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Au Manitoba, soleil, pluies et orages se disputent le devant de la scène pendant la saison estivale. De toute évidence, étant la province la plus ensoleillée du Canada, lorsqu’il s’agit de précipitations, le Manitoba n’est pas à plaindre. Toujours est-il qu’il y pleut quand même, parfois en abondance. Et ces averses, lorsqu’elles tombent sur des villes comme Winnipeg, peuvent avoir un effet négatif sur l’écosystème, en particulier sur les cours d’eau.

Le phénomène de surverse, est un phénomène qui apparaît souvent dans le sillage de fortes précipitations ou encore lors de la fonte des neiges. Braedon Humeniuk, boursier Vanier, et doctorant à l’Université du Manitoba, est écotoxicologue. Il explique que le phénomène de surverse est un phénomène qui se produit dans la majorité des grandes villes. « Lorsqu’un large afflux d’eau se déverse dans les réseaux d’égouts et canaux de drainage de nos villes, si ces canaux sont déjà complètement remplis d’eau, toutes les eaux usées remontent en surface. Elles sont alors déversées avant d’avoir atteint la station d’épuration. » Ainsi, ces eaux non traitées se retrouvent dans les rivières, les ruisseaux et les nappes phréatiques. En toute logique, cela affecte l’écosystème et tous les êtres vivants qui y vivent, les êtres humains compris.

Contaminants

Parmi les agents polluants qui se trouvent dans ce qui est aussi appelés les effluents d’eau, il y a bien sûr les matières organiques en décomposition, qui vont parfois consommer l’oxygène contenu dans l’eau et provoquer la mort des poissons ou d’autres organismes vivants. Mercure, plomb, produits pharmaceutiques, bactéries, virus, ou encore, du chlorure, la liste des contaminants est longue. Il en est qu’il est possible de trouver en quantité élevée : les éléments nutritifs comme le phosphore, dont les effets sont bien connus de Braedon Humeniuk.

« Nous savons que le phosphore est la principale cause d’eutrophisation, à l’origine de la prolifération d’algues qui est déjà un sérieux problème dans le lac Winnipeg. » La prolifération d’algues peut avoir des conséquences désastreuses sur les écosystèmes aquatiques. Les plantes en surface bloquent les rayons du soleil et réduisent ainsi le niveau d’oxygène dans l’eau. Les plantes situées plus en profondeur sont alors incapables d’exercer la photosynthèse essentielle à leur survie. En mourant, elles créent des zones mortes dans lesquelles l’oxygène n’est plus filtré. La survie de tous les autres organismes est alors sur la corde raide.

L’écotoxicologue précise que « le phosphore est un élément chimique que l’on trouve en abondance. On le trouve dans les engrais ou encore dans certains shampooings. » À noter que l’azote et l’ammoniac par exemple ont des effets similaires sur les corps d’eau.

« Les zones humides sont capables d’assimiler d’énormes quantités d’eau. Il est donc possible de réduire les excès d’eau en créant des zones humides où en aidant à préserver celles déjà existantes dans et autour des villes. »

Braedon Humeniuk

Des solutions

Plusieurs pistes de solutions existent pour limiter les surverses et les débordements d’eaux usées. Le doctorant rappelle d’ailleurs que le Manitoba est naturellement équipé pour le faire. « Les zones humides sont capables d’assimiler d’énormes quantités d’eau. Il est donc possible de réduire les excès d’eau en créant des zones humides où en aidant à préserver celles déjà existantes dans et autour des villes. » De plus, de meilleures infrastructures et systèmes d’égouts peuvent aussi peser dans la balance.

À ce propos justement, la Ville de Winnipeg n’est pas la dernière de la classe. En 2022, la Ville enregistrait 23 épisodes de fortes précipitations, donnant une moyenne annuelle de 66 cm d’eau de pluie. Cette année- là, les surverses ont atteint un volume estimé de 27 litres. Ces données-là dépendent bien sûr de facteurs aléatoires, notam-ment de l’intensité des précipitations. À titre de comparaison, en 2021, 37 cm d’eau pluviale étaient enregistrés. 10 litres d’eaux ont alors débordé des systèmes d’égouts.

Lisa Marquardson, en charge de la communication pour le service des eaux et des déchets de la Ville, explique que cette dernière travaille à la réduction des débordements de ses systèmes d’égouts : « Ce travail comprend une amélioration des infrastructures telles que la séparation des égouts, le stockage latent, la mise à niveau des chambres de déversement et l’installation d’instruments de surveillance des déversements. »

Récupération d’eau de pluie

Pour le moment, comme pour la plupart des villes d’Amérique du Nord, Winnipeg possède un système d’égouts combinés, conçu pour transporter à la fois les eaux de drainages du sol (pluie et neige) et les eaux usées vers les stations d’épurations.

La séparation des égouts consiste à diviser le système combiné actuel en deux réseaux distincts. L’un pour les eaux pluviales et l’autre pour les eaux usées. Elle permettrait donc d’éviter que l’eau de pluie ne se mélange aux eaux domestiques et industrielles, prévenant ainsi un potentiel débordement. Le stockage latent quant à lui, consiste en la création de réservoirs ou de bassins souterrains pour accueillir l’excédent d’eaux pluviales pour alléger la pression sur les réseaux.

Sans préciser une date de fin à ces travaux, Lisa Marquardson fait état d’un programme à « long terme ».

Il est également possible d’aider à réduire davantage les risques de surverses à son petit niveau. Pour cela, la page web du département des eaux et des déchets de la Ville de Winnipeg propose une liste exhaustive. Cette dernière encourage l’utilisation de tonneaux de récupération d’eau de pluie, qui peut être utilisée plus tard pour entretenir son jardin. La plantation de végétation est elle aussi, recommandée, ainsi que l’utilisation de pavés plutôt que du béton qui empêche le drainage naturel du sol.