FRANCOPRESSE – En première conférence du Forum des jeunes ambassadeurs de la francophonie des Amériques, l’historien et auteur Jean-Louis Roy s’est penché sur la décolonisation, un processus auquel n’échappe pas la francophonie. Tout au long de l’évènement, les 50 participants se questionneront sur leur rôle à jouer pour construire une francophonie forte et affranchie.

Ericka Muzzo – Francopresse

Pour Sylvain Lavoie, le directeur du Centre de la francophonie des Amériques (CFA), qui organise l’évènement, la question est de savoir « de quelle façon maintenant, nous, on se voit? »

« [Il faut] prendre acte d’où on vient, [se demander] quelle est notre place maintenant et quelle place on souhaite occuper dans l’avenir », propose-t-il en marge de la conférence d’ouverture du 6e Forum

Sylvain Lavoie, président-directeur général du Centre de la francophonie des Amériques . (Photo : Ericka Muzzo – Francopresse)

« J’espère que nos jeunes ambassadeurs vont repartir chez eux avec plein d’idées, plein de contacts, plein d’énergie et ressourcés pour poursuivre ce qu’ils sont déjà, c’est-à-dire des leadeurs dans leurs communautés, avec des outils et un réseau pour pouvoir agir davantage », souffle l’Acadien en poste depuis octobre 2020.

Une expérience « transformatrice »

Le participant Andrik Risso, qui avait assisté à l’édition 2014 du Forum à Winnipeg, au Manitoba, raconte que « ç’a été vraiment une expérience transformatrice, ç’a complètement changé ma vie ».

Celui qui revient au Forum en tant que chef de famille, pour encadrer les nouveaux participants, explique être retourné chez lui, au Brésil, avec une vision du monde « élargie » et un nouveau regard sur la francophonie des Amériques.

« Je suis revenu au Brésil plus engagé, avec une sensibilisation aux communautés un peu plus ouverte ; je me sentais vraiment comme un leadeur, un moteur de changement! J’ai commencé à m’impliquer encore plus et j’étais bien plus motivé », assure-t-il.

Au niveau professionnel, il enseigne le français depuis plusieurs années en plus de poursuivre des études au doctorat liées à la sociolinguistique, après une maitrise en cognition et langage. « Je choisis la francophonie comme objet de travail, comme objet de recherche », souligne Andrik Risso.

La participante Alice Musele, la marraine Mélissa Ouimet et le chef de famille Andrik Risso. (Photo : Ericka Muzzo – Francopresse)

Le français, un véritable avantage

Pour sa part, la Franco-Albertaine Alice Musele espère repartir du Forum avec « un paquet d’informations » et d’outils qu’elle pourra appliquer dans sa communauté.

Animatrice du programme éducationnel BUCACY à l’Alliance Jeunesse-Famille de l’Alberta Society (AJFAS), dont l’objectif est d’apprendre « à nos enfants immigrants francophones âgés de 6 à 12 ans comment se comporter, comment prendre de bonnes décisions et comment bâtir des relations saines dans nos communautés », elle note que la communauté tente de grandir et d’élargir son offre de services, mais que les francophones de l’Alberta vivent encore « pas mal de défis ».

« Je suis originaire du Congo et quand je suis arrivée, il n’y avait que l’anglais autour de moi. J’ai même entendu une collègue dire que dans ce genre de situation, on se sent caché, on ne veut pas trop dire qu’on est francophone… On se sent un peu gêné, on ne sait pas à qui parler, on devient muet au milieu des gens et ça, ce n’est pas bon du tout », observe Alice Musele.

Ayant fréquenté une école d’immersion, elle s’est rendu compte que ses amis parlaient anglais durant les diners et qu’elle-même ne parlait pas puisqu’elle n’était pas à l’aise dans cette langue. « À un moment, je me suis dit : “Attends, je suis dans une école qui enseigne le français, moi je connais le français, mais je ne parle pas, pourquoi? Pourquoi je dois aller chercher l’anglais coute que coute? Non, c’est à eux d’aller chercher le français, pas à moi d’aller chercher l’anglais!” » 

Par la suite, elle a fait un baccalauréat bilingue au Campus Saint-Jean de l’Université de l’Alberta. Même si elle souligne que l’anglais est incontournable au quotidien, « en même temps on tient à cette francophonie, on veut vraiment que ça aille de l’avant parce que le français c’est un avantage! »

« À partir de ce Forum, je me dis que la francophonie albertaine a de l’espoir », conclut-elle en souriant.

Agrandir l’espace francophone

« La francophonie ce n’est pas une bibitte à part. […] C’est aussi la décolonisation, c’est aussi la maitrise du numérique, notamment de la gouvernance du numérique. […] C’est aussi les questions environnementales », a souligné le conférencier Jean-Louis Roy en conclusion de sa conférence – la première d’une série de six, toutes accessibles en ligne.

Le conférencier Jean-Louis Roy, historien, auteur et diplomate québécois. (Photo : Ericka Muzzo – Francopresse)

Pour Sylvain Lavoie, directeur du CFA, « c’est un peu le rôle du Centre de la francophonie de mettre en mouvement cette francophonie-là : qu’est-ce que je peux faire dans mon quotidien, dans mon vécu pour amener le pas de plus qui va faire en sorte d’agrandir l’espace francophone encore davantage? Qu’on sera encore plus fiers de notre langue, plus fiers de cette appartenance-là à cette grande famille? »

Une réflexion qui résonne chez la marraine de la 6e édition du Forum, l’autrice-compositrice-interprète franco-ontarienne Mélissa Ouimet.

« Je suis super touchée d’être là, d’entendre ce que les gens ont à dire par rapport à leur réalité, à leur francophonie », indique celle dont le rôle est «de les accueillir chez moi et de leur raconter un peu c’est quoi les Franco-Ontariens, c’est quoi notre réalité, mais aussi d’échanger avec eux et de participer avec eux au courant de la semaine ».