LE FRANCO (Alberta) – Le pape François vient de conclure une visite de trois jours à Edmonton où il a entrepris son « pèlerinage pénitentiel » qui se terminera à Iqaluit vendredi. Même si le Vatican a réussi à organiser sa visite en un temps record, les membres des Premières Nations l’ont attendu pendant plusieurs années.

Vienna Doell – Le Franco

Dès son arrivée en sol canadien, le pape a été accueilli par une cérémonie officielle très sobre où les médias étaient presque plus nombreux que les invités d’honneur. 

Après avoir salué les leadeurs autochtones, la gouverneure générale Mary Simon et le premier ministre Justin Trudeau, quatre musiciens autochtones de la Première Nation Sioux Alexis Nakota ont entonné un chant d’honneur officiel au son des tambours. 

Le pape a ensuite passé plusieurs minutes à parler et échanger des cadeaux avec une délégation de représentants autochtones, dont des chefs de Premières Nations, des survivants des pensionnats et des dirigeants de diverses organisations autochtones et religieuses. 

Son premier discours public

Le pape s’est adressé au public pour la première fois le 25 juillet après s’être recueilli pendant plusieurs minutes au cimetière Ermineskin, à Maskwacis, situé devant un ancien pensionnat, où se trouvent des tombes marquées et des tombes anonymes d’anciens pensionnaires. Le souverain pontife s’est ensuite dirigé en fauteuil roulant vers l’amphithéâtre où il s’est adressé à des milliers de membres des Premières Nations qui s’étaient déplacés pour l’entendre.

Dans l’attente de son arrivée, l’ambiance était joyeuse entre les membres des Premières Nations qui prenaient des photos et partageaient nourriture et couvertures pendant cette journée froide. De nombreuses personnes étaient venues de loin pour rencontrer le pape et étaient prêtes à partager leurs histoires. 

(De g. à d.) Eliza Manoose, Irène Natress et Joanne Jones au parc Maskwa. (Photo : Vienna Doell – Le Franco)

« Je cherche la guérison pour tous les survivants », a confié Irene Natress qui a fait le voyage avec sa sœur, Joanne Jones. Toutes deux sont des survivantes de la Gordon’s Indian Residential School, en Saskatchewan, qui a reçu des enfants entre 1888 à 1996. « Dix de nos frères et sœurs ont été enlevés. Je suis assez émue en en parlant de cela », ajoute Joanne avec émotion. 

Excuses attendues pour certains, réconciliation inachevée pour d’autres

C’est dans sa langue maternelle, l’espagnol, que le pape s’est adressé à la foule et a enfin présenté ses excuses « pour la manière dont de nombreux membres de l’Église et des communautés religieuses ont coopéré, même à travers l’indifférence, à ces projets de destruction culturelle et d’assimilation forcée des gouvernements de l’époque, qui ont abouti au système des écoles résidentielles ».  

La foule a chaudement applaudi et crié au moment où ces mots ont été prononcés dans l’amphithéâtre de Maskwacis. L’ambiance était chargée en émotions alors que des odeurs de sauge, de foin et de tabac circulaient dans l’air. 

Les réactions étaient beaucoup plus contenues lors des rencontres avec les peuples autochtones à l’Église du Sacré-Cœur d’Edmonton et à la célébration de la liturgie au Lac Sainte-Anne qui se sont déroulées par la suite alors que beaucoup de gens présents sont restés assis en silence pendant son discours. 

Kenina Wood au pèlerinage de Lac Sainte-Anne. (Photo : Vienna Doell – Le Franco)

Kenina Wood n’a pas accepté les excuses du pape. « Certaines personnes disent, et je suis d’accord avec eux, qu’il pourrait y avoir plus. Je veux voir plus d’actions. » Originaire de la première nation St. Theresa Point au Manitoba, Kenina Wood a fait le voyage jusqu’au Lac Sainte-Anne en tant que survivante de deuxième génération des écoles résidentielles. « Je suis venue pour la mémoire et l’honneur de mon père Darius Mason », a-t-elle indiqué. 

Lors de la grande messe en plein air au stade du Commonwealth, le pape a évoqué à plusieurs reprises le « trésor » des ainés et la manière dont ils ont contribué à façonner ce que sont les fidèles, en les aidant à grandir dans l’amour et la foi.

« Ils nous ont conféré quelque chose qui ne pourra jamais nous être enlevé et qui, en même temps, nous permet d’être uniques, originaux et libres », a-t-il déclaré. Des paroles qui ont été accueillies avec émotion par les quelque 50 000 personnes présentes.

La tournée canadienne du pape, qui se déroule sous le thème « Marcher ensemble », se poursuit à Québec le 28 juillet pour se conclure à Iqaluit le vendredi 29 juillet où il rencontrera d’anciens élèves de pensionnats autochtones et des membres de la communauté inuite.