Par Michel Lagacé.

Évidemment, elle est beaucoup plus qu’un simple dépôt de livres et de documents : aujourd’hui, c’est le lieu qui permet d’accéder à Internet, de suivre des cours, et d’obtenir de l’aide pour rédiger un curriculum vitae, pour effectuer une recherche d’emploi ou pour identifier des ressources communautaires. 

C’est dire à quel point il était donc grand temps que la Ville de Winnipeg entreprenne un examen sérieux de ses services de bibliothèque, le premier depuis 12 ans. Dans leur rapport, des fonctionnaires de la Ville dressent un portrait sombre de ce système de 20 succursales desservant aujourd’hui une population de 750 000 habitants. (1)

D’entrée de jeu, le rapport souligne l’importance d’augmenter les heures d’ouverture pour améliorer l’accès aux bibliothèques. D’après les auteurs, les heures limitées d’ouverture constituent un obstacle important à l’utilisation des services, et à la capacité d’offrir des programmes et de recevoir des visites d’écoles, de garderies et d’organisations de nouveaux arrivants. 

Précisément, les heures moyennes d’ouverture quotidienne sont de 5,49 en été et de 6,51 en hiver, beaucoup moins que dans trois municipalités qui ont servi de villes témoin : Edmonton (9,4), Regina (8,21) et Hamilton (7,62). 

Mais il y plus grave : Winnipeg se range au dernier rang, peu importe les critères de comparaison utilisés. Lorsqu’il s’agit du montant budgétisé pour les collections des bibliothèques en 2022, Winnipeg se situait à 3,71 $ per capita, en comparaison de 12,37 $ à Regina, 6,70 $ à Edmonton et à 6,03 $ à Hamilton.

Et encore pire, puisque la capacité des bibliothèques d’offrir des services et des programmes à la population dépend du nombre d’employés, là aussi, Winnipeg fait piètre figure : par 100 000 habitants, la Ville comptait 35,62 postes équivalents à temps plein budgétisés en 2022, en comparaison de 47,25 à Hamilton, 52,05 à Edmonton et 78,47 à Regina. 

En particulier, le rapport note que, bien que tout le personnel de la bibliothèque de Saint-Boniface soit bilingue, un manque de personnel bilingue suffisant a entraîné une réduction de ses heures d’ouverture. La pauvreté des services en français illustre jusqu’à quel point il est important que la Province et les Municipalités travaillent ensemble pour faire vivre une politique sur les services en français à l’échelle de toute la province.

L’argent étant le nerf de la guerre, rappelons que les taux d’impôts fonciers ont été gelés à Winnipeg entre 1998 et 2012, ce qui a entraîné un appauvrissement général de ses services. Dans un monde de plus en plus complexe, la pauvreté de notre système de bibliothèques en particulier a des conséquences pour toute la population, et surtout pour les gens à faible revenu et les nouveaux arrivants. Il est grand temps que Winnipeg se réveille à l’importance d’un service essentiel au bien-être de la population et au rayonnement de la Ville. 

(1) Voir le no 6.