Des règles qui pourraient changer le système de vote pour les élections de la chefferie. Un nouveau système de point qui risque de diviser le parti.  

À la mi-janvier 2024, les délégués du Parti progressiste-conservateur du Manitoba voteront pour faire changer ou non, les règles qui encadrent l’élection de leur chef de parti. Après sa défaite aux élections provinciales du 3 octobre, Heather Stefanson, devenue la cheffe de l’Opposition, avait annoncé qu’elle céderait son poste de dirigeante du Parti. De nouvelles élections se dessinent donc à l’horizon.

Une décision de revoir l’ensemble de règles, qui fait suite aux problèmes rencontrés lors des dernières élections pour la chefferie de l’automne 2021 pendant lesquelles Heather Stefanson s’était imposée de peu face à Shelly Glover. Cette dernière avait d’ailleurs contesté le résultat devant la Cour du Banc du Roi arguant que le résultat avait été faussé. Plusieurs membres s’étaient plaints de n’avoir pas reçu leurs bulletins de vote à temps.

Éviter les problèmes passés

Parmi les recommandations et les potentielles nouvelles règles qui seront adoptées : une période minimale de campagne comprise en 90 jours et 150 maximum, mais aussi, un nouveau système de vote.

Alors que le Parti progressiste-conservateur du Manitoba utilise le système un membre, un vote, les nouvelles règles impliqueraient un système de point se rapprochant de celui utilisé par le Parti au niveau fédéral. Christopher Adams est professeur associé d’études politiques à l’Université du Manitoba, et il explique ce que cela implique. « C’est un système qui dépend de la taille des circonscriptions. Si ces dernières comptent moins de 100 membres, alors elles ne reçoivent qu’une portion des votes. En revanche, si elles en comptent 100 ou plus, les circonscriptions ont un pouvoir égal au nombre de leurs membres. »

Or, dans le cas de la branche manitobaine du PC, le seuil de voix pour les grandes circonscriptions (en matière de membres) serait abaissé, et celui pour les petites, relevé. Cela signifie concrètement que les petites circonscriptions obtiendraient plus de poids lors des élections de la chefferie.

L’ancienne candidate Shelly Glover s’était opposée publiquement à la fin de l’année 2023 à l’adoption de ces nouvelles règles, estimant que ces dernières pénaliseraient les endroits où la présence des conservateurs est la plus forte.

Et la position de l’ancienne député fédérale de Saint-Boniface/Saint-Vital se comprend quelque peu si l’on regarde en arrière et que l’on sait que la majorité de son soutien provient des circonscriptions rurales.

Dualité au sein du Parti

« Historiquement, le Parti progressiste-conservateur a toujours eu deux grandes factions, souligne Christopher Adams. La ville, plus centriste, plus axée sur les institutions établies. Et une faction plus rurale, plus à droite, anti-institutions. Et lorsque l’on regarde les batailles pour le leadership du Parti cette dualité ressort.  

« En 1975 entre Sterling Lyon de Portage la Prairie et Sidney Spivak, un avocat, puis en 1983 entre Gary Filmon et Brian Ransom. Le même schéma est ressorti dans le clash entre Heather Stefanson et Shelly Glover. Ainsi, l’élection a pris des airs d’affrontement entre l’élite du parti en ville, car les membres élus de l’Assemblée législative soutenaient Heather Stefanson et les membres ordinaires du Parti progressiste-conservateur en dehors de Winnipeg. »

Et pour le politologue, cela se fera ressentir une fois de plus en janvier lorsqu’il s’agira de voter pour ou contre l’adoption des nouvelles règles. « Tout le monde va vouloir s’assurer que son côté du parti soit traité équitablement par les règles. »

Il est alors légitime de penser que cette nouvelle formule, désavantageuse pour les grandes circonscriptions, pourrait faire courir le risque au Parti de perdre du soutien et de la membriété dans ces zones-là, mais Christopher Adams n’est pas inquiet pour le PC.

« Le danger est assez faible, je pense. Ce sont des circonscriptions qui soutiennent fortement le Parti, alors, selon moi cela ne devrait pas avoir d’impact sur la popularité du Parti. »