Avec des informations d’Ophélie Doireau

En tournée d’un bout à l’autre du pays ces dernières semaines pour présenter les grandes lignes de son budget, le gouvernement fédéral libéral a officiellement déposé son budget 2024. Beaucoup de nouvelles de dépenses, notamment en logement, avaient été annoncées faisant craindre un déficit plus grave. D’ailleurs, de nouvelles taxes sur les plus riches devraient financer ces nouveaux investissements.

Raymond Lafond, comptable professionnel agréé, donne quelques commentaires à chaud. « Le problème de plusieurs annonces sur le logement est qu’on ne verra les effets de ces annonces qu’à long terme. Dans 12 à 18 mois, il y a peu de choses qui vont changer. Ça va peut-être être une déception pour les jeunes qui veulent s’acheter des logements. »

Un déficit maintenu

Finalement, le déficit est maintenu à 39,8 milliards $, comme prévu par le gouvernement à l’automne dernier. Le total des dépenses augmente passant 497,5 milliards en 2023 et 534,6 milliards en 2024. C’est une hausse de 8 % en 2024 par rapport au budget 2023.

Selon les estimations, la croissance pour le premier trimestre de 2024 devrait atteindre environ 3,5 %. Aussi, le gouvernement libéral a annoncé mardi que le taux d’inclusion sur les gains en capital supérieurs annuellement à 250 000 $ passera de 50 % à 66 % le 25 juin 2024.

« L’économie canadienne affiche des résultats qui dépassent les attentes. Malgré la hausse des taux d’intérêt, le Canada a évité la récession que certaines personnes avaient prédite », peut-on lire en introduction du document budgétaire de plus de 400 pages.

Pourtant Raymond Lafond soulève quelques inquiétudes. « Les dépenses augmentent plus rapidement que les revenus. Je pense que c’est un défi dans notre économie. Nous devrions tenter de générer des petits surplus pour parer à des situations comme une pandémie.

« Nous ne faisons pas face aux défis à venir comme la productivité des Canadiens, la santé d’une population vieillissante sans parler de la transition écologique. Malgré cette réalité, nous dépensons beaucoup sans faire face à l’avenir. Je pense que c’est un budget inflationniste. »

Raymond Lafond souligne également que « le gouvernement fédéral va investir per capita 13 350 $. De son côté, le Manitoba va investir 16 400 $ par personne Nos deux paliers de gouvernement dépensent près de 30 000 $ par Manitobain. C’est donc bon de rappeler que certes, nous payons des impôts. Mais que les gouvernements investissent également dans les citoyens. »

Quelques points saillants

Parmi les faits saillants relevés, on peut noter les budgets de la Sécurité et défense qui s’établit à 10,7 milliards $. Le budget pour les Autochtones est de 9,1 milliards $. Pour la Culture et les communautés, un budget de 1,5 milliard $ est prévu.

Régulièrement dans l’actualité ces dernières semaines, la taxe carbone a aussi été évoqué dans ce budget. On apprend notamment que 600 000 petites et moyennes entreprises canadiennes auront droit à une remise sur cette taxe. Cette mesure remettra 2,5 milliards $ aux entreprises canadiennes.

Au Manitoba

Le Manitoba a aussi été mentionné dans ce budget. Le Fédéral a rappelé l’accord de 369 millions $ sur trois ans pour l’embauche notamment 400 médecins de plus, 300 infirmières et infirmiers de plus, 200 membres du personnel ambulancier paramédical et 100 travailleuses et travailleurs en soins à domicile pour combler les pénuries de personnel. Encore en santé, le nouveau financement accordé au Manitoba est de 1,84 milliard $, soit un total de 7,14 milliards $ du financement supplémentaire pour la période de 2023-2024 à 2032-2033.

Côté éducation, au Manitoba, le tarif de 10 $ par jour est en vigueur pour les gardes d’enfants depuis le 2 avril 2023. Le Fédéral rappelle que cela représente jusqu’à 2 610 $ économies annuelles estimées en 2024, par enfant.

La francophonie canadienne

Pour la francophonie, le budget de 2024 propose de verser 26 millions $ sur cinq ans, à compter de 2024-2025, au ministère du Patrimoine canadien, au Secrétariat du Conseil du Trésor du Canada et au Commissariat aux langues officielles afin d’appuyer la mise en œuvre d’une Loi visant l’égalité réelle entre les langues officielles du Canada. « La FCFA est satisfaite que le gouvernement ait suivi notre recommandation en termes de renforcement des capacités pour mettre en œuvre la nouvelle Loi, notamment au Commissariat aux langues officielles. Cependant, la contrepartie c’est que les organismes et institutions de nos communautés demeurent dans une situation de précarité alarmante et le budget d’aujourd’hui ne change rien à cet état de fait », a commenté la présidente de la Fédération des communautés francophones et acadienne, Liane Roy.

Dans son budget de 2024, le gouvernement propose également de verser 9,6 millions $ sur trois ans, à compter de 2024-2025, au Service administratif des tribunaux judiciaires afin d’accroitre sa capacité à fournir les décisions traduites des tribunaux fédéraux.

« Il y a beaucoup de promesses et des dépenses qui ont été faites pour des années à venir. Le prochain gouvernement, assumant que ce n’est pas un gouvernement libéral, aura beaucoup de mal à couper dans ces mesures parce que les Canadiens y tiennent. »

Raymond Lafond, comptable agréé

Réactions de l’Opposition

Pierre Poilievre, chef du Parti conservateur du Canada, a fait savoir son désaccord avec le budget présenté à la Chambre des communes. « Après huit ans sous Justin Trudeau, le budget ne s’équilibre toujours pas. Tout ce dans quoi Justin Trudeau dépense de l’argent devient pire et plus coûteux. Trudeau dépense, les Canadiens sont ruinés et le pays est brisé. […]

« Les Conservateurs de gros bon sens veulent que les citoyens canadiens soient grands et que le gouvernement soit plus petit et plus efficace. Un État qui est le serviteur et non le maître. Où nos priorités sont d’abolir la taxe, de bâtir des logements, de réparer le budget et de stopper les crimes. »

Raymond Lafond ne voit pas de quelle manière un prochain gouvernement élu pourra réagir vis-à-vis de ce budget. « Il y a beaucoup de promesses et des dépenses qui ont été faites pour des années à venir. Le prochain gouvernement, assumant que ce n’est pas un gouvernement libéral, aura beaucoup de mal à couper dans ces mesures parce que les Canadiens y tiennent.

« Je ne sais pas comment les impôts pourraient être baissés lorsqu’on a un déficit projeté de 40 milliards $. » De son côté, Pierre Poilievre a promis de baisser les impôts si son parti arrive au pouvoir en 2025.

Le chef du NPD du Canada, Jagmeet Singh, a aussi réagi à ce budget. Il met notamment de l’avant l’incapacité des Libéraux à « s’attaquer aux profits des grosses compagnies ».