Chantallya Louis
Mais pour Jean-Hugues Roy, professeur de journalisme, il faut modifier sa règlementation pour protéger le secteur des médias.
Le 7 novembre dernier, la ministre du Patrimoine canadien, Pascale St-Onge, a soutenu que les négociations avec le géant Google étaient toujours sur la table. « Je n’ai rien de nouveau à dire, mais on continue de travailler. La loi va entrer en vigueur le 19 décembre, donc ça avance bien », a-t-elle déclaré en mêlée de presse.
Celle-ci obligerait les géants du Web comme Meta (société mère de Facebook et Instagram) et Google à indemniser les médias canadiens pour l’utilisation de leurs contenus sur leurs plateformes.
Meta a déjà bloqué le partage de contenus journalistiques sur ses réseaux. Google menace de faire de même si aucune entente n’est conclue avec le fédéral.
« Réparer C-18 »
« Les gouvernements, leur objectif c’est de veiller au bienêtre de la population et un des critères de ce bienêtre, c’est d’être informé des affaires de la cité, de ce qui se passe auprès des pouvoirs publics, etc. Et qui fait ça? Ce sont les entreprises de presse, les journalistes », souligne Jean-Hugues Roy, professeur de journalisme à l’École des médias de l’Université du Québec à Montréal (UQAM).
Pour lui, il faudrait commencer par revoir la loi afin de protéger le secteur des médias des géants du Web.
« Il faut tout de suite commencer à penser un après C-18, à comment réparer C-18 pour qu’ils [les gouvernements] atteignent vraiment leur objectif; c’est-à-dire de contribuer au financement de l’information au Canada », poursuit-il.
Une des solutions qu’il propose serait d’adopter une nouvelle loi pour amender C-18, afin d’obliger les plateformes comme Meta et Google à partager les contenus de nouvelles sur leurs plateformes.
« Le gouvernement canadien a été très conciliant avec les plateformes, lâche-t-il. Ça a été d’abord très long avant que C-18 soit adopté et on l’avait aménagé d’une telle façon qu’il y avait une porte de sortie pour les géants du Web. Il y a un des deux [Meta] qui l’a empruntée. Alors là, il faudrait boucher ces sorties-là. »
Fonds monétaire
La loi adoptée en juin oblige les géants du numérique à négocier les redevances avec chaque média.
Cependant, Jean-Hugues Roy est plutôt d’avis de créer un fonds monétaire où Google mettrait un certain montant d’argent que les médias se partageraient ensuite, par exemple par l’intermédiaire du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC).
Plus tôt cette année, Google a proposé de créer un fonds pour soutenir les médias canadiens, auquel le géant du Web contribuerait.
Bien que la ministre Pascale St-Onge se soit dite ouverte à cette idée, elle souhaite tout de même garder la date d’entrée en vigueur de la nouvelle loi au 19 décembre prochain.
La menace de Google plane toujours
Si Google décide de suivre Meta et de bloquer toutes les nouvelles sur ses plateformes au Canada, « ça va être terrible pour l’information au pays », lance Jean-Hugues Roy d’un ton inquiet.
« S’il n’y a plus d’informations journalistiques, d’informations validées sur les réseaux sociaux, c’est un problème. Ça contrevient au bienêtre de la population, ça favorise la désinformation et le gouvernement du Canada aurait un argument à mon avis pour forcer les plateformes de réseaux sociaux d’avoir de l’information. »
Toutefois, le professeur ne croit pas que Google mettrait sa menace à exécution parce qu’il en ressortirait perdant. Selon lui, ce dernier est une plateforme utilisée principalement pour faire de la recherche.
« [Google] va appauvrir ses résultats de recherche pour ses utilisateurs au Canada, je ne suis pas certain que ce soit à leur bénéfice. »
Des pistes de solutions proposées
Selon la ministre du Patrimoine canadien, plusieurs programmes sont mis en place afin de soutenir les médias canadiens. « On regarde ce qu’on peut faire pour les soutenir davantage dans cette période de transition », a assuré Pascale St-Onge le 7 novembre.
« Ce qui est important, c’est de continuer d’avancer avec la modernisation de nos lois », a-t-elle soutenu.