Ils étaient des centaines le 13 juillet à La Fourche sous la scène CN à scander le même slogan : « Who matters? We matter! » (Qui est important? Nous le sommes!)

En effet, toutes les personnes présentes étaient là pour se faire entendre, alors que les élections s’en viennent bientôt.

Un message partagé par Maria Fernanda Arentsen. Son frère Pablo a une trisomie 21 et vit à l’institution St.Amant. Pour la chroniqueuse de La Liberté et professeure titulaire à l’Université de Saint-Boniface, experte dans les sujets d’exclusion, particulièrement personnes en situation de handicap, ce rendez-vous était essentiel. « C’est très important de se rendre visible et que tout le monde sache que nous sommes là et que nous faisons partie de la société », résume-t-elle.

Le DMVote rappelle également que plus de 234 000 Manitobains âgés de plus de 15 ans vivent avec un handicap. Cette occasion permet donc de sensibiliser le public. C’est aussi un bon moyen de dire les types de handicap sont larges et comprennent, sans s’y limiter, les handicaps physiques, mentaux, d’apprentissage, visuels, auditifs, intellectuels/développementaux et liés à la douleur. Les besoins sont donc divers et Maria Fernanda Arentsen souligne que tout le monde, à un moment de sa vie, peut être en situation de handicap. « Nous avons des besoins qui ne sont pas les mêmes que tout le monde, mais ce sont des besoins très humains. »

En matière de besoins, il y a justement plusieurs défis auxquels sont confrontées les personnes en situation de handicap, mais aussi le personnel aidant. « Le salaire des personnes aidantes est trop bas. Il y a peu de rétention du personnel à cause de ça. Et d’ailleurs, sur cette question c’est dur pour les anglophones et encore pire pour les francophones. Il y a eu aussi de graves problèmes d’abus. Le message que ça envoie aux personnes en situation de handicap c’est : investir en vous, ça ne vaut pas la peine. Et ça, c’est terrible en tant que société », appuie Maria Fernanda Arentsen.

Disability Matters Vote
La campagne Disability Matters Vote s’est lancée depuis La Fourche le 13 juillet. Des centaines de personnes étaient venues pour faire valoir leurs droits. (photo : Raphaël Boutroy)

Sujet politique

À l’occasion de cet évènement, plusieurs partis politiques ont justement été interpellés pour aider à trouver des solutions. Wab Kinew, chef du Nouveau parti démocratique du Manitoba, était présent. L’homme politique a souhaité montrer son appui sur ce sujet. « Tout être humain a une valeur. Le DMVote fait des demandes très claires. Je pense à la question de la recherche du travail ou encore d’avoir simplement la capacité de vivre une vie avec respect. »

Sujet aussi essentiel pour Dougald Lamont, chef du Parti libéral du Manitoba. Comme son homologue néo-démocrate, Dougald Lamont évoque le terme de « valeur ». « Depuis que je suis un élu, les réunions que j’ai avec des personnes en situation de handicap et leurs familles sont parmi les plus émouvantes. Ils ont tellement besoin d’aide. Ça me fait dire que c’est une communauté qui a trop longtemps été ignorée par le gouvernement du Manitoba depuis au moins deux décennies. »

Au rang des solutions, le chef du Parti libéral évoque la modernisation du bien-être social des personnes en situation de handicap et appuie aussi pour une hausse des salaires du personnel aidant.

Wab Kinew a, de son côté, aussi mis en avant le sujet des infrastructures, trop souvent impraticables. Selon lui, c’est une question financière, mais aussi de volonté politique. « C’est également une question qu’on doit avoir avec le monde des affaires. On doit regarder comment ils peuvent investir dans leurs édifices et milieux pour inclure tout le monde dans la communauté. »

À ce sujet, Dougald Lamont souhaite lui instaurer des normes universelles. « Elles seraient appliquées dans tout notre environnement bâti. Ça pourrait réduire les obstacles dans les rues et les escaliers. Il faudrait y penser dès la construction de nouveaux bâtiments. Et il faut se rendre compte que l’accès universel améliore la qualité de vie pour tout le monde au Manitoba. »

« Nous vivons dans une société nécessairement capacitiste, qui discrimine selon la capacité des personnes. Et je dis nécessairement, car c’est une société qui a des valeurs fondées sur la production et le travail. Mais en tant qu’être humain, on est tellement plus riches que ça. »

Maria Fernanda Arentsen

La ministre responsable de l’Accessibilité, Rochelle Squires, était aussi présente sur scène pour défendre cette cause.

Dans une déclaration, la ministre a elle tenu à souligner les avancées « significatives » du gouvernement ces dernières années. « Notre gouvernement reconnaît le rôle important que le personnel de soutien aux personnes en situation de handicap joue dans la vie des Manitobains et Manitobaines. » D’ailleurs, en mars 2023, dans le cadre du budget, 104 millions $ ont été annoncés pour soutenir les services aux personnes en situation de handicap et augmenter les salaires du personnel qui les fournit.

Rochelle Squires a aussi rappelé la création en 2021 du Fonds manitobain pour l’accessibilité. Il « a été créé pour fournir aux organisations des subventions destinées à améliorer l’accessibilité de leurs services et pour mettre en place le Secrétariat de la conformité à l’accessibilité », explique la ministre.

Sensibilisation

Si la présence des hommes et femmes politiques de tous bords a rassuré Maria Fernanda Arentsen, il demeure que le chemin est encore très long. Les préjugés sont tenaces malgré la sensibilisation des organismes. « Nous vivons dans une société nécessairement capacitiste, qui discrimine selon la capacité des personnes. Et je dis nécessairement, car c’est une société qui a des valeurs fondées sur la production et le travail. Mais en tant qu’être humain, on est tellement plus riches que ça. »

Selon Dougald Lamont, c’est simplement l’action qui fera la différence. « Il est important de montrer les gens et à un certain point tout le monde aura de la difficulté. Il faut reconnaître qu’il n’y a aucune différence entre humains. On peut toujours parler, il faut démontrer les choses. On peut avoir du succès, beaucoup de gens en situation de handicap veulent contribuer. Mais il reste plusieurs obstacles à éliminer.