Plusieurs défis s’en viennent pour le gouvernement néo-démocrate mené par Wab Kinew. Après une courte première période parlementaire juste après son élection, le gouvernement provincial s’avance vers des thèmes importants pour ces mois de mars et avril : société, économie, budget.

Félix Mathieu, professeur adjoint en sciences politiques à l’Université de Winnipeg, sera très attentif à cette période. « La première session avait duré 13 jours et était très rapprochée des résultats des élections. Puis, un contexte financier plus complexe qu’imaginé avait été découvert, alors on jetait le blâme sur l’ancien gouvernement pour à peu près tout et rien. Maintenant, avec la présentation de son propre budget, le nouveau gouvernement devra prendre ses responsabilités face aux difficultés, mais aussi certaines réussites. »

« Au niveau de l’économie pure, j’ai l’impression qu’on peut difficilement concilier les promesses faites pendant les élections et le contexte financier. On va devoir couper quelque part. »

Félix Mathieu

Un gouvernement qui avance

L’expert en politique remarque d’ailleurs, à l’image des premières semaines de mandat, que le gouvernement de Wab Kinew a été déjà très actif dans ces tout premiers jours de retour au Palais législatif. « Cinq projets de loi ont été déposés. C’est un agenda chargé, notamment d’un point de vue symbolique. Je pense à l’annonce d’un corridor de sécurité pour l’accès aux cliniques d’avortement, c’est sujet tellement important pour la base militante et partisane des forces néo-démocrates. Ça m’indique qu’on est en train de faire le plein de capital politique et symbolique. »

Ce capital politique engrangé au cours des derniers mois sera sûrement très utile à Wab Kinew et son gouvernement alors que des annonces plus difficiles pourraient arriver. En évoquant un « contexte financier plus complexe », Félix Mathieu fait référence au déficit manitobain annoncé par Adrien Sala, ministre manitobain des Finances, le 5 décembre dernier. Selon la mise à jour budgétaire du deuxième trimestre, présentée par le gouvernement néo-démocrate, le Manitoba fait face à un déficit de plus de 1,6 milliard $. Pour rappel, la mise à jour budgétaire du premier trimestre, présentée en juillet, le déficit anticipé par la province s’élevait à 363 millions de dollars.

Les promesses face au contexte financier

C’est avec ce chiffre en tête que le gouvernement s’avance vers le 2 avril et la présentation du budget provincial. Dans le même temps, les néo-démocrates, qui veulent s’attaquer à ce déficit, « l’un des pires déficits que notre province n’ait jamais connus » selon Wab Kinew, souhaitent maintenir les allégements fiscaux accordés par l’ancien gouvernement conservateur. Un équilibre délicat à trouver. « Par définition, un budget fait des déçus », rappelle d’abord Félix Mathieu.

« Au niveau de l’économie pure, j’ai l’impression qu’on peut difficilement concilier les promesses faites pendant les élections et le contexte financier. On va devoir couper quelque part. Ce qui va m’intéresser, c’est quel sera l’ordonnancement des thèmes qu’on va mettre de l’avant. La santé sera-t-elle encore au tout début? Ou sera-t-elle en trois ou en cinq pour la mettre entre des aspects plus positifs? Certaines déceptions seront donc un peu maquillées pour les rendre plus acceptables. »

Enfin, Wab Kinew va devoir aussi aller de l’avant sur un sujet très sensible dans la province : les fouilles dans le dépotoir de Prairie Green. En effet, il y a encore quelques jours, à l’appel de l’Assemblée des chefs du Manitoba, des centaines de personnes ont demandé de l’action aux gouvernements provincial et fédéral. « Le gouvernement ne peut pas jouer la tactique de la chaise vide étant donné qu’il s’est engagé si fermement. Il a été promis de consulter et d’agir en conséquence. Alors, il va falloir voir si le gouvernement veut consentir des sommes significatives pour commencer les fouilles. S’il y a marche arrière, le gouvernement va devoir trouver une logique convaincante. Ça serait très difficile. »