Inès Lombardo
Francopresse : Le Canada compte environ un million de francophones établis à l’extérieur du Québec. Plusieurs d’entre eux ont des préoccupations quant aux places en garderie et l’accès aux soins de santé en français, l’accès à la justice… Quelle est votre stratégie pour les rejoindre et apaiser leurs inquiétudes?
Mais les francophones sont touchés aussi par l’inflation! J’en ai rencontré dans le Nord de l’Ontario, à Kapuskasing, à Sudbury, à Sault-Sainte-Marie et ailleurs. Et ils m’ont dit que la vie coute trop cher. Ils ne peuvent plus payer leurs factures.
Les grandes promesses électorales de Justin Trudeau ne se sont pas produites. Il y a de gros retards, il n’y a pas de place pour les garderies en français [à l’extérieur du Québec, NDLR], il n’y a pas de justice en français…
Il faut un gouvernement conservateur qui peut livrer des prix plus bas, des chèques de paie plus forts et des services dans les deux langues officielles. Et c’est exactement ce que je vais ramener pour les Franco-Canadiens.
Pendant le processus de modernisation de la Loi sur les langues officielles, il y a eu des divisions entre les communautés de langue officielle en situation minoritaire et entre les francophonies canadiennes. Maintenant que la Loi est adoptée, croyez-vous qu’elles puissent s’entendre, malgré leurs différences linguistiques, culturelles et historiques?
Je pense que oui. Malheureusement, le gouvernement Trudeau a essayé de diviser les francophones pour tenter de gagner un avantage politique.
Nous, les conservateurs, nous voulons unir tous les francophones pour préserver la langue française. C’est la raison pour laquelle notre équipe sur le Comité des langues officielles, menée par Joël Godin, a essayé de rendre C-13 plus fort pour protéger les droits linguistiques des minorités.
On était un peu déçu que le gouvernement n’ait pas été plus efficace pour protéger le français, mais nous allons continuer à nous battre pour le protéger.
Et pour moi, c’est une lutte personnelle, parce que mon père a des origines canadiennes-françaises de la Saskatchewan, il vient d’un village fransaskois. Il a essayé de me transmettre une connaissance de la langue française.
Malheureusement, je l’ai perdue un peu pendant mon adolescence à Calgary, où c’est difficile de pratiquer, car il n’y en a pas tant l’occasion. C’est pour ça que mon français n’est pas parfait. Mais ma femme est montréalaise et mes enfants vont à la garderie française. Donc on va continuer de se battre pour cette langue, dans nos vies personnelles comme dans nos vies publiques.
Votre parti l’a dit en comité des langues officielles : l’immigration est l’une des clés qui permettraient de préserver les communautés francophones au Canada. Mais au début du mois, vous disiez que le plan du gouvernement Trudeau d’accueillir 500 000 immigrants par an était motivé par une « idéologie ». Si vous devenez premier ministre, est-ce que vous baisseriez ces seuils d’immigration?
Les chiffres seront déterminés par la disponibilité de logements, de services de santé et d’emplois. C’est comme ça qu’on va s’assurer que chaque immigrant a l’occasion de réussir au Canada.
Tout d’abord, il faut accélérer la construction des maisons. Ça prend trop longtemps pour obtenir des permis de construction. Cette année, on a bâti moins de maisons qu’on en a bâti en 1972, il y a 50 ans, alors que la population canadienne était moitié moins nombreuse qu’elle ne l’est aujourd’hui.
Le gouvernement Poilievre insiste pour que les grandes municipalités augmentent le nombre de permis de construire de 15 % par année ou ils perdront leurs subventions pour l’infrastructure. On va donner de grands bonus pour les municipalités qui réussissent à augmenter les permis de construire de plus de 15 %.
Je vais aussi mettre en place un sceau rouge ; un test qui permettra aux immigrants de montrer leurs capacités dans les professions comme infirmières et médecins, afin qu’ils puissent travailler pour soigner notre population.
Toujours sur la question de l’immigration, le gouvernement actuel a atteint la cible de 4,4 % d’immigration francophone hors Québec l’an dernier. Selon vous, quelle serait la cible idéale pour augmenter la proportion de francophones à l’extérieur du Québec?
Il faut l’augmenter. On va encourager ces immigrants à vivre dans les communautés francophones à travers le pays, ce qui va permettre de préserver ces populations. Malheureusement, le gouvernement Trudeau n’a pas réussi à faire cela, malgré leurs promesses.
Le gouvernement actuel a tout de même atteint la cible, avec des années de retard. Pour compenser le manque à gagner, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) a suggéré une cible progressive à 12 % d’ici 2024. Est-ce que ça vous parait trop?
Non. Mais avant de me consacrer à un chiffre, je dois d’abord m’assurer que je peux l’atteindre! On a vu un gouvernement qui crée toutes sortes de promesses, qui sont très belles dans leurs intentions, mais il faut pouvoir le faire! Je ne veux pas être un autre politicien qui dit n’importe quoi pour être élu, mais qui ne livre pas la marchandise.
Donc je vais étudier les cibles et promettre celles qu’il sera possible d’atteindre. Mais je peux vous assurer que l’une de mes priorités sur la question de l’immigration, c’est davantage de francophones.
Depuis quelques semaines, Meta a coupé l’accès aux nouvelles canadiennes pour protester contre la Loi sur les nouvelles en ligne. En 2005, le gouvernement conservateur a amputé la publicité fédérale dans les médias et a investi auprès des géants du Web. Dans l’éventualité d’un prochain gouvernement conservateur, comment comptez-vous rétablir la situation?
Avez-vous reçu votre chèque de Meta ou Google? Je ne connais aucun média pour qui c’est le cas. Les médias perdent leur accès aux réseaux sociaux. Ces lois sur internet favorisent encore les grandes entreprises médiatiques.
Bell, Rogers, Québecor vont pouvoir engager des lobbyistes pour s’assurer que leur contenu soit poussé sur internet. Les petits groupes médiatiques seront effacés.
Je suis pour la liberté d’expression qui permettrait à toutes les sources d’information de travailler fort afin de bâtir leurs auditoires sur internet, sans censure du gouvernement et sans le contrôle du CRTC qui favorise les grandes entreprises.
Les propos ont été réorganisés pour des raisons de longueur et de clarté.