Inès Lombardo
La ministre fédérale des Langues officielles a assuré son émotion, au lendemain de l’adoption de la Loi sur les langues officielles, qui était encore le projet de loi C-13 jusqu’à jeudi soir.
« Le travail continue! » a-t-elle lancé en mêlée de presse. L’application de cette loi va prendre deux ans, avec les règlements. Le travail devrait commencer dès l’obtention de la sanction royale, en début de semaine prochaine, selon les dires de la ministre. Les francophones en situation minoritaires auront attendu huit ans en tout et pour tout pour voir cette loi complète.
Des priorités dans l’application de la Loi
Pressée par les questions des journalistes vendredi matin, elle a néanmoins assuré que des priorités se dessineront sur ces deux années d’application de la Loi : « L’immigration francophone est une priorité absolue [ainsi que] la définition des mesures positives. »
Elle a ensuite simplement listé de nouveau les outils renforcés que la loi donne au commissaire aux langues officielles pour serrer la vis aux institutions qui ne respectent pas la loi.
Avec cette loi, les francophones en situation minoritaire pourront désormais travailler et se faire servir en français au sein des entreprises privées de compétence fédérale, dans les régions à forte présence francophone.
Flou sur les règlements à venir
Ces régions n’ont pas encore été définies par la loi, elles devraient l’être dans les règlements, ces deux prochaines années. Mais la ministre n’a pas été en mesure de les identifier exactement ni de fixer une échéance.
Ginette Petitpas Taylora seulement précisé que chaque règlement se fera étape par étape. « Aussitôt que les règlements vont être développés, ils entreront en vigueur », a assuré la ministre.
Le règlement sert à préciser des parties de la loi. « On va faire des consultations et on pourra partager le plan dans les plus brefs délais », a-t-elle conclu.
Pour la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA), le fait que la ministre ne fixe pas de priorités dans l’ordre des règlements à venir n’est pas inquiétant : « C’est la machine gouvernementale habituelle », défend Liane Roy, présidente de l’organisme, qui salue l’adoption de la loi comme un moment « historique ».
Pour cette dernière, la priorité dans l’application de la loi reste les mesures positives. « On veut voir des consultations avec les communautés quand il y aura des transferts provinciaux et territoriaux ». Liane Roy ne sait toutefois pas « quelle partie de la loi sera développée en règlement ».
« La loi ouvre la porte » à une contestation
Dans la foulée de l’adoption du projet de loi C-13 jeudi, le Quebec Community Groups Network (QCGN), organisme qui représente la minorité anglophone du Québec, a confirmé sa « déception » et assuré que « la loi ouvre la porte » à une éventuelle contestation en justice, en tout dernier recours toutefois.
« Tout va dépendre de comment la loi est appliquée », nuance la présidente de QCGN, Eva Ludig, qui dit que l’organisme restera vigilant à l’application de la loi. « C’est ça qui va avoir un impact sur nos communautés. »
Interrogée en mêlée de presse sur la question, la ministre Petitpas Taylor ne craint pas que QCGN porte l’affaire en justice : « C’est leur choix. Je l’ai dit à maintes reprises, le projet de loi n’enlève aucun droit aux anglophones du Québec. Et la partie VII de la Loi leur donne beaucoup de gains. »
Concrètement, le travail qui commence pour QCGN est une « vigie », affirme encore Eva Ludig. Cette dernière se fera par exemple sur les points de services bilingues, pour éviter que les anglophones du Québec n’en perdent, et sur la manière dont ils vont recevoir l’appui financier du gouvernement fédéral.
« Est-ce nous qui allons continuer à identifier nos besoins ou est-ce que ça va être le gouvernement provincial qui va communiquer nos besoins au fédéral? » s’interroge la présidente.
QCGN a tenté de se faire entendre à plusieurs reprises pour modifier la Loi sur les langues officielles modernisée, pour supprimer les trois références à la Charte de la langue française, appuyé par le député Anthony Housefather et les sénateurs Loffreda et Seidman. En vain.