Le Centre canadien de politiques alternatives faisait remarquer en début d’année que les 100 PDG les mieux payés du Canada ont reçu en moyenne 14,9 millions $ en 2022, soit 246 fois plus que le travailleur moyen. Cette somme représente plus du double de ce que les PDG recevaient en 2008 (soit 7,4 millions $) lorsque les premiers calculs ont été publiés.

Dans cette même ligne de pensée, un nouveau rapport d’Oxfam révélait ce mois-ci que la fortune des cinq hommes les plus riches du monde a plus que doublé depuis 2020, passant de 405 milliards $ à 869 milliards $, tandis que cinq des huit milliards d’humains se sont appauvris.

À l’occasion du Forum économique mondial qui se tenait à la mi-janvier à Davos en Suisse, 260 milliardaires, dont six du Canada, lançaient un appel, Proud to pay more, à l’élite économique et politique du monde entier. Ils ont demandé pour la troisième année consécutive que les dirigeants de la planète mettent en place un impôt sur la fortune.

Pour appuyer leur demande, ils ont fait valoir aux représen- tants élus des principales économies du monde que les conséquences de ne pas prendre de mesures pour lutter contre la montée spectaculaire des inégalités économiques seront toujours plus catastrophiques pour la société. Ils affirment que le coût des inégalités pour la stabilité éco- nomique, sociétale et écologique augmente de jour en jour. Ils insistent sur le besoin d’agir de toute urgence, ajoutant que tout retard renforce le dangereux statu quo économique, menace nos normes démocratiques et rejette la responsabilité d’agir sur nos enfants et petits-enfants.

Le Canada n’est pas exempt des conséquences des inégalités économiques. Il y aurait au moins 235 000 Canadiens qui sont sans abri. D’ailleurs le nombre n’a cessé d’augmenter depuis la pandémie. Les conditions de vie des personnes sans logement ou dans un logement précaire se détériorent, tandis que la capacité des refuges n’augmente pas au même rythme que le besoin.

Les problèmes de santé mentale, les drogues toxiques, les violences basées sur le genre et, évidemment, l’accès au logement qui devient de moins en moins abordable, aggravent les crises sociales qui mènent, entre autres, à des campements de fortune de plus en plus nombreux au pays.

Bref, reconnaissons-le franchement, le statu quo économique n’est pas tenable car il menace la stabilité politique et sociale du pays. Et au fond, la préoccupation soulignée par 260 milliardaires n’est qu’une simple question de conscience et de compassion humaines. Et c’est la raison pour laquelle il nous revient soit d’agir soit de continuer à vivre dans une société où les inégalités économiques minent indiscutablement la dignité humaine de nos semblables, ceux et celles qu’à un autre temps nous appelions nos sœurs et nos frères.