Un délai notamment imputé, entre autres, à un manque de médecins spécialistes et qui est dommageable pour les jeunes en attente.

Le Canada Fetal Alcohol Spectrum Disorder Research Network estime que 4 % de la population canadienne souffre d’un TSAF.

Une estimation puisque les diagnostics sont parfois longs à obtenir. Et ce pour plusieurs raisons comme l’indique Simon Laplante, membre du CA de la Manitoba FASD Coalition. « Je pense qu’obtenir un diagnostic est un processus complexe. Il faut une équipe complète avec plusieurs spécialistes. Parce qu’aucune personne avec un trouble du spectre de l’alcoolisation foetale n’a les mêmes symptômes ni les mêmes difficultés. »

Une chose est certaine pour Simon Laplante, ce n’est pas un manque de volonté de la part de la société. La réalité est «qu’il y a un manque de spécialistes ».

Un diagnostic qui est aussi difficile à poser tant les symptômes sont propres à la personne. « Le TSAF crée beaucoup de défis pour la personne. Souvent, les personnes atteintes d’un TSAF ont l’air normal, on ne remarque rien. Mais elles vont avoir beaucoup de difficultés à contrôler leurs émotions, elles ne vont pas avoir de filtre, il y a beaucoup d’impacts. Alors c’est vraiment important d’avoir le bon diagnostic. »

Cependant Simon Laplante insiste sur un point. « Un diagnostic se pose avec une équipe de spécialistes.

Souvent les personnes qui se font diagnostiquer par un seul médecin, c’est un diagnostic raté. Il arrive aussi que des psychologues diagnostiquent des personnes avec TDAH ou encore des troubles de l’attention, sauf qu’en fait il s’agit d’un TSAF. C’est donc toute une équipe de spécialistes qui peuvent poser, identifier un TSAF. »

Des répercussions

Plus le diagnostic est long à établir, plus les conséquences pour la personne peuvent être importantes comme le suggère Simon Laplante. « La personne va avoir des difficultés à gérer son argent, ses émotions. Elle va être mal adaptée socialement. Tous ces comportements font que la famille va se questionner.

« Si on obtient un diagnostic tôt, il est possible de travailler avec l’enfant et sa famille pour contrôler ces comportements. »

Simon Laplante estime que chez certains enfants, des signes apparaissent autour de l’âge de trois à quatre ans.

À la fin du mois de décembre 2023, une adolescente de 14 ans a été poignardée à Winnipeg, des documents de Cour montrent qu’elle attendait de recevoir un diagnostic de TSAF. Elle luttait contre des dépendances et était placée dans le système d’accueil manitobain.

Pour Simon Laplante, cet exemple illustre le mal- être que peuvent ressentir certains jeunes qui souffrent de TSAF. « Imaginez-vous un adolescent mal dans sa peau qui se questionne sur lui-même… Souffrir d’un TSAF vient ajouter une couche à ce mal-être. De plus, il y a plusieurs jeunes/adultes avec un TSAF qui vivent dans la rue parce qu’ils n’ont pas le soutien nécessaire que ce soit financièrement ou institutionnellement. »

D’ailleurs pour soutenir ces personnes dans le logement, le gouvernement du Yukon, en partenariat avec la Fetal Alcohol Spectrum Society Yukon ont développé des logements sous supervision pour les personnes vivant avec un TSAF. Ils reçoivent donc de l’aide pour la gestion de leur épicerie, de l’organisation dans la maison, etc. Simon Laplante pointe qu’« au Manitoba il existe des organismes comme New Directions, qui peuvent aider ceux qui ont un diagnostic à naviguer dans le système ».

Un stigma

Si les diagnostics peuvent être aussi tardifs, c’est aussi en raison du stigma qui entoure la consommation d’alcool durant la grossesse. Simon Laplante rappelle qu’« il ne faut pas juger les mères qui ont consommé. Il y a toutes sortes de raisons pour lesquelles une personne se tourne vers l’alcool, que ce soit des traumas, des dépendances. Et c’est très dur pour une maman qui a bu durant sa grossesse de passer au travers d’émotions, de culpabilité, de honte sociale.

« Il reste que ce TSAF existe dans notre société et qu’il faut le prendre en charge. »