Marie, dont le prénom a été modifié pour préserver l’identité de son enfant, a vu son fils âgé de 14 mois être exclu de sa garderie sans motif apparent. Mère et étudiante à la fois, elle se retrouve dans une situation où sa santé mentale est mise à l’épreuve.

Par Ophélie DOIREAU

Initiative de journalisme local – Réseau.Presse – La Liberté

Depuis quelques semaines, la santé mentale de Marie* est en déclin. Cette mère jongle entre études en éducation et la garde de son enfant. En effet, ce dernier a vu sa place en garderie familiale retirée sans réel motif. Marie raconte son histoire. « Avant d’être dans une garderie familiale, il était dans un centre d’apprentissage et de garde pendant cinq mois. Je l’ai inscrit parce que j’ai repris mes études en septembre et j’avais besoin d’un endroit pour le laisser lors de mes cours. Mais je cherchais un meilleur endroit pour lui. En cherchant sur le site du gouvernement du Manitoba, j’ai trouvé cette garderie familiale. Il y avait moins d’enfants et il n’y avait qu’un seul autre bébé.

« Avec mon mari, on a fait une première rencontre qui s’est bien déroulée. Alors on a décidé de l’inscrire dans cette garderie. »

L’enfant de Marie commence donc à fréquenter cette nouvelle garderie le 26 septembre. À peine le premier jour entamé, que Marie reçoit un appel de la personne en charge du lieu qui lui demande de venir le récupérer. « Je dépose mon enfant et 1h30 après l’avoir déposé, la personne m’appelle pour venir le récupérer parce qu’il pleure et qu’il fallait venir le chercher.

| Le choc d’une mère

« J’étais en cours, j’ai dû m’excuser auprès de mes professeurs et partir. » Jusqu’ici Marie est compréhensive, elle sait que c’est le premier jour pour son enfant dans un nouvel environnement et qu’il peut être difficile de s’adapter. « Le deuxième jour, la personne m’appelle au bout d’une heure parce qu’il pleure. À ce moment-là, je lui propose de le laisser que la demi-journée pendant une semaine pour qu’il puisse s’adapter. Elle accepte. Nous nous sommes organisés avec mon mari, son travail et mes études. »

Pourtant, les choses ne s’arrangent pas cette semaine-là, Marie reçoit des messages au bout d’une heure pour venir chercher son enfant. Plus fort encore, la personne en charge de la garderie se montre menaçante envers Marie. « Elle me dit : Lorsque je t’écris pour venir chercher ton enfant, tu dois venir. Sinon je dois appeler Child and Family Services pour leur dire que tu n’es pas venue le chercher. C’était une pression morale vraiment forte.

| Face à l’incompréhension

« Le 4e jour de la semaine, la personne m’écrit vers 13 h en me disant de venir le chercher parce qu’il pleure. Encore une fois je dois m’excuser auprès de mes enseignants. »

Cette fois-ci, à bout et dans une incompréhension, Marie demande à voir le règlement interne de la garderie. « Le 1e jour où nous avons visité, elle a simplement lu le règlement et nul part il ne faisait mention du fait qu’un enfant ne pouvait pas pleurer dans sa garderie. Sinon je n’aurais jamais accepté l’inscription. »

Toujours le même jour, Marie arrive devant la garderie et trouve les affaires de son enfant devant la porte. La personne lui indique qu’elle ne peut plus ramener son enfant dans la garderie et qu’il n’est plus le bienvenu. C’est sous le choc et désemparée que Marie se retrouve dans une situation insoutenable. « Je ne comprenais pas ce qui arrivait. Il n’y a eu aucune aide de sa part pour trouver une autre garderie, aucun préavis. Mon enfant n’avait plus de garderie, juste comme ça. »

Après plusieurs relances, Marie obtient enfin le règlement de la garderie. La Liberté en a également obtenu une copie. Rien n’indique dans le règlement que les enfants peuvent être exclus de la garderie à cause de leurs pleurs. Le règlement fait allusion aux mauvais comportements. « Dans le centre d’apprentissage et de garde où il était avant, mon enfant a aussi pleuré la première semaine. C’est normal. Un nouveau lieu, de nouvelles personnes. Jamais ils ne m’ont appelée pour cette raison. »

Depuis le 4 octobre, Marie n’a pas pu retourner à l’université. Une décision qui pèse sur son moral. « J’ai pensé à arrêter mes études. Mais j’ai pu parler à mes professeurs qui m’ont encouragée à continuer, à prendre le temps qu’il faut. Certains ont essayé de trouver des garderies pour moi. Je peux suivre les cours en visio ce qui n’est pas évident pour eux ni pour moi lorsque je dois m’occuper de mon enfant en même temps.

« Il faut que je trouve un nouvel endroit ou une solution pour garder mon enfant. J’ai un stage obligatoire à effectuer pour mes études, sans ce stage, je ne peux pas valider mon année. »

| Quelles règlementations?

Depuis cette histoire Marie déploie ses efforts pour trouver une place en garderie à Winnipeg pour son bébé. Âgé de 14 mois, il est considéré comme un poupon et les places sont rares pour eux. Dans ses recherches, Marie a trouvé une garderie privée non subventionnée à Winnipeg qui acceptait encore les poupons. Il fallait compter environ 1 920 $ par mois pour la garde. Une somme que ne peuvent pas se permettre Marie et son conjoint.

Sa confiance envers le système a aussi été brisée. La garderie dans laquelle était son enfant se trouvait sur le site de gouvernement du Manitoba. Cette garderie possède une coordonnatrice du gouvernement qui a été mis au courant de la situation. Le gouvernement n’a pas donné suite à notre demande d’entrevue et a fait parvenir une déclaration par écrit. Cette déclaration ne répond pas à nos questions. Après plusieurs relances, la garderie n’a pas donné suite à nos demandes d’entrevue.

La Liberté a posé quelques questions à la Fédération des parents de la francophonie manitobaine pour comprendre les droits d’une garderie familiale. Juliette Chabot, agente de Projet-Centre d’appui à la jeune enfance du Manitoba, explique : « Contrairement aux garderies familiales, les centres d’apprentissage et de garde sont gouvernés par un CA. Dans une garderie familiale, c’est la directrice qui décide de tout. Elle est la propriétaire du lieu. Les familles ne peuvent pas faire grand chose.

« Même si les garderies familiales reçoivent des subventions de la Province, ce sont les directeurs qui sont les propriétaires de leur garderie familiale. Ils font leur règlement et s’ils décident que l’enfant ne correspond pas à l’ambiance alors ils peuvent sortir l’enfant de la garderie familiale. »

*Son prénom a été modifié pour préserver l’anonymat de son enfant mineur.