Marianne Dépelteau – Francopresse
Le ministère des Langues officielles était le portefeuille principal de Ginette Petitpas Taylor, dont le mandat a mené à la modernisation de la Loi sur les langues officielles.
Lors du remaniement de juillet, le ministère des Langues officielles a été confié au Franco-Albertain Randy Boissonnault, en supplément de celui de l’Emploi et du Développement de la main-d’œuvre.
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Frédéric Boily, professeur de science politique au Campus Saint-Jean en Alberta, est d’avis que « nommer Randy Boissonnault pour s’occuper des langues officielles, ça reste une bonne idée de la part du Premier ministre ».
Selon lui, « on a quelqu’un qui connait très bien la francophonie de l’Ouest canadien […] les enjeux particuliers de cette francophonie qui ne sont pas les mêmes que les autres ».
Frédéric Boily ne voit pas le mariage des portefeuilles comme une rétrogradation : « Je pense plutôt qu’il y a une volonté de lier les dossiers. »
Une tête, trois chapeaux
Le professeur se doute bien que les langues officielles pourraient bien être reléguées à l’arrière-plan. « Mais cette possibilité ne se matérialisera pas automatiquement, nuance-t-il. Ça va dépendre du doigté de Randy Boissonnault. »
François Charbonneau, professeur d’études politiques à l’Université d’Ottawa, partage cet avis.
« C’est difficile d’imaginer que ça va changer quoi que ce soit dans la livraison des services, estime-t-il. Il faut quand même garder en tête que, quand un ministre partage plusieurs responsabilités, ses capacités d’attention et de pousser les dossiers peuvent être limitées. »
Frédéric Boily voit un troisième chapeau que devra porter Randy Boissonnault : celui de porte-parole de l’Alberta, un rôle qui pourrait être exigeant vu les objectifs libéraux de transition énergétique et qui pourrait aisément avoir des points communs avec le dossier de la main-d’œuvre.
« Il peut y avoir quand même un effet d’une certaine subordination de ses responsabilités en matière de Langues officielles, prévient le professeur. C’est clair que ça va poser un défi pour lui. Il devra trouver une manière de lier les dossiers. »
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Des dossiers congruents
Les responsabilités d’un ministère ne doivent pas forcément nuire à celles de l’autre. D’après Frédéric Boily, « les questions de l’emploi et de la main-d’œuvre peuvent être liées aux langues officielles ».
Liane Roy, présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), compte « donner la chance au coureur ». « Madame Petitpas Taylor avait aussi [la responsabilité de] l’Agence de promotion économique du Canada atlantique », fait-elle remarquer.
La pénurie de main-d’œuvre est une question importante pour la FCFA. « Étant donné la conjoncture actuelle […], ce sont des dossiers que nous trouvons qui se marient bien, affirme Liane Roy. Ça pourrait possiblement venir nous aider qu’il ait ces dossiers-là. »
François Charbonneau fait remarquer que les ministères collaborent constamment entre eux et qu’il incombe à tous de tenir compte des langues officielles. « Il faut bien séparer ce qui relève de la dynamique interne du gouvernement fédéral […] des sommes d’argent transférées. »
« En matière de langues officielles, une partie de ce qu’on fait au gouvernement fédéral, c’est transférer de l’argent aux provinces, dit-il. Que ça passe par un ministère ou un autre, c’est essentiellement les mêmes fonctionnaires avec les mêmes enveloppes. L’argent va continuer d’aller aux provinces. »
Ce qui peut changer en fonction des personnes au pouvoir, c’est l’utilisation du français à l’interne, un sujet qui fait encore du bruit.
« C’est un secret de Polichinelle, mais au gouvernement fédéral, ça se passe en anglais, assure François Charbonneau. La volonté de transformer l’appareil fédéral pour atteindre ce qu’on a appelé l’égalité réelle se réalise. C’est très difficile à faire si vous êtes un sous-ministère. »
Qui prendra le flambeau?
« La question, c’est qui porte le flambeau à l’interne. Qui fait faire des progrès ou des gains? »
François Charbonneau accorde moins d’importance à l’annexe des langues officielles à un autre portefeuille qu’aux gens au pouvoir. Mona Fortier, qui a été destituée de ses fonctions ministérielles, était à ses yeux une porteuse du flambeau francophone.
« Pour les principaux conseillers qui entourent le premier ministre, qui sont souvent des gens de Toronto et ainsi de suite, la position des langues officielles dans leur échelle de priorités est limitée. »
La composition du ministère revêt aussi une grande importance pour la présidente de la FCFA : « On a travaillé de près avec [Marie-France] Lalonde, avec [Marc] Serré, Francis Drouin, mais là on a hâte de voir s’ils vont changer et qui ça va être. »
Elle insiste pour préciser « qu’il y a les ministres, mais il y a aussi les staffers et les secrétaires parlementaires […] On va voir aussi ce qu’il y a dans les lettres de mandat ».
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Randy Boissonnault a représenté la circonscription d’Edmonton-Centre, en Alberta, de 2015 à 2019, puis a été de nouveau élu en 2021. Il a été ministre associé des Finances et ministre du Tourisme.
En tant que secrétaire parlementaire de la ministre du Patrimoine canadien (Mélanie Joly) en 2015, il a participé à l’élaboration du plan d’action pour les langues officielles de 2018.
Dix ans auparavant, il a présidé le comité d’organisation des Jeux de la francophonie canadienne à Edmonton.