Les conséquences de la pandémie sont multiples, touchent plusieurs domaines et ne sont pas encore toutes connues. Le commerce n’a évidemment pas été épargné.
Dans une étude dévoilée à la fin février 2023, Statistique Canada s’est intéressé aux ventes en ligne alors que le magasinage en personne reprenait presque normalement. L’un des éléments qui ressort de cette étude est que les ventes au détail du commerce électronique sont plus élevées que les niveaux observés avant la pandémie. « De février 2020 à juillet 2022, les ventes au détail du commerce électronique ont augmenté de 67,9 %, et la part des ventes du commerce électronique en proportion des ventes au détail totales a nettement augmenté de 2019 à 2022 (du début de l’année jusqu’en juillet) », peut-on lire dans le document de Statistique Canada.
Changement profond
Ces chiffres suggèrent un changement à long terme à propos des nouvelles habitudes de consommation. Jason Aston, économiste, a travaillé sur ce rapport pendant quatre à cinq mois avec deux autres collègues Salim Zanzana et Jessica Martin. S’il ne peut pas prédire l’avenir, il remarque tout de même, en se basant sur les chiffres avancés, une vraie tendance de fond. « Je crois que oui. Au moins, pour les deux ou trois prochaines années, ce phénomène devrait continuer », estime-t-il.
Jason Aston pense d’ailleurs que les détaillants canadiens sont désormais plus prêts si jamais d’autres problèmes de santé publique devaient arriver. Il remarque notamment que les commerçants ont beaucoup développé leurs plateformes en ligne. « S’il y a de nouvelles restrictions pour n’importe quelle raison, les commerçants veulent pouvoir réagir. Leurs commerces, leurs publications et ventes sont maintenant dirigés vers leurs sites web. Pour ces raisons, on peut s’attendre à de plus en plus de ventes en ligne. »
S’adapter pour rester attractif
C’est le cas notamment de Pierrette Sherwood pour sa boutique d’art, Papillon Créations. La fondatrice transforme notamment de la ferraille ou du matériel récupéré pour en faire des créations artistiques pour la maison et le jardin.
Celle qui a gagné la Fosse aux lions en 2012 avait déjà prévu à cette époque de développer son site web. Une idée qui lui a réussi quelques années plus tard quand les restrictions sanitaires ont drastiquement réduit les ventes en personne. « Je me sens assez choyée. Avec ma présence en ligne, j’ai pu faire le pivot assez rapidement pour m’adapter à la COVID-19. On a vu un peu de recul depuis bien sûr, mais au pic de la pandémie, ça a été remarquable. J’ai triplé mes revenus grâce à ma présence en ligne. Je ne m’y attendais pas. Je voyais cette tendance et puis les gens étaient aussi plus conscients de favoriser l’achat local », décrit Pierrette Sherwood qui souligne que présentement la part de ses ventes en ligne représente encore environ 40 % de ses ventes globales.
La créatrice a aussi remarqué à la suite de ces périodes que les consommateurs ont été heureux de retrouver le contact en personne, mais cherchent désormais « un service à la clientèle plus personnalisé ».
D’ailleurs, le secteur de Pierrette Sherwood, à savoir les matériaux de construction et le matériel et fournitures de jardinage, a été étudié par Statistique Canada. « Les ventes au détail du commerce électronique de ce sous-secteur ont atteint un sommet au
premier trimestre de 2021 » explique cette étude. Par exemple, quand 100 ventes étaient réalisées en personne à cette période, 700 se faisaient en ligne.
Les avantages en ligne
D’autres sous-secteurs ont connu une hausse importante des ventes en ligne entre le début de la pandémie et le premier semestre 2022. C’est le cas des magasins de vêtements et d’accessoires vestimentaires. 10,7 % des ventes se faisaient en ligne en 2019. Ce chiffre a pratiquement doublé en 2022 pour atteindre 19 %. Les articles de sport ont aussi connu le même phénomène. 11,1 % des ventes se passaient en ligne en 2019. Ce chiffre atteignait 20,9 % en 2021.
Les disponibilités d’heures d’ouverture, la facilité de l’achat ou encore la possibilité de comparaisons entre les prix sont autant d’arguments pour la vente en ligne selon Jason Aston. Le statisticien explique en revanche que la vente en personne ne va pas totalement disparaître. « Les consommateurs aiment toujours avoir l’expérience en présentiel. Ils peuvent toucher le produit, parler aux vendeurs et avoir une relation plus interactive. À l’époque, ni les Canadiens ni les commerçants n’avaient vraiment le choix à cause de la pandémie. Mais aujourd’hui, il n’y a plus vraiment de frontière. Consommateurs et détaillants aiment mélanger les méthodes.»