Comme le veut la tradition, le nouveau président, le député de Flin Flon, Tom Lindsey, a été amené à son siège par un représentant du parti au pouvoir et de l’opposition officielle. Pour le parti au pouvoir, Wab Kinew était là. Mais côté opposition, ce n’était pas Heather Stefanson, cheffe par intérim du Parti conservateur (PC), qui a accompagné le nouveau président. 

Absente pour des vacances en famille selon le PC, c’est Kelvin Goertzen qui l’a remplacée le temps de la nomination du président de l’Assemblée législative. 

Pour Félix Mathieu, professeur adjoint au dépar-tement de science politique de l’Université de Winnipeg, même si cette absence pour cette nomination est symbolique, cela reste tout de même marquant. « Au-delà de cette cérémonie, Heather Stefanson ne s’est pas présentée devant les médias d’aucune manière, depuis sa défaite du 3 octobre. Elle s’était pourtant présentée comme une cheffe intérimaire qui va talonner le gouvernement et qui devait s’assurer que le parti au pouvoir allait bien rendre des comptes au public. » 

Si l’expert ne remet pas du tout en cause le besoin humain d’une pause après notamment une éreintante campagne électorale, il décrit ce choix politique comme « désastreux ». « On a décidé de donner le capitanat par intérim à Madame Stefanson, mais elle n’est pas là à un moment très important. Et comme le veut la formule, l’espace a horreur du vide. Ça fait désordre. Ça donne l’impression d’un parti incapable de s’organiser. En son absence, on a entendu Kelvin Goertzen qui aurait peut-être dû être le chef par intérim. Ou encore Obby Khan qui s’est notamment présenté comme conciliateur entre les communautés pro-palestiniennes et pro-israéliennes pour tempérer les ardeurs. »

« C’est crucial pour son parti et même pour la démocratie manitobaine qu’elle soit présente au début de la session législative et au discours du trône le 21 novembre. » 

Félix Mathieu

Une prise de parole attendue 

Selon Félix Mathieu, Heather Stefanson aurait dû déjà réagir au moins à la composition du gouvernement de Wab Kinew et également aux différentes lettres de mandat données aux nouveaux ministres. « C’est crucial pour son parti et même pour la démocratie manitobaine qu’elle soit présente au début de la session législative et au discours du trône le 21 novembre », lance-t-il. 

Cette absence remarquée interpelle aussi sur les obligations de nos hommes et femmes politiques. À l’image du député néo-démocrate de Fort Garry, Mark Wasyliw, qui a créé le débat après ses commentaires sur le fait de vouloir continuer à exercer sa profession d’avocat malgré son rôle, il est normal, selon Félix Mathieu, que les professionnels politiques assument leurs responsabilités. « Ce n’est même pas de la démagogie de demander ça. Autant le cas de Mark Wasyliw était critiquable sur le plan de l’utilisation des fonds publics. Mais en plus, en tant que leader de l’opposition officielle, on bénéficie d’un salaire bien au-delà de ce que la moyenne des Manitobains et Manitobaines gagne. D’autant plus qu’il s’agit d’argent public. La décence impose qu’on se rende présent. » 

Pour information, en 2023, le salaire annuel d’un député est fixé à 102 998 $. Et quand un député joue aussi le rôle de leader de l’opposition officielle, il ajoute 56 390 $ à son salaire.