Natif de la région de l’Estrie au Québec, Jérémie Roberge a grandi dans un village moitié anglophone, moitié francophone. « Mon village était un vrai témoin des langues officielles, confie-t-il. J’avais des amis anglophones. Très jeune, j’ai eu un intérêt pour la francophonie en situation minoritaire. »

Il a obtenu un baccalauréat et une maîtrise en science politique à l’Université de Sherbrooke. « Mon cursus était orienté vers les relations et le développement international, dont la question du rôle des organismes comme leviers de développement communautaire. C’est ce qui m’a amené au secteur de la santé et des services sociaux, par le biais d’un emploi dans la fonction publique québécoise », révèle-t-il.

Toujours au Québec, il travaille ensuite comme coordonnateur d’un centre de recherche équivalent aux Offices régionaux de la santé du Manitoba, de 2011 à 2017, où il développe une expertise en mobilisation de connaissances.

« Mon rôle était de faciliter la liaison entre la recherche et le milieu, et donc de créer des données de vulgarisation utiles pour la pratique. J’amenais la recherche sur le terrain, et vice versa. »

Dans le réseau 

C’est finalement en 2017 qu’il entre dans le réseau de la Société Santé en français. « Le bureau national à Ottawa avait besoin d’un expert en mobilisation de connaissances. La Société Santé en français collabore avec les communautés en situation minoritaire pour étudier les pratiques innovantes à travers le Canada et faciliter leur partage aux autres communautés francophones minoritaires au Canada.

« Avec cet emploi, j’ai pu en apprendre davantage sur le réseau de la Société Santé en français, mais aussi sur les différentes communautés de langue officielle en situation minoritaire (CLOSM) à travers le Canada. J’ai alors réalisé que j’étais vraiment comme un poisson dans l’eau dans ce milieu! 

« Ce que j’aime beaucoup de Santé en français, c’est que c’est un modèle de développement des communautés. On crée des contextes de codéveloppement, de cocréation, entre les institutions professionnelles et locales et les communautés. On amène tous les acteurs à travailler ensemble pour le bien des gens et les communautés. C’est vraiment un gain pour nos communautés et pour toute la francophonie. »

Expériences en francophonie minoritaire

Passionné, Jérémie Roberge n’a plus voulu s’arrêter là. En 2019, il a donc pris la direction générale du Réseau de santé en français au Nunavut (Résefan), à Iqaluit. « Je voulais aller sur le terrain, vivre dans une communauté francophone minoritaire. Mon expérience à Iqaluit est allée bien au-delà de la santé. »

Entre autres, il a pu contribuer au mouvement d’émancipation de l’inuktitut.

« Une très grande proportion du territoire parle cette langue. Au Résafan, on a donc mis sur pied un service d’interprétation par téléphone 24 heures /24 en français et inuktitut. »

Parmi ses autres réalisations à la barre du Résafan, notons l’embauche du premier interprète francophone à l’Hôpital général de Qikiqtani à Iqualuit, ainsi que la création d’une collaboration avec une firme québécoise de services en santé mentale et médico-sociaux « pour pouvoir offrir un service en français à ceux et celles qui en avaient besoin ».

Jérémie Roberge a finalement quitté le Résafan d’Iqaluit en 2022, mais pas le réseau de la Société Santé en français. Il s’est en effet installé à Winnipeg, au poste d’analyste des services en français à Santé en français. Un an plus tard, il prend donc la direction d’un organisme qu’il a déjà eu la chance d’apprendre à connaître de l’intérieur comme de l’extérieur, grâce à ses années à la Société Santé en français.

Quelle vision à la barre? 

Jérémie Roberge aborde ses nouvelles fonctions avec confiance. « Annie Bédard a laissé un organisme en santé et bien positionné, affirme-t-il. On va déjà dans la direction souhaitée : celle de développer des services en français et des accès à ces services pour nos communautés francophones. Je ne fais que m’inscrire dans sa continuité et poursuivre son travail. Je vais maintenir et consolider les partenariats qu’on a déjà, peut-être en développer d’autres. »

Il rappelle la priorité de Santé en français : « Aller vers une unité autour de la santé et des services sociaux, faire le lien entre tous les acteurs pour favoriser le mieux-être des individus et des communautés sur le terrain, et trouver et partager les bonnes pratiques pour améliorer la présence et la qualité des services. On s’assure qu’ils sont là et accessibles à tous, en particulier aux populations plus vulnérables comme les aînés, les nouveaux arrivants ou encore les personnes LGBTQ2+. »

Par ailleurs, depuis la pandémie de COVID-19, le secteur de la santé est en crise. Santé en français a un rôle clé à jouer pour s’assurer que les francophones ne sont pas oubliés. 

« En santé comme en services sociaux, on a de gros défis de main-d’oeuvre aujourd’hui, constate Jérémie Roberge. À Santé en fran-çais, on s’assure que des personnes francophones sont continuellement recrutées. On fait beaucoup de sensibilisation auprès des gouvernements. »

Deux autres grands rendez-vous sont au programme pour la première année de direction générale de Jérémie Roberge : le renouvellement du plan stratégique 2018-2023, qui a été prolongé d’un an, et les 20 ans de l’organisme de santé franco-manitobain en 2024. « C’est quelque chose à célébrer! », termine son nouveau directeur général.