Par Michel Durand-Wood.
C’est une initiative qui coûtera à la Province 165 millions $ pour six mois, ou 330 millions $ pour un an.
Pour une telle somme, on s’attendrait à ce que l’impact au niveau de l’individu soit impressionnant. Mais qu’en est-il vraiment?
Selon les données de Ressources naturelles Canada, le conducteur moyen au Manitoba ajoute 14 800 km à l’odomètre de sa voiture annuellement.
Cela veut dire que si votre voiture est une Ford F-150, avec une consommation de carburant de 10,7 L/100 km, vous brûlerez un peu moins de 1 584 L d’essence dans une année. La PPTE se chiffrant à 14 cents/L, votre économie annuelle sera d’environ 222 $, ou juste un peu plus que 4 $ par semaine.
Si votre voiture est plus économique en carburant qu’une F-150, vos économies seront plus basses. Si vous conduisez une voiture électrique, ou pas de voiture du tout, vos économies seront de zéro.
Loin d’avoir un impact impressionnant sur le coût de la vie, semblerait-il qu’il faudrait au moins deux semaines d’économies dans une F-150 avant de pouvoir même s’acheter une livre de beurre!
Est-ce qu’il y aurait une meilleure façon de dépenser 330 millions $ pour alléger le fardeau économique des ménages? Si je le demande en plein milieu d’une chronique, c’est que la réponse est oui.
Commençons à Winnipeg, d’où 200 millions $ de la PPTE proviennent, et seraient retournés.
Il ne faudrait que 83 millions $ pour remplacer complètement le revenu provenant de tarifs payés par les passagers de la Winnipeg Transit. Cela veut dire qu’avec cette somme, la Ville pourrait offrir l’accès gratuit au transport public à tous pour une année. Et les 117 millions $ restants pourraient servir à améliorer la fréquence et la qualité du service par 50 %.
Puisque chaque kilomètre qu’on ne conduit PAS nous épargne 17 cents d’essence, si une personne décidait de laisser sa F-150 à la maison uniquement pour faire l’aller-retour à son travail, à 5 km de chez elle, en autobus, elle économiserait déjà le DOUBLE qu’avec la politique d’élimination de la PPTE. Et c’est sans compter les épargnes faites sur les coûts de maintien, de dépréciation, de stationnement, etc.
Et si une personne prenait déjà l’autobus, l’élimination du tarif à la porte d’entrée du bus lui donnerait une économie de plus de 30 $ par semaine! Là, on commence à parler de vraie salade!
En plus, pour ceux qui auparavant n’avaient les moyens de se payer ni voiture, ni transport en commun, cette approche leur donne maintenant accès à des opportunités économiques qui n’existaient pas pour eux avant. C’est une politique qui contribue à combattre la pauvreté.
Ça aiderait aussi à éliminer les confrontations entre conducteurs et passagers ne voulant pas payer, rendant ceci aussi un investissement dans la sécurité publique.
La réduction du nombre d’automobiles sur les routes aiderait à réduire l’usure de ces routes, pour laquelle la Province doit transmettre des fonds à la Ville annuellement. Donc, en plus d’être uneactionpourcontrerlechangement climatique, c’est aussi un investissement en infrastructure!
Sans oublier que puisque chaque voyage par transport public débute et se termine avec une courte marche entre l’arrêt et la destination, on ajouterait des milliers de pas par jour aux vies de milliers de Manitobains, ce qui, les études le démontrent, aurait un impact positif sur leur santé. C’est donc aussi un investissement en santé publique!
C’est un investissement qui donne, et donne, et redonne. Et qu’en est-il pour les gens à l’extérieur des centres urbains avec transport public? Pour eux, je suis d’accord qu’on pourrait bien leur payer la portion des 130 millions $ qui leur reviendrait.
Mais n’oublions pas qu’à cet instant, Éco-Ouest, l’AMBM et la Municipalité rurale de Piney mènent ensemble une étude de faisabilité sur le transport public au rural.
Compte tenu de tout ça, pourquoi le gouvernement continue t-il d’insister à nous acheter à coups de quatre piastres, plutôt que d’investir dans le transport public?