Le nombre grandissant de campements des sans-abri dans nos villes a rendu visible une crise du logement qui semble s’amplifier d’année en année. Il fut un temps où les sans-abri et les membres les plus pauvres de la société étaient relativement invisibles, et leur discrétion nous permettait de ne pas les voir. Aujourd’hui, nous ne pouvons plus fermer les yeux sur la situation désespérée des plus démunis de la société.

Au point où la défenseure fédérale du logement, Marie-Josée Houle, réclamait dans son rapport final déposé la semaine dernière « une réponse nationale à la crise des droits de la personne qui frappe les personnes vivant dans les campements ».

Si la défenseure fédérale parle des droits de la personne lorsqu’il s’agit du manque de logements abordables et de services de soutien limités, c’est parce que le Parlement canadien a adopté en 2019 une Loi sur la stratégie nationale sur le logement. Le gouvernement fédéral y énonce une politique qui reconnaît que « le droit à un logement suffisant est un droit fondamental de la personne confirmé par le droit international. » Cette Loi exprime aujourd’hui les aspirations des législateurs, car si les campements existent, c’est parce que le droit à un logement adéquat n’est pas respecté.

Marie-Josée Houle dénonce les expulsions forcées des campements dans des villes comme Edmonton, Vancouver et Montréal. Non seulement est-il trop tard pour les rendre invisibles; ces expulsions augmentent l’insécurité des personnes sans logement et les exposent à un risque accru de violence. Car, faute de logements abordables, les campements peuvent offrir une certaine sécurité que leurs résidents disent ne pas retrouver dans les refuges d’urgence.

La défenseure fédérale propose que les personnes en campements aient accès aux services municipaux dont elles ont besoin pour survivre dans la dignité. Elle rejette l’idée selon laquelle la fourniture de ces services – eau, assainissement, électricité – rendrait permanents les campements de tentes. Ils existent parce que les alternatives disponibles comme les refuges temporaires sont considérées encore pires que de vivre en campements. C’est pourquoi Marie-Josée Houle propose que les gouvernements consultent les personnes sans logement pour connaître leurs besoins, et que le gouvernement fédéral dépose d’ici le 31 août prochain un plan national d’intervention.

Il nous reste un long chemin à parcourir pour éradiquer les causes profondes des campements. Le Canada dispose cependant de moyens financiers et humains adéquats pour résoudre la crise actuelle. La première condition pour y arriver est une volonté politique pour éliminer un des enjeux incontournables de notre société. Et c’est à nous tous d’insister que les aspirations exprimées dans la Loi sur la stratégie nationale deviennent réalité.