Cependant, les provinces et les territoires ne seront pas soumis à cet amendement adopté par le Comité permanent des langues officielles. Un coup manqué, selon la Fédération des francophones de la Colombie-Britannique, en bataille judiciaire contre le gouvernement depuis dix ans à ce sujet.

Inès Lombardo

Les provinces et les territoires ne seront pas tenus d’offrir des services dans les deux langues officielles, même si le gouvernement fédéral a versé une contribution financière pour la prestation de ces services.

Selon un nouvel amendement du projet de loi C-13 apporté à l’article 25 sur les services fournis par des tiers, seuls les tiers privés ou les municipalités seront dans l’obligation d’offrir les services dans les deux langues.

Pas de « filet de sécurité » en plus pour les francophones

La Fédération des francophones de la Colombie-Britannique (FFCB) se bat contre le gouvernement fédéral depuis plus de dix ans pour que les provinces et territoires soient soumis à cette obligation de services dans les deux langues officielles lorsque le fédéral leur confie une mission.

« C’est mieux que rien, ce qu’on voulait a été partiellement voté, analyse Emmanuelle Corne Bertrand, directrice générale de la FFCB. Si la tierce partie n’est ni une province ni un territoire, l’obligation de bilinguisme est là. Ça, c’est une bonne nouvelle pour la francophonie du Canada. »

En 2008, Ottawa a transféré les services d’aide à l’emploi à la Colombie-Britannique qui les a ensuite déléguées à des tiers. Mais peu à peu, des centres qui fournissaient ces services à l’emploi en français ont été démantelés par le gouvernement provincial. La FFCB avait alors entamé une poursuite judiciaire contre la province pour dénoncer l’érosion de ces services.

En 2022, la Cour d’appel fédérale a tranché qu’Ottawa n’avait pas respecté ses obligations en déléguant les services à l’emploi à la Colombie-Britannique, contrairement à la décision de la Cour fédérale de 2018.

Zones grises de compétences

Selon Emmanuelle Corne Bertrand, une zone grise demeure sur ce qui relève de la compétence fédérale et ce qui relève de la compétence provinciale.

« Nous avons un appel en Cour suprême exactement sur ce sujet de compétences, alors on aurait aimé qu’ils aillent jusqu’au bout. Ça nous aurait évité [d’aller en] Cour suprême si la loi le réglait », affirme-t-elle.

La Colombie-Britannique n’a pas de politique linguistique. L’amendement comme souhaité par la FFCB aurait ajouté un « filet de sécurité » à la francophonie, estime Emmanuelle Corne-Bertrand.

Mais l’organisme attend que l’étude du projet de loi article par article se termine « pour avoir une vue d’ensemble ». D’autres amendements pourraient changer le cours des choses.

« Dissensions » au comité sur le vote

Le 10 février, le député conservateur Joël Godin a proposé un amendement pour assurer un service dans les deux langues officielles lorsque le gouvernement fédéral faisait appel à des tiers. La néodémocrate Nikki Ashton a par la suite proposé un sous-amendement, qui a été adopté, qui excluait les provinces et les territoires de la catégorie des tiers.

Sans l’intervention du Nouveau Parti démocratique, la FFCB croit que l’amendement originel de n’aurait probablement pas été adopté. « On a compris qu’il y avait des dissensions parmi les membres du Comité sur l’amendement tel qu’on le souhaitait, alors il a fallu faire des compromis pour que l’article 25 soit quand même amendé », explique Emmanuelle Corne-Bertrand. « Le gouvernement sait depuis le début que ce problème est critique pour nous. Ça n’a pas été proposé dans le projet de loi tel quel, il a fallu l’amender. [Le Parti libéral] n’est pas le parti au gouvernement qui a proposé l’amendement ni le sous-amendement! »

Services au voyageur

Suggérée par le Commissariat aux langues officielles, une autre modification a été apportée à l’article 22 vendredi.

Les institutions libérales qui offrent des services aux voyageurs devront faire en sorte que ces derniers puissent communiquer et recevoir des services dans l’une ou l’autre des deux langues officielles, notamment dans les endroits du Canada ou de l’étranger où il y a une forte demande de l’une de ses langues.

L’amendement, déposé par le Parti conservateur, a été adopté par tous les membres sauf les libéraux.