Par Michel LAGACÉ

Au plus simple, aucun parti politique n’a pu atteindre ses objectifs électoraux parce qu’aucun n’a réussi à motiver l’électorat à choisir le changement. Ainsi, on remarquera peu de changements à la Chambre des communes entre le 43e parlement et le 44e. Justin Trudeau, par contre, est affaibli. Toujours à la tête d’un gouvernement minoritaire, il ne peut plus menacer de déclencher des élections si les partis d’opposition refusent d’appuyer ses initiatives. Il a fait une très mauvaise lecture de l’humeur de l’électorat et son jugement politique sera désormais mis en doute même à l’intérieur de son propre parti.

Erin O’Toole a perdu dans sa tentative de réconcilier les divisions idéologiques et régionales profondes qui minent son parti depuis des décennies. Dans son programme électoral, il a, entre autres, introduit un système de tarification du carbone et modéré la position du parti qui, officiellement, voulait révoquer le contrôle sur les armes d’assaut imposé par les Libéraux. Et pour cela, une aile de son parti s’est sentie trahie. Par contre, il n’a pas obligé ses candidats à se faire vacciner, une décision qui est allée à l’encontre du comportement de la grande majorité de l’électorat.

En voulant plaire aux différentes factions irréconciliables de son parti, Erin O’Toole a inévitablement déçu des partisans, dont certains se sont tournés vers le Parti populaire du Canada de Maxime Bernier. Le résultat : un vote divisé entre les conservateurs et le Parti populaire a permis à plusieurs circonscriptions en Ontario et en Colombie-Britannique de passer aux Libéraux, tandis qu’encore une fois, Maxime Bernier n’a pas réussi à faire élire un seul député.

Déchiré par des conflits internes, le Parti vert a perdu toute crédibilité. Sa chef, Annamie Paul, arrivée en quatrième place dans sa circonscription de Toronto-Centre, a quitté son poste. Le Bloc québécois et le Nouveau Parti démocratique (NPD) n’ont pas réussi à faire bouger l’électorat, chacun n’obtenant qu’un siège supplémentaire à la Chambre.
Dans l’immédiat, Erin O’Toole devra choisir entre diriger un parti moins idéologique que par le passé ou être l’otage d’une cabale qui, par exemple, rejette la science au nom d’une définition très tordue de la liberté individuelle. Pour sa part, Justin Trudeau devra s’efforcer de présenter un programme législatif qui pourra attirer l’appui du Bloc ou du NPD. Il serait aussi bien avisé de faire preuve d’une plus grande humilité que par le passé.

Les Canadiens ont choisi de ne pas changer de gouvernement, et ils s’attendent à ce que les députés retournent au travail pour faire face aux multiples défis qu’affronte le pays. Au cours du 44e parlement, tous les députés devront garder en tête les résultats de ces élections et démontrer qu’ils sont à la hauteur de la situation.