Une exposition impressionnante, qui permet de rappeler que les artistes ne sont pas les seuls à rendre ces exhibitions possibles. 

Intitulée Tim Gardner : The Full Story, l’exposition invite les visiteurs à retracer 30 ans de la vie de l’artiste à travers son oeuvre. 

Du portrait au paysage, en passant par la nature morte, le travail de Tim Gardner varie et change à mesure que l’on progresse dans la galerie. Qu’il s’agisse de peinture à l’huile, à l’aquarelle ou de pastels, le réalisme de ses toiles donne le sentiment que l’on feuillette un album photo de vacances. Et justement, l’artiste se base sur des photos personnelles pour ses tableaux. 

C’est Stephen Borys, conservateur et président-directeur général du WAG, qui est derrière la mise en place de cette exposition. Encerclé par les tableaux de l’artiste, l’enthousiasme et la passion se lisent clairement sur le visage du conservateur. « Parmi les sujets favoris de Tim Gardner, explique-t-il, on retrouve la famille, mais aussi l’amitié masculine, the boys. » 

Lorsqu’il ne peint pas de paysages, les oeuvres de Tim Gardner tendent souvent à capturer les moments désinhibés de sa jeunesse. Qu’il s’agisse de nuits folles à Las Vegas, d’une simple bière entre amis, ou de son frère qui se soulage à la lisière d’une forêt. 

Au total, 186 pièces, qu’il a fallu aller chercher un peu partout en Amérique du Nord, sont exposées et utilisées pour raconter l’histoire de l’artiste canadien qui a obtenu son baccalauréat en beaux-arts à l’Université du Manitoba. Et c’est au conservateur qu’incombe la tâche de raconter cette histoire.

« Il n’y a pas vraiment de chronologie dans son travail, il peut prendre une photo qui date de 1995 et peindre la scène aujourd’hui. C’est pour ça que le fil conducteur de cette exposition, c’est le sujet et la période représentée dans ses oeuvres. » Par exemple, pour illustrer les années que Tim Gardner a passées à Los Angeles, Stephen Borys a rassemblé toutes ses oeuvres qui dépeignent la cité des anges, peu importe où et quand elles ont été faites. 

De la disposition des tableaux aux panneaux explicatifs, rien n’a été laissé au hasard. « Après cinq heures d’entretien avec Tim Gardner, j’ai pris la décision d’utiliser ses mots pour les panneaux. Je pense que c’est très important pour les visiteurs de comprendre qui il est. Je l’ai interrogé sur son expérience à Columbia University, sur son rapport aux couleurs, à la lumière… C’est un échange, l’occasion de poser des questions. » Même si le travail de Tim Gardner est assez direct, l’art contemporain peut s’avérer difficile à appréhender, en particulier pour les néophytes. 

« Je pense qu’il y a comme un mur entre l’artiste et les visiteurs. Mon travail en tant que conservateur, c’est d’essayer de briser ce mur. » 

La collaboration avec l’artiste joue donc un rôle important dans la mise en place d’une exposition, et cette collaboration prend des formes différentes.

« Je pense qu’il y a comme un mur entre l’artiste et les visiteurs. Mon travail en tant que conservateur, c’est d’essayer de briser ce mur. »

Stephen Borys
Un aperçu de l’exposition de Tim Gardner
Un aperçu de l’exposition de Tim Gardner. (photo : Hugo Beaucamp)

Fidèle à l’esprit de l’artiste 

Marie-Anne Redhead est assistante conservatrice pour les arts autochtones et contemporains au WAG, et prépare la future exposition d’une artiste autochtone. La conservatrice explique qu’elle passe beaucoup de temps avec l’artiste, dont elle ne peut pas encore dévoiler le nom. « C’est très important de développer une relation avec eux, de rencontrer l’être humain et pas seulement l’artiste. Je veux qu’ils se sentent confortables à l’idée de me parler, de me présenter leurs idées. Je ne pense pas que l’on puisse vraiment montrer l’esprit d’un artiste si on ne le connaît pas soi-même. » 

Elle aussi d’origine autochtone, Marie-Anne Redhead confie que cela influe sur sa façon d’approcher son métier et la création d’une exposition. « Le travail de l’artiste ne concerne pas seulement l’individu, mais toute la communauté, et cette notion se retrouve souvent dans le travail des artistes autochtones. On prend aussi beaucoup en compte la façon dont notre famille pourrait interpréter les oeuvres d’un artiste. Une part importante de mon rôle, c’est de créer cet espace où les familles et la communauté peuvent se rencontrer. » 

Alors les méthodes, les réflexions et la vision derrière une exposition dépendent non seulement de l’artiste lui-même, mais aussi du conservateur. Ainsi, deux expositions d’un même artiste peuvent être complètement différentes. Marie-Anne Redhead précise que cela dépend en partie de l’histoire de l’artiste que le conservateur ou la conservatrice souhaite raconter, mais elle parle aussi de la façon dont les pièces sont sélectionnées. Pour l’exposition sur Tim Gardner, Stephen Borys a souhaité retracer la vie de l’artiste. Marie-Anne Redhead, elle, va chercher les pièces « qui vont provoquer des discussions », en se posant parfois la question de savoir comment faire le lien entre différentes communautés autochtones, qui est un enjeu dans la conservation.

« C’est une question que l’on se pose souvent : comment travailler avec un artiste qui vient d’une communauté différente? Il faut alors chercher ce qui nous rapproche de la personne, de son travail. Car même s’il existe des différences entre chaque communauté, il y a aussi des choses que l’on partage. Par exemple, nous avons tous des souvenirs d’histoires que nous racontaient nos grand-mères. Ces histoires sont une partie de nous. »