Par Michel Durand-Wood.
Donc, en ce tout début de processus budgétaire, parlons d’un point qui crée une confusion commune.
D’une certaine façon, on peut considérer que « le budget », c’est vraiment deux budgets : il y a le budget opérationnel et le budget en capital. Il y a quelques années, un conseiller municipal m’avait indiqué que l’un n’avait rien à voir avec l’autre. C’est complètement faux.
Pour les non-comptables, comme nous le sommes presque tous, le budget opérationnel est assez intuitif. Il contient les revenus de l’année (impôts fonciers, frais de permis, etc.), et les dépenses de l’année (salaires, électricité, essence, etc.). Lorsqu’il n’y a ni surplus, ni manque à gagner, on qualifie cela de « budget équilibré ». Il peut rester un excédent, un surplus, mais les manques à gagner ne sont pas permis sous la loi provinciale.
Le budget en capital est peut-être moins facile à comprendre. En effet, on y trouve les dépenses avec une valeur durable, comme la construction ou réfection des routes, l’achat de camions d’incendie, ou la rénovation de bâtiments civiques. Bref, tout ce qui va durer plus longtemps que l’année en cours, qu’on appelle de façon générale « infrastructure ».
Mais si les revenus sont comptés dans le budget opérationnel, d’où proviennent les fonds pour le budget en capital? De deux endroits : des réserves et des emprunts.
Les réserves sont les surplus opérationnels accumulés dans le passé, ou plus simplement, l’argent collecté dans le passé mais pas dépensé.
On peut aussi se tourner vers les emprunts, la dette, pour financer notre budget en capital. Mais lorsqu’on emprunte de l’argent aujourd’hui, il y a une obligation de le repayer en petites portions d’année en année dans l’avenir, jusqu’à ce que la dette soit remboursée. Ces paiements de remboursement proviendront des surplus opérationnels dans l’avenir, ou plus simplement, l’argent qu’on collectera à l’avenir mais qu’on ne dépensera pas.
Donc, les dollars en capital d’aujourd’hui proviennent soit des surplus opérationnels d’hier (réserves) ou des surplus opérationnels de demain (dette).
Le lien entre le budget opérationnel et le budget en capital est alors très clair : les dollars en capital ne sont que des dollars opérationnels tirés d’une autre année.
Lorsqu’on emprunte pour financer notre infrastructure, c’est essentiellement une promesse de couper des services, ou d’augmenter les impôts, dans les budgets opérationnels futurs.
Et cela même avant de considérer que toute infrastructure engendre ses propres dépenses opérationnelles : les routes auront besoin de déneigement, les camions d’incendie d’essence et de conducteurs, les bâtiments civiques devront être chauffés. De plus, toute infrastructure aura besoin de maintien et finalement d’être remplacée, nécessitant d’autres dollars en capital, qui, comme on le sait maintenant, ne sont que des dollars opérationnels aussi.
Ce chemin de financement est le cas pour toute infrastructure.
Il est vrai que les investissements en infrastructure ont la possibilité de générer plus de revenus qu’ils engendrent en dépenses, c’est pour cela qu’on les appelle des « investissements ». Mais comme tout investissement dans la vie, il y en a qui sont gagnants, et d’autres qui sont perdants.
Compte tenu de la situation financière actuelle de la Ville, où il e st impossible de payer le maintien de tout ce qu’on a construit, encore moins des services additionnels, il est clair que les investissements du passé ont été perdants.
Ce ne sera pas en misant sur les mêmes investissements du passé, comme encore d’autres expansions routières, qu’on obtiendra de meilleurs résultats. Il est temps qu’on regarde à de différents investissements.