Il s’en souvient encore comme si c’était hier.Le 10 mai 1979, le jeune pompier volontaire âgé de 19 ans répondait à son tout premier appel. Dans un entretien pour notre journal en 2022, AlainNadeau disait avoir rejoint les pompiers simplement pour aider. « Je voulais servir la communauté. J’avais le choix, il y avait plusieurs manières de contri- buer, mais la plupart des choses qui m’étaient proposées étaient assez calmes et statiques. J’avaisbesoin d’un peu plus d’action, je voulais me sentir actif. Puis, j’ai pensé à la caserne, c’était beaucoup plus physique. En tout cas, plus que des assemblées ou des réunions! »
Des décennies plus tard, cette envie d’aider et d’être présent pour sa communauté n’a pas changé même s’il n’imaginait pas à l’époque avoir une telle longévité.« Non, je ne m’attendais pas à être encore et d’avoir une aussi belle caserne. Je suis fier de ce qu’on est devenu et où l’on s’est rendu aujourd’hui. Je suis d’ailleurs le dernier membre encore présent à avoir rejoint la troupe en 1979. » Alain Nadeau, 64 ans, fait référence à la caserne toute neuve de La Broquerie, inaugurée au printemps 2023.
Les pompiers, une famille
Alors que le mois de juillet s’en vient bientôt, Alain Nadeau reconnaît quelques sentiments partagés. « D’une certaine manière, je me sens soulagé d’avoir pris cette décision. C’était le temps. Mais, ça sera difficile, car on laisse quand même une famillederrière soi. Je ne serai pas loin, mais ça ne sera pas le même quotidien. On laisse en arrière un vrai bon groupe qui va continuer à gérer la caserne. »
Le mot famille n’est pas utilisé au hasard. En effet, parmi la trentaine de mem- bres que compte la station, Alain Nadeau compte trois de ses enfants. D’ailleurs, en même temps que lui, Pierre Nadeau, son cousin, va quitter la caserne après 37 ans de services. « Tous les deux, on va se trouver de quoi faire », dit le pompier volontaire en souriant. « Ça fait chaud au coeur de voir des membres de ma famille dans la caserne. Certains sont même devenus professionnels à Winnipeg. Nous avons d’ailleurs eu beaucoup de jeunes à La Broquerie qui sont ensuite devenus professionnels, que ce soit à Winnipeg ou Brandon. »
Alain Nadeau a aussi une petite-fille de 16 ans qui espère suivre ses traces d’ici quelques années. Si la caserne ne connaît pas deproblème de recrutement, ça peut s’expliquer par l’éducation dès le plus jeune âge. « On a toujours été dans les écoles, à faire des démonstrations. Les jeunes ont toujours été très intéressés. »
Faire face à plus d’appels
En plus de la bâtisse et de l’équipement, Alain Nadeau a remarqué d’autres changements dans sa fonction de pompier. «Quand on a commencé, on avait 10 à 12 appels par année, quasiment rien. Maintenant, on est autour des 100 appels par an. On a beaucoup d’appels pour les accidents d’autoroute, des alarmes dans les maisons. » Pour le pompier volontaire, qui élève une cinquantaine de bisons dans sa ferme, cette hausse peut avoir un impact dans la vie professionnelle. « Ça prend du temps. C’est difficile pour le pompier, mais aussi pour l’employeur. Il se retrouve face à une personne qui doit partir assez souvent. Je me souviens d’une année où il y avait des feux de prairies, c’était une saison vraiment sèche. On donnait presque 40 heures par semaine à la brigade. »
Face à une population grandissante dans la municipalité qui a augmenté par exemple de 10,7 % entre 2016 et 2021 (1), cela a pu entraîner aussi l’augmentation des appels. Et avec cette augmentation, les pompiers ont aussi fait face à des drames. « Il y a eu beaucoup d’affaires qu’on a vu qu’on aurait aimé ne pas voir. Mais une foisque c’est passé, c’est encore là. Ici, c’est une famille. On se rencontre deux fois par mois pour en parler, pour observer. Et l’on essaie de s’assurer que tout le monde va bien », souligne Alain Nadeau.
(1) En comparaison, la moyenne provinciale était de 5,0 % et la moyenne nationale de 5,2 %, selon Statistique Canada.