dans la gestion de la pandémie favoriserait sa réélection, Justin Trudeau a déclenché des élections anticipées pour retrouver les 15 sièges sur 338 dont il a besoin pour s’assurer d’une majorité absolue à la Chambre. Or, le même jour, suite à une offensive éclair, les forces talibanes ont capturé Kaboul, la capitale de l’Afghanistan.

Et tout à coup, Justin Trudeau semblait être aussi mal préparé pour réagir à la situation internationale que pour convaincre les Canadiens que les élections étaient justifiées. Il a la malchance politique d’être à la barre au moment où les Américains ont décidé de se retirer du pays, provoquant la crise humanitaire qui fait les manchettes jour après jour.

Sans compter qu’il n’a pas encore réussi à convaincre une majorité de Canadiens qu’un gouvernement majoritaire est nécessaire ou même souhaitable. Car Jagmeet Singh, le chef du Nouveau Parti démocratique, avait clairement indiqué que sa formation était prête à continuer à appuyer le gouvernement de Justin Trudeau à la Chambre des communes.

Et puisque, dans sa lutte contre la pandémie, le gouvernement fédéral avait empilé un déficit de 354,2 milliards $ en 2020-2021, et son budget projeté de 509,8 milliards $ pour l’année 2021-2022 avait été approuvé par la Chambre malgré un déficit prévu de        154,7 milliards $, il est difficile de voir l’obstructionnisme que Justin Trudeau a invoqué pour justifier des élections.

Au moment de déclencher les élections, Justin Trudeau pouvait croire que ses chances de reconquérir une majorité parlementaire étaient excellentes. Presqu’à mi-chemin dans la campagne, il est devenu évident que le Premier ministre a mal jugé l’humeur de l’électorat. Il lui reste l’espoir que, au cours des prochaines deux semaines et demie, une ou plusieurs questions de priorité nationale émergeront pour lui permettre de démontrer que c’est lui qui doit être aux commandes du pays.