FRANCOPRESSE — La création d’une instance nationale et des changements pour mieux accueillir les immigrants. C’est ce que propose le Comité consultatif national en établissement francophone (CCNÉF) dans son rapport publié le 15 juin. Une manière pour les services d’établissements au Canada d’assurer une intégration et une rétention réussies des personnes immigrantes dans les communautés francophones et acadienne.

Inès Lombardo — Francopresse

C’est la première fois que plusieurs joueurs du secteur de l’établissement en immigration proposent une instance pancanadienne d’appui et de coordination. Le besoin d’une telle instance avait été identifié lors des Sommets régionaux en établissement francophone menés par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC) en 2018, soit «le besoin de donner une voix et de mettre en place une instance nationale en appui aux fournisseurs de services directs francophones».

Le rapport du Comité consultatif national en établissement francophone (CCNÉF) rappelle que ce besoin avait déjà été exprimé « lors des consultations en 2015 et en 2016 » et que le CCNÉF « s’est alors vu confier le mandat de développer des recommandations à l’intention d’IRCC, à propos d’un modèle renouvelé de coordination nationale et d’appui au secteur francophone de l’établissement ».

Répondre à des défis ancrés

L’instance serait une solution à des défis majeurs identifiés par le CCNÉF. Le premier de ces défis se trouve au sein même des ressources et des besoins du secteur francophone de l’établissement, selon une étude de Sociopol menée en 2019 pour la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA).

Un « manque de visibilité auprès de l’ensemble de leurs principaux publics immigrants et des communautés accueillantes » et « une proportion limitée du continuum de services pour une région donnée » y sont identifiés.

Des « enjeux en termes de recrutement et de rétention du personnel, du fait de la langue de travail » freine aussi un établissement des personnes plus positif. « Trop peu de temps et de ressources » sont disponibles pour aiguiller les ressources humaines rémunérées et bénévoles des communautés accueillantes.

Le rapport souligne notamment :

  • L’absence du principe d’égalité réelle entre le secteur francophone et anglophone de l’établissement ;
  • Des inquiétudes sur la capacité du secteur à répondre à une hausse du recrutement ;
  • Des ressources financières qui ne répondent pas aux besoins actuels du secteur.

D’autres lacunes subsistent «dans le parcours d’intégration francophone» et le manque de partage des savoir-faire des organisations et une concurrence entre celles-ci se feraient sentir, selon les travaux menés par le CCNÉF.

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Les travaux du CCNÉF appuient la Stratégie en immigration francophone d’IRCC lancée en 2019 «et plus précisément le troisième objectif : renforcer les capacités des organisations francophones», souligne Bintou Sacko, l’une des trois coprésidentes du comité et présidente d’Accueil francophone, au Manitoba.

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« Il est important de noter que l’attraction des immigrants francophones dépend également des efforts de plusieurs autres joueurs clés, en plus du CCNÉF. Nous espérons que les recommandations à venir du CCNÉF contribueront à favoriser l’atteinte des objectifs gouvernementaux et communautaires liés à l’immigration francophone », précise-t-elle.

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« Pas la seule condition pour un meilleur accueil »

« Nous n’en sommes pas encore à savoir sous quelles forme ou entité l’instance serait créée, nuance Bintou Sacko, l’une des trois coprésidentes du comité et présidente d’Accueil francophone, au Manitoba. C’est encore tôt pour recommander [à IRCC] un mécanisme de fonctionnement à privilégier. La poursuite des travaux avec les parties prenantes du secteur nous permettra de définir les prochaines étapes ». Le mandat du CCNÉF s’achève en 2025.

À travers Yves Saint-Germain, directeur de l’immigration francophone et des langues officielles, IRCC siège aussi à la table de la présidence partagée du CCNÉF, avec Bintou Sacko et Dorra Gdoura, directrice adjointe de Centre de transition de carrière pour adultes (CTCA) au collège La Cité, à Ottawa.

Travaillant de concert avec les autres organisations du secteur de l’établissement francophone, le service de communication du ministère assure que le rapport du CCNÉF « est réalisé dans un esprit de “par et pour les francophones”, afin de renforcer la vitalité des communautés francophones en situation minoritaire à l’extérieur du Québec. Le ministre d’IRCC, Sean Fraser, est tenu informé des dossiers en lien avec l’immigration et l’établissement francophones ».

Mais, comme Bintou Sacko, le ministère reste prudent : « La création d’une instance pancanadienne d’appui au secteur de l’établissement n’est pas la seule condition pour un meilleur accueil de nouveaux arrivants. Une approche holistique rassemblant toutes les forces vives autant des communautés que gouvernementales est nécessaire pour pallier ces défis et assurer de bonnes conditions pour accueillir de nouveaux arrivants », assure Nancy Caron, agente du service des communications d’IRCC.

« Les travaux du CCNÉF se poursuivent afin de peaufiner les pistes d’action en recommandations pour IRCC d’ici l’hiver 2022. Il est alors trop tôt pour parler de mise en œuvre de l’instance », ajoute-t-elle.

En plus de proposer une instance pancanadienne, le CCNÉF identifie sept changements dans les services d’établissement pour les personnes immigrantes francophones. Parmi ces propositions, une « insertion en emploi efficace, respectueuse des expertises [des personnes immigrantes] et de leur identité professionnelle est visée ».

Le comité vise aussi une « offre de services en français large et cohérente » ou encore des « politiques, les règlements et les ressources des gouvernements [qui] appuient activement l’inclusion des personnes immigrantes francophones ».