La pierre tombale de Louis Riel, située au cimetière de la cathédrale de Saint-Boniface, a été vandalisée. Le 17 octobre, un individu a été aperçu en train de rayer la pierre tombale. Un incident qui intervient alors que la Fédération métisse du Manitoba vient de recevoir 23,1 millions $ pour son centre du patrimoine.

Par Ophélie DOIREAU

Initiative de journalisme local – Réseau.Presse – La Liberté

La Fédération métisse du Manitoba a reçu le 15 octobre, 23,1 millions $ de la part du gouvernement fédéral pour la construction du Centre national du patrimoine métis. Dans la même journée, la pierre tombale de Louis Riel était vandalisée. Si David Dandeneau, métis, ne souhaite pas alimenter de discussions du complot, il reste que pour lui le déroulement des évènements est une drôle de coïncidence. « Selon moi, il est possible qu’il y ait un lien. Les temps sont difficiles et là le gouvernement fédéral annonce 23,1 millions $ pour les Métis.

« C’est regrettable de voir cet incident. Je pense que c’est symptomatique d’un manque de contexte et d’éducation au sujet des Métis et de notre histoire au Manitoba.

« Cet argent, on nous le doit. Lors de l’intégration du Manitoba à la confédération canadienne, grâce à la Loi de 1870 sur le Manitoba, il y avait l’article 31 qui prévoyait une assise territoriale et des pouvoirs pour les Métis de la rivière Rouge, y compris une cession de terres de 1,4 million d’acres aux enfants des Métis.

« Le processus n’avançait pas pour la cession des terres et des personnes en ont profité pour acquérir ces terrains. »

D’ailleurs en 2013, la Cour suprême du Canada avait entendu la cause de la Fédération métisse du Manitoba et avait tranché en leur faveur. La Cour suprême avait déclaré « qu’en ne respectant pas la disposition prévoyant la concession des terres, la Couronne n’avait pas pris de mesures décisives pour respecter son obligation constitutionnelle. » Cette décision a mené, en 2016, à un protocole d’entente entre le Fédéral et la FMM pour favoriser un dialogue en vertu de ce jugement.

David Dandeneau, métis, milite pour une meilleure éducation de l’histoire métisse. (photo : Marta Guerrero)

David Dandeneau reprend : « S’il y avait plus d’éducation sur ce sujet, sur l’histoire de notre province et du rôle des Métis, les gens comprendraient mieux ce qui se joue aujourd’hui entre les Métis et le gouvernement fédéral. Il y a un contexte autour de chaque chose. Il faut juste le connaître. Je pense aux nouveaux arrivants qui n’ont pas toutes ses clés de compréhension. C’est quelque chose qui doit intervenir davantage dans nos écoles. »

Paulette Duguay, présidente de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba déplore le geste porté sur la pierre tombale de Louis Riel. « L’acte est déplorable. C’est un grand manque de respect. Il montre qu’il existe encore des préjugés, des frustrations par rapport aux Métis et par rapport à Louis Riel. »

Elle abonde dans le même sens que David Dandeneau quant à la nécessité d’éduquer davantage le public sur l’histoire des Métis. « On n’en fait pas assez sur l’éducation de l’histoire des Métis. L’une des bonnes choses, c’est le retrait des livres où Louis Riel était alors présenté comme un traitre. Mais le programme d’histoire ne met pas assez l’accent sur notre partie de l’histoire

« L’Union travaille sur des projets éducatifs. On a un cercle d’aînés mis en place avec l’Université de Saint-Boniface, on avance dans la réconciliation.

« Mais la réconciliation commence d’abord par connaître ses propres biais. J’encourage et j’invite les gens à être sensibles et conscients de leurs propres pensées. Après ce travail sur soi, on peut alors être ouvert à l’histoire, à la vérité et à la réconciliation. »

Paulette Duguay est la présidente de l’Union nationale métisse Saint-Joseph du Manitoba. (photo : Marta Guerrero)

En déplacement, Andrew Carrière, vice-président de la région de Winnipeg pour la FMM n’était pas disponible pour une entrevue. L’organisme a fait parvenir la déclaration suivante : « Cette attaque délibérée et ciblée, ainsi que le manque total de respect à l’égard de Louis Riel en tant que chef historique des Métis de la rivière Rouge, fondateur du Manitoba et son premier ministre, sont consternants.

« Ce n’est pas seulement une offense à notre Nation, c’est une insulte à tous les Manitobains, et cela devrait être traité comme tel. C’est d’autant plus grave que cela a été fait quelques jours seulement avant l’anniversaire de la naissance de Louis Riel [ndlr, Louis Riel est né le 22 octobre 1844]. »